Databac

puis le petit.

Publié le 08/12/2021

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : puis le petit.. Ce document contient 2519 mots. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système d’échange gratuit de ressources numériques ou achetez-le pour la modique somme d’un euro symbolique. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en : Dictionnaire
puis le petit. Le roi reçoit dans son bain, le roi reçoit sur sa chaise percée. Tout ce qui touche le roi n'est-il pas si
important ? Jusqu'à ses maladies. Il en a sans cesse, c'est la loi du temps. L'une d'entre elles est restée célèbre :
une fistule anale qui le fait fort souffrir. On est en 1686. Ses chirurgiens décident de l'opérer, entreprise hardie. De
nombreux essais sont faits sur des cobayes que l'on va chercher dans les hospices. L'opération est tentée. La foule
retient son souffle et prie dans les églises. Elle est couronnée de succès. Dès que la nouvelle est assurée, on fait
chanter un Te Deum. Ne l'oublions pas : c'est aussi ça l'absolutisme à la Louis XIV, un régime dans lequel on fait
chanter la messe pour célébrer le retour à la santé d'un trou du cul.
Grandeurs et misères de la Cour
Que pouvait-il se passer dans la tête d'un homme trouvant normal de prendre son bouillon, de faire trois pas, ou
de lâcher un vent devant des centaines de spectateurs ? Que pouvait-il bien se passer, pourrait-on se demander
tout autant, dans la tête de ceux qui venaient le regarder et prenaient pour un honneur insigne le fait d'avoir le
droit de lui passer sa cuillère ou de ramasser sa canne ? Voilà encore un point étonnant de l'affaire. On l'a dit déjà,
du point de vue du monarque, la mise en cage de la noblesse, derrière les barreaux dorés et grotesques de la vie
de cour, est un coup de génie. Pour être sûr que plus aucun grand du royaume ne complote dans son coin, comme
aux temps féodaux, ou ne manigance contre la Couronne comme sous la très récente Fronde, le monarque a
organisé ce grand zoo où il les fait tous manger dans sa main. Malheur à ceux qui n'y viennent pas : un tel, qui se
refuse à sortir de sa lointaine province, fait demander une place, une faveur. « Je ne le vois jamais », dit le roi.
Adieu la faveur !
Toute la noblesse est ainsi réduite à l'état d'animaux de compagnie. Elle est partout où Il est, au Louvre ou à SaintGermain, puis à Versailles, ce petit pavillon de chasse de Louis XIII où le fils a décidé de faire bâtir le plus beau
château du monde, et où l'on emménage en 1682, alors que tout est encore en chantier. La vie dans ce château
fait sans doute encore rêver 80 % des habitants de la planète entière : être marquise ou duc à la cour de Versailles,
cela représente partout au monde l'idée du luxe, de la grandeur, du chic. Si ces gens savaient combien devait être
pesante la vie dans cet univers confiné, sans confort, au rituel toujours répété, la chasse, les jeux, les jeux, la
chasse et les commérages, les médisances, la promiscuité et les broutilles qui deviennent des affaires d'État !
Tout est code à Versailles. Pour les ambassadeurs, on ouvre les portes à un ou deux battants selon l'importance
que l'on accorde aux relations avec tel ou tel pays. Pour les courtisans, les signes sont tout autant cryptés : pour
signifier son contentement, le roi invite celui-ci à aller à la chasse, ou celui-là à venir nourrir avec lui les animaux de
la ménagerie. Et selon qu'il parle à tel ou tel autre à voix un peu plus haute, ou un plus basse, tous les autres se
perdent en commentaires qui peuvent durer la semaine.
Certains, les plus grands, les plus riches, obtiennent le droit de se faire construire des hôtels particuliers à
Versailles, mais hors du château : ouf, ça leur permet au moins de souffler une nuit de temps en temps. L'immense
majorité est logée dans des réduits miteux, sans le moindre confort, et tout le monde se retrouve dès le matin les
uns sur les autres, à commenter des riens, à caqueter autour d'un rituel d'un grotesque total, à se monter la tête
parce que tel prince plutôt que tel autre a obtenu l'insigne privilège, la veille au soir, de tenir le bougeoir au
coucher ou de passer au roi sa robe de nuit. Et tous, princes et ducs, comtes et marquis, qui se croyaient depuis
des générations l'élite du royaume, ont accepté le jeu et ont fait semblant de prendre cette vie de laquais pour le
plus grand des honneurs. Misère de la vanité humaine !
1

Louis XIV et vingt millions de Français, « Pluriel », Hachette, 1998.

