Databac

preface

Publié le 06/12/2021

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : preface . Ce document contient 805 mots. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système d’échange gratuit de ressources numériques ou achetez-le pour la modique somme d’un euro symbolique. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en : Echange

Préface

ANTIGONE de JEAN ANOUILH a été présentée pour la première fois le 4 février
1944, au Théâtre de
l'Atelier à Paris, dans la mise en scène d'André Barsacq avec Monelle
Valentin dans le rôle du
personnage principal. Les acteurs étaient en costume de soirée: «Le roi et
tous les membres de la famille
royale portaient le frac, et les gardes le smoking, sur lequel ