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Sociolinguistique

Publié le 06/04/2022

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III- Quelques concepts fondamentaux de la sociolinguistique: III-1- Dialecte vs variété : Initialement et fondamentalement, les variétés d’origine géographique sont connues sous le nom de dialectes. Ce mot est employé en linguistique en ce sens dans des termes comme dialectologie et géographie dialectale ; c’est aussi en ce sens que l’utilisent les sociologues du langage. Couramment cependant, les dialectes peuvent représenter, signifier ou symboliser des éléments non géographiques. Ainsi, si les immigrants d’un pays A forment dans un pays B une minorité importante de pauvres, de misérables et d’analphabètes, leur variété linguistique, -le dialecte A- signifiera, aux yeux de la population B, beaucoup plus que « la langue d’une région déterminée ». Le dialecte A deviendra le symbole d’une position sociale inférieure, - sur les plans de l’instruction et de la profession- à celle que représente le dialecte B. Ce qui constituait une variété régionale à l’origine devient ainsi une variété sociale ou un sociolecte4 . Ensuite, si les locuteurs de la variété A n’ont pas accès au réseau d’interactions du groupe B, s’ils commencent à se marier entre eux, s’ils restent fidèles à leurs coutumes régionales et s’ils continuent à ne rechercher que la compagnie de leurs compatriotes, ils peuvent, avec le temps, être considérés comme une communauté séparée, avec ses propres aspirations, ses croyances religieuses et ses traditions. De tout cela peut découler que la variété A ne sera plus désormais considérée comme une variété sociale, mais comme une variété ethnique ou religieuse ; bien plus, la variété peut être cultivée à un point tel qu’elle sera considérée 4 Parler d'un groupe social (à l'exception des usages liés à la zone géographique : dialecte). Syn. idiolecte. 6 comme une « langue à part ». Cependant, dans la communauté A, il peut y avoir quelques locuteurs qui ont appris la variété B. Dans ce cas, ils utilisent la variété A dans leur propre communauté, pour des conversations plus intimes ou par solidarité avec le groupe, mais ils peuvent employer la variété B avec les « étrangers », dans un but professionnel ou par politesse. Pour de tels individus, A et B sont des variétés fonctionnelles contrastantes et complémentaires, comme si B était une sorte de variété spécialisée ou professionnelle. Ainsi, le terme « variété » - contrairement au terme « dialecte » - ne désigne pas une position linguistique particulière, mais uniquement certaines différences par rapport à d’autres variétés. Un dialecte doit être une sous-unité régionale d’une langue, surtout dans sa forme parlée populaire. Le mot « langue » possède une signification supérieure, le mot « dialecte » une signification subalterne. III- 2- Langue nationale : C’est une langue officielle à l'intérieur d'un état (avec la possibilité qu'il y en ait plusieurs, comme en Belgique ou en Suisse). Établie de façon généralement assez tardive, et due à la suprématie d'un parler local, elle est imposée par l'organisation administrative (c'est d'elle dont on se sert dans les rapports avec l'État) et par la vie culturelle (c'est elle qui est enseignée, et souvent elle est seule à avoir donné lieu à une littérature : certains dialectes sont même difficiles à écrire, faute de conventions orthographiques). Il n'est pas rare que la langue soit utilisée par le pouvoir comme instrument politique (la lutte contre les dialectes fait partie d'une politique centralisatrice, et le nationalisme s'accompagne souvent de tentatives pour « épurer » la langue des contaminations étrangères (cf. les efforts des nazis pour extraire de l'allemand les mots empruntés). A l’intérieur d'une même langue, les variations sont également importantes, synchroniquement parlant : pour les niveaux de langue, on parle de langue familière, soutenue, technique, savante, populaire, propre à certaines classes sociales, à certains sousgroupes (famille, groupes professionnels); dans cette catégorie, on place les différents types d’argots et de jargons; pour les variations géographiques, on parle de dialectes et de patois. Pris communément pour la modalité première et naturelle d’une langue, le statut de langue nationale ou standard est en réalité le résultat artificiel d’un long processus interventionniste 7 de normalisation5 , elle fonctionne ainsi comme norme de référence. Sur un plan plus symbolique, une langue standard remplit trois autres fonctions qui sont l’unification sous sa bannière d’un ensemble de domaines dialectaux, la séparation identificatrice par rapport aux sociétés voisines et la fonction de prestige qu’elle confère à la communauté qui s’en sert. On constate qu'au sein d'une communauté linguistique donnée tous les membres de cette communauté (tous les locuteurs du français par exemple) produisent des énoncés qui, en dépit des variations individuelles, leur permettent de communiquer et de se comprendre, et qui reposent sur un même système de règles et de relations qu'il est possible de décrire. C’est à ce système abstrait, sous-jacent à tout acte de parole, qu'on a donne le nom de langue. III-3-Jargon : On entend par là les modifications qu'un groupe socioprofessionnel apporte à la langue nationale (surtout au lexique et à la prononciation), sans qu'il soit toujours possible de distinguer ce qui, dans ces modifications, est lié : - à la nature particulière des choses dites; - à une volonté de ne pas être compris; - au désir du groupe de marquer son originalité (à la différence du dialecte, le jargon se présente donc comme un écart par rapport à la langue nationale). Il y a un jargon des linguistes, des notaires, des alpinistes, etc. Par extension, jargon est employé pour désigner soit une langue dont on juge qu'elle est déformée, ou incorrecte, ou incompréhensible. On parle ainsi de jargon franglais (français, déformé par de nombreux anglicismes)… III-4-Argot : Un dialecte social réduit au lexique, de caractère parasite employé dans une couche déterminée de la société qui se veut en opposition avec les autres ; il a pour but de n’être compris que des initiés ou de marquer l'appartenance à un certain groupe. L'argot proprement dit a été d’abord celui des malfaiteurs : 5 En terminologie, on parlera de normalisation pour évoquer le processus par lequel un organisme doté d’autorité administrative définit une notion, et recommande ou impose un terme pour la designer. L'acceptabilité terminologique d’un terme (ou pondération) s'exprime selon une échelle sur laquelle l’accord tend à se faire entre spécialistes. On distingue généralement terme commandé (ou privilégié), terme toléré, en particulier dans le cas de synonymie avec un terme recommandé, ou dans le cas d’absence d’un terme existant plus satisfaisant, terme rejeté, lorsqu’un organisme faisant autorité l’a condamne. Enfin, on parlera de terme désuet pour le terme sorti d'usage. 8 - Jobelin : Argot des gueux et des maquignons, au XVe s. - Narquin : Narquois : moqueur, malicieux, rusé… - Jargon de bandes de voleurs de grands chemins. Il s'est développé d’autres argots dans certaines professions (marchands ambulants) ou dans certains groupes (armée, prisonniers…). Tous ces argots ont en commun entre eux et parfois avec la langue populaire un certain nombre de procédés de formation ; - La troncation : On appelle troncation ou apocope un procédé courant d’abréviation consistant à supprimer les syllabes finales d’un mot polysyllabique ; les syllabes supprimées peuvent correspondre à un morphème dans une radio (radiographie), une dactylo (dactylographe), mais les coupures se produisent le plus souvent arbitrairement après la deuxième syllabe : vélo (vélocipède), frigo (frigorifique). Dans la langue populaire, la troncation s’accompagne parfois de l’addition de la voyelle -o : un prolo (prolétaire), un apéro (apéritif). - L’interversion de sons ou de syllabes : On dit qu’il y a interversion lorsque deux phonèmes contigus changent de place dans la chaîne parlée (ex. : aéropage pour aréopage, aréoplane pour aéroplane). Dans ce cas, on parle du verlan et du javanais :  Verlan : Argot conventionnel consistant à inverser les syllabes de certains mots (ex. laisse béton pour laisse tomber, tromé (métro), ripou (pourri), et, avec altération, meuf pour femme).  Javanais : Argot conventionnel consistant à intercaler dans les mots les syllabes va ou av (ex. grosse « gravosse »). L'argot peut être considéré comme un cas particulier de jargon ; c'est un jargon qui se présente lui-même comme signe d'une situation sociale - non seulement particulière - mais marginale. IV- Bourdieu et le marché linguistique :