2

La France de la monarchie absolue 1610-1715, recueil d'articles de L'Histoire, « Points », Le Seuil, 1997.

23
Des taches
sur le soleil
Tempérons ce que nous avons écrit au chapitre précédent : l'histoire populaire est souvent confite en dévotion
pour la personne de Louis XIV et les fastes de Versailles. Rares sont les livres qui n'admettent pas que, pour le
reste, la France de ce temps a aussi connu ses zones d'ombre. La circonspection à l'égard du règne a d'ailleurs
commencé fort tôt. Louis a laissé derrière lui un royaume ruiné par les dépenses somptuaires, le train de vie, les
constructions prestigieuses, les guerres. En 1715, la dette royale représente trois fois le revenu. Le vieux monarque
meurt dans son château transformé en sombre tombeau, haï par ses sujets et détesté par l'Europe qui voit en lui
un nouveau Nabuchodonosor, l'odieux tyran de la Bible.
Depuis bien longtemps, les manuels scolaires ont tenu eux aussi à rappeler la face obscure de la période : d'accord,
Louis a porté haut la gloire de la France, mais au prix de combien d'erreurs humaines ? L'école républicaine ne
pouvait pas s'abaisser à donner quitus, pour la postérité, à un roi. Il semble pourtant que le grand public, à qui l'on
s'adresse, ait oublié la leçon. Dans la mémoire collective, Louis XIV, c'est toujours le grand genre, la perruque, la
galerie des Glaces et rien d'autre. Tâchons donc à notre tour de la rafraîchir. Classiquement, dans la colonne où on
tient le compte des aspects négatifs du Grand Siècle, on trouve trois sous-chapitres.
Repères
- 1661 : « famine de l'avènement »
- 1667 : prise de Lille
- 1678 : traité de Nimègue, la Franche-Comté française
- 1681 : annexion de Strasbourg
- 1685 : révocation de l'édit de Nantes
- 1689 : sac du Palatinat
- 1692 : très grande famine
- 1709 : « grand hyver »

