Sujet : Dans l’« Avis de l’auteur », Renoncour s’adresse en ces termes au lecteur de l’Histoire du chevalier des Grieux et de Manon Lescaut :

« Dissertation n°1 Proposition de corrigé Sujet : Dans l’« Avis de l’auteur », Renoncour s’adresse en ces termes au lecteur de l’Histoire du chevalier des Grieux et de Manon Lescaut : « Outre le plaisir d’une lecture agréable, on y trouvera peu d’éléments qui ne puissent servir à l’instruction des mœurs ; et c’est rendre, à mon avis, un service considérable au public, que de l’instruire en l’amusant.

» Dans quelle mesure cette affirmation correspond-elle à votre lecture du roman ? Vous répondrez à cette question dans un développement structuré, en vous appuyant sur le texte de l’abbé Prévost, votre compréhension du parcours associé et vos lectures complémentaires. [Introduction] [Présentation de l’œuvre] Dès sa parution, le roman Manon Lescaut, jugé immoral, fut condamné à être brûlé.

Par la voix de Renoncour, Prévost se défend pourtant de cette accusation dans l’« Avis de l’auteur » en ces termes : [Reprise du sujet à l’identique] « Outre le plaisir d’une lecture agréable, on y trouvera peu d’éléments qui ne puissent servir à l’instruction des mœurs ; et c’est rendre, à mon avis, un service considérable au public, que de l’instruire en l’amusant.

» [Reformulation du sujet] La formule rapproche deux champs lexicaux différents, celui de l’agrément, avec les mots « plaisir », « agréable » et « en l’amusant », et celui de la dimension morale du récit, avec des expressions telles que « servir à l’instruction des mœurs » et « l’instruire ».

Or, bien que le plaisir et l’instruction du lecteur soient associés ici, leur rapport ne va en réalité pas de soi et doit être questionné, d’autant que la formule « à mon avis » montre que l’affirmation est partiale.

[Reprise de la problématique] Nous nous demanderons alors si le plaisir de la lecture s’accommode toujours de la morale dans Manon Lescaut. [Annonce du plan] Nous verrons d’abord que les personnages et aventures de Manon Lescaut soulèvent en effet des questions morales.

Nous nous intéresserons toutefois ensuite aux limites d’une lecture absolument didactique du texte.

Enfin, nous nous interrogerons sur le primat du plaisir romanesque sur toute perspective morale dans le récit. [Première partie] [Thèse] Les personnages et les aventures de Manon Lescaut soulèvent souvent des questions morales. [Première sous-partie] [Idée directrice & Argument] Le roman favorise en effet dans une certaine mesure l’édification du lecteur grâce au plaisir de la fiction, d’abord parce que l’abbé Prévost, observateur de son temps, dresse un tableau réaliste des vices de son époque, qu’il met en lumière, tel un moraliste.

[Exemples analysés] La ville corrompue, les maisons de jeu, les riches libidineux légitimés par le pouvoir en raison de leur fortune sont mis en scène sans complaisance.

Manon Lescaut décrit le Paris de la Régence, qui trouve souvent son plaisir dans des divertissements impudiques et immoraux.

Les personnages principaux eux-mêmes n’échappent pas, d’une certaine façon, à des comportements que d’aucuns jugeront répréhensibles.

Des Grieux triche au jeu, se compromet avec des associés malhonnêtes, vole et commet un assassinat.

Manon vend quant à elle ses charmes et dupe de riches prétendants sans honte ni regret. [Deuxième sous-partie] [Idée directrice & Argument] Par contraste, certains personnages importants du récit expriment une réelle sagesse et présentent des conceptions morales qui incitent à réfléchir aux actes des protagonistes. [Exemples analysés] Tiberge juge les aventures de son ami des Grieux dans une perspective théologique et l’invite, de même que le lecteur, à réfléchir au bonheur, à la vertu et au libre-arbitre.

Double de son ami, il incarne une existence pieuse et sage à laquelle des Grieux semblait voué sans la rencontre de Manon et la fatale passion qui l’accompagne.

Les controverses morales des deux hommes trouvent un écho dans les conversations que le personnage principal a avec son père ou le Supérieur de Saint-Lazare.

Ces débats entre LIRE LES CLASSIQUES Prévost, Manon Lescaut © Bordas / SEJER, 2022 – ISBN 978-2-04733910-7 1 raison et passion sont racontés avec la vision subjective de des Grieux mais invitent le lecteur à réfléchir, sans dogmatisme, aux questions morales soulevées par le récit. [Troisième sous-partie] [Idée directrice & Argument] Le projet affiché par le roman de se faire « traité de morale, réduit agréablement en exercice » par « l’exemple » des personnages dont les aventures servent à l’« instruction » du lecteur (« Avis de l’auteur »), trouve un écho dans le fait que toute entrave à la loi et tout manquement à la morale sont sévèrement condamnés dans le récit, si bien que les aventures des protagonistes suscitent la crainte et la pitié du lecteur.

[Exemples analysés] L’incarcération, la déportation et la marginalité des protagonistes scandent leurs aventures et apparaissent comme des châtiments qui s’abattent inlassablement sur eux.

Des Grieux, narrateur de ses propres aventures de manière rétrospective, fait de son récit une confession et reconnaît des propres fautes morales pour susciter la terreur mais aussi la compassion chez son auditoire : « Je veux vous apprendre, explique-t-il, non seulement mes malheurs et mes peines, mais encore mes désordres et mes plus honteuses faiblesses ».

Et le personnage d’ajouter : « Je suis sûr qu’en me condamnant, vous ne pourrez pas vous empêcher de me plaindre.

» Mais en plaignant le personnage, on éprouve aussi de la sympathie pour le marginal. [Deuxième partie] [Thèse] Une lecture morale et didactique du récit présente donc de réelles limites. [Première sous-partie] [Idée directrice & Argument] Le roman met en scène des aventures divertissantes, dans lesquelles la voix de la sagesse est rarement écoutée, tant la passion l’emporte sur la raison, pour le plus grand plaisir du lecteur.

[Exemples analysés] L’opposition de des Grieux aux discours de l’autorité du père, de la religion, de son ami Tiberge et de la voix intérieure de sa raison l’amène à braver les interdits qui l’empêchent de vivre sa passion et le conduit hors des sentiers battus, vers des aventures spectaculaires et riches en rebondissements.

Les châtiments subis par.... »