Que peut la littérature lorsqu'elle se mêle de politique ?
Publié le 30/09/2023
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Introduction
« Longtemps j'ai pris ma plume pour une épée, à présent je connais notre impuissance », écrit JeanPaul Sartre à la fin de son autobiographie, Les Mots (1964), exprimant ainsi, à la suite d'autres
écrivains qui l'ont précédé, un certain désenchantement quant au pouvoir politique que pourrait
détenir la littérature.
Pourtant, les menaces de mort, les persécutions qu'ont subies et subissent de
nombreux écrivains à travers le monde, de Rabelais à Salman Rushdie, en passant par Olympe de
Gouges et Voltaire, par exemple, suffisent à témoigner du fait que la littérature dérange.
Que peut
alors la littérature lorsqu'elle se mêle de politique ?
Nombre d'écrivains ont envisagé la littérature comme une arme leur permettant de façonner les
hommes et la société.
Toutefois, les défaites de la démocratie et le non-respect des droits humains
ont montré que la littérature pouvait se révéler impuissante.
De ce fait, peut-être faut-il plutôt
percevoir la littérature comme un bouclier : un contre-pouvoir.
Prendre sa plume comme une épée
Affûter l'esprit : éduquer
La philosophie et la littérature se sont longtemps proposé d'éduquer les princes appelés à gouverner
un peuple, notamment grâce aux « miroirs des princes », le genre du « miroir » (sorte de manuel
moral et politique) étant apparu dès le Moyen Âge.
C'est de cette tradition que semble hériter La
Fontaine lorsqu'il dédie ses Fables au Dauphin de France : « L'apparence en est puérile, je le confesse
; mais ces puérilités servent d'enveloppe à des vérités importantes.
» Ainsi les différentes fables qui
composent son recueil abordent-elles des thèmes moraux et politiques qui doivent permettre au
jeune Dauphin d'affûter son esprit afin de gouverner avec justice et justesse.
Pourfendre préjugés et dogmatismes
La littérature sert aussi d'arme lorsqu'elle est utilisée pour pourfendre préjugés et dogmatismes,
comme le firent les écrivains des Lumières et, parmi eux, tout particulièrement Voltaire.
Dans ses
contes philosophiques, ses héros enseignent aux lecteurs une nouvelle façon de percevoir le monde
et donc d'y prendre place.
Le sage Zadig, par exemple, héros éponyme du conte de 1748, juge de
toutes choses avec raison et discernement, comme lorsqu'il devient Premier ministre au chapitre vi.
Face à ce personnage mesuré et rationnel, la critique des dogmatismes et fanatismes apparaît
d'autant plus véhémente, comme dans le chapitre xii, intitulé « Le souper », où éclate une dispute
entre croyants de différentes confessions à laquelle Zadig met fin dans un esprit de tolérance.
La littérature peut ainsi être utilisée comme une arme destinée à lutter contre les despotismes et
dogmatismes.
Néanmoins, face à la violence humaine, elle se révèle parfois impuissante.
Aveu d'impuissance de la littérature ?
Désenchantement et refus de l'engagement : le divorce entre littérature et politique
En France, l'histoire politique mouvementée du xixe siècle a suscité à la fois beaucoup d'espoirs et de
désillusions, allant jusqu'au désenchantement.
L'amertume de Gérard de Nerval est par exemple
patente après l'échec de la révolution de juillet 1830, à la suite de laquelle est instituée une
monarchie constitutionnelle et non une république.
Dans son poème « En avant, marche ! », la
politique est décrite comme « une vieille hideuse », une « prostituée / De tous les trônes absolus »,
et la liberté comme une chimère.
Théophile Gautier, quant à lui, déjà perçu comme le chef de file de
« l'art pour l'art », décide de fermer définitivement ses fenêtres à la politique après la révolution de
1848 et le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte, comme il l'écrit dans la préface de son recueil
Émaux et Camées (1852) : « Sans prendre garde à l'ouragan / Qui fouettait mes vitres fermées, / Moi,
j'ai fait Émaux et Camées ».
Des textes restés lettre morte ?
De fait, il semble que la littérature ait un bien mince pouvoir politique, comme le manifeste l'histoire
de....
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