« ‫كلية اآلداب والعلوم اإلنسانية‬ ⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜ ⵜ ⵜⵜⵜⵜⵜ ⵜ ⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜ ⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜⵜ Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Filière Etudes Françaises Sociolinguistique Semestre 6 Pr.

Rachid Baalla Le Programme I- Introduction à la sociolinguistique II- L’objet d’étude de la sociolinguistique III- Quelques concepts fondamentaux de la sociolinguistique IV- Bourdieu et le marché linguistique V- Mélanges de langues; code-mixing VI- Diglossie Vs Bilinguisme La bibliographie :  Bulot, Thierry, Blanchet, Philippe, Dynamiques de la langue française au 21ème siècle : Une introduction à la sociolinguistique, Édition des archives contemporaine, Armand, Paris, 2011.  Dortier, Jean-François, Le dictionnaire des sciences sociales, Éd.

Sciences Humaines, Auxerre, 2013.  Dubois.

J et autres, Dictionnaire de linguistique, Larousse, Paris, 1973.  Ducrot, Oswald & Todorov, Tzvetan, Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage, Coll.

Anthropologie, Sciences Humaines, Éd.

Seuil, Paris, 1972.  Fishman, Joshua A, Sociolinguistique, Coll.

Langues et Culture, Éd.

Nathan, Paris & Labor, Bruxelles, 1971.  Moreau, Marie-Louise, Sociolinguistique: concepts de base, Éd.

Mardaga, Bruxelles, 1997. 1. »

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