La révocation de l'édit de Nantes
Le premier est le plus connu. Il porte le nom de la mesure administrative qui en est le symbole : la « révocation de
l'édit de Nantes » (1685). Il est bien autre chose : un véritable « crime d'État », selon le mot de l'historienne Janine
Garrisson1. Il s'agit de la politique royale à l'égard des protestants. Dès les années 1670-1680, Louis XIV veut en
finir avec eux. Le royaume en compte encore environ un million. Représentent-ils une menace ? On en doute.
Richelieu a retiré au « parti huguenot » toutes ses places fortes et tous ses canons, les protestants n'ont plus pour
eux que le droit d'aller au temple, quand il existe, et de pratiquer leur culte, et encore, pas partout. Au temps du
catholicisme triomphant et de l'absolutisme, c'est encore trop. Le roi demande donc que tous les efforts soient
faits pour pousser les sectateurs de la « religion prétendue réformée », comme on l'appelle avec mépris, à rentrer
sagement dans le saint giron de l'Église romaine. Les méthodes employées pour y parvenir soulèvent le coeur.
On commence par mettre en place des mesures discriminatoires : interdiction des enterrements de jour,
interdiction pour un catholique d'épouser une huguenote, interdiction pour un patron protestant de prendre des
apprentis catholiques, etc. Partout où l'on peut, on trouve tous les prétextes pour abattre les temples. On pose
que dès sept ans un enfant peut choisir le culte qu'il préfère, et naturellement on ne néglige aucune rouerie pour
séduire et câliner les rejetons de parpaillots afin de leur faire préférer la Vérité à l'Erreur : en clair, les arracher à
leurs parents pour les placer dans des écoles catholiques. La technique de conversion la plus barbare a laissé un
nom célèbre et terrible : la dragonnade. On envoie dans une ville les dragons du roi, c'est-à-dire les soldats,
on les fait loger chez les huguenots en leur donnant toute licence de comportement et on prévient les
propriétaires infortunés qu'une seule chose pourra mettre fin à cet état de fait : leur promesse d'abjuration. Toute
licence à un dragon : cela commence par la dévastation totale du logis, cela va jusqu'au viol de la fille sous les
yeux des parents ou à la torture des vieillards. Nombreux sont ceux qui abjurent, au moins pour l'apparence. Qui
peut résister à de telles méthodes ? Confiant dans les rapports qu'on lui remet, le roi est bientôt persuadé que le
travail est fait et que l'hérésie est enfin extirpée : en 1685, il révoque le célèbre édit de tolérance qui avait fait la
gloire de son grand-père Henri IV. Les rapports étaient faux, d'innombrables Français restaient fidèles à la foi de
Calvin. Alors qu'on leur interdit l'exil, plus de 200 000 d'entre eux fuient ce royaume maudit par tous les chemins
cachés qu'ils trouvent pour aller vers « les pays du Refuge », là où l'on veut bien d'eux, à Berlin, en Angleterre,
dans les Provinces-Unies (les actuels Pays-Bas), ou même en Afrique du Sud. C'est une catastrophe économique :
ces gens étaient artisans, boutiquiers, avocats, ils emportent avec eux leur savoir et leur force de travail. Ceux qui

sont pris sont envoyés dans l'enfer des galères. Malgré cela, interdits de tout et fidèles à leur foi, de nombreux
protestants se cachent mais n'abdiquent pas. Principalement dans le Sud du royaume, le Languedoc, le Massif
central, ils se retrouvent pour célébrer le culte dans les endroits isolés, grottes, forêts, maquis : ce sont les
« assemblées du désert ». Au début du xviiie siècle, dans les Cévennes, excédés par les persécutions, certains
prennent les armes. Ce sont les camisards, ainsi nommés à cause de la chemise qu'ils portent. Ils sont quelques
milliers. Ils réussiront à tenir en échec pendant deux ans (1702-1704) plus de 25 000 soldats.
La guerre, toujours la guerre
Le deuxième aspect négatif du Grand Siècle tient à une des conséquences de l'appétit de gloire du monarque, son
goût immodéré de la conquête. Si l'on en croit Voltaire, Louis XIV l'avouera lui-même sur son lit de mort : « J'ai
trop aimé la guerre... » Il l'aura faite durant trente-deux années sur cinquante-quatre de règne. Aux Espagnols, en
Italie, dans le Saint Empire, aux Hollandais, aux Anglais, à presque tout le monde enfin et sans parti pris, si l'on ose
dire, sinon celui de son propre intérêt : il n'hésitera jamais à s'allier à l'ennemi de la veille pour mieux contrer celui
du jour. On voit passer dans les livres ces successions de conflits, avec leurs noms curieux - comme « la guerre de
Dévolution » (menée contre l'Espagne) - ou plus simples - « la guerre de Hollande », qui vise à ravager ce petit
pays -, toujours suivis de successions de traités (Aix-la-Chapelle, 1668 ; Nimègue, 1678 ; Ryswick, 1697 ; Utrecht,
1713) dans lesquels on se perd toujours. Oublions-en l'énumération fastidieuse et ne cherchons pas à analyser les
motifs officiels de ces campagnes incessantes. En réalité, il n'y en a qu'un : l'insatiable volonté de puissance d'un
roi.
En ce milieu de xviie siècle, le Saint Empire romain germanique, ruiné par la monstrueuse guerre de Trente Ans,
est toujours à terre ; l'Espagne a vu se tarir l'or des Amériques, sur lequel elle avait imprudemment fondé toute sa
puissance au siècle précédent ; l'Angleterre se perd dans des querelles intérieures. La France est le pays le plus
puissant du continent. Louis en est le maître. Quand il veut la guerre, il fait la guerre et ne s'embarrasse d'aucun
prétexte compliqué. Il demande à ses légistes et à ses diplomates d'en trouver un, c'est leur rôle. Une fois, on
ressort une dette soi-disant non réglée issue du traité scellé lors de son mariage avec Marie-Thérèse, la fille du roi
d'Espagne. Et hop ! Guerre de Dévolution contre les Espagnols qui tiennent les Flandres. Les Hollandais ont-ils le
front de protester ? Un peu plus tard, on va châtier les « marchands de fromage », sans même leur déclarer la
guerre. Le roi possède une partie de l'Alsace mais il lui manque Strasbourg, quel dommage ! Il ordonne donc qu'on
en fasse le siège et, au grand scandale de l'Europe, il enlève la ville sans autre motif que celui de satisfaire son bon
plaisir.
L'histoire nationale a beaucoup fermé les yeux sur ce genre de pratique, puisqu'elle allait dans le sens du bien
indépassable : l'agrandissement du territoire. Artois, Roussillon, Sud de la Flandre, Franche-Comté, essentiel de
l'Alsace : c'est indéniable, sous Louis XIV, la France a pris de l'ampleur. À quel coût ?
Toutes ces batailles dont on n'a en général pour seule représentation que les pesants tableaux qu'en ont donnés
les peintres officiels, qui nous en dépeindra la sombre réalité humaine ? Au gré d'un livre ou d'un autre, on
apprend que telle attaque s'est soldée par « de nombreuses pertes », que tel siège a été long. C'est à peu près
tout. D'innombrables témoignages nous donnent une idée des souffrances endurées par les « grognards » lors des
campagnes de Napoléon. Nous avons tous en tête l'horreur de la vie dans les tranchées de la guerre de 14-18. Et si
peu pour celles du xviie. C'est dommage. On ne sait même pas pourquoi tous ces soldats acceptaient d'affronter
le danger, le canon, le froid, la peur. Pour la patrie ? Ce n'est pas encore l'époque. Pour le roi ? C'est douteux. Les
chefs eux-mêmes sont si incertains : après la Fronde et avant d'obtenir son pardon et de servir à nouveau
Louis XIV, le grand Condé a servi le roi d'Espagne avec tout autant de panache et de vaillance. Lors de la bataille
des Dunes, près de Dunkerque, il a même combattu face à Turenne, l'autre grand chef militaire de l'époque, ce qui
ne l'empêchera pas de combattre à côté de lui un peu plus tard. Et encore, les maréchaux peuvent espérer de la
guerre leur moisson de gloire, mais le fantassin ? La misère au village devait être bien grande pour qu'une mince
solde ou la perspective de se payer en pillage en cas de victoire suffise à ce que l'on engage jusqu'à sa vie.
On connaît mieux une autre conséquence, pourtant bien oubliée, des conquêtes du Grand Roi : la profonde
résistance qu'elles ont pu susciter chez ceux qui en furent victimes. Le prisme national nous a appris à ne pas trop
nous attarder sur ce genre de détail gênant de la formation de notre pays. Patriotes naïfs, nous voulons toujours
croire que partout où ils arrivent, les Français sont accueillis avec des petits drapeaux et des cris de joie : les
populations ne sont-elles pas si fières, par principe, d'être soudain rattachées au plus beau pays du monde ? Eh
bien non ! Il faudra des décennies pour mater l'héroïque résistance antifrançaise des Francs-Comtois. Lille voit elle
aussi l'annexion comme une catastrophe : elle prive la ville de son commerce naturel avec les riches cités des PaysBas, Bruxelles ou Gand. La lutte des Lillois contre les Français sera farouche. Il faudra d'autres occupants un peu
plus tard pour que la région change de position : au tout début du xviiie siècle, les Hollandais conquièrent
brièvement la ville et font l'erreur de vouloir convertir la population au calvinisme. Les Français qui reviennent
après 1713 semblent finalement préférables, mais ils ne sont qu'un pis-aller, on l'a compris.

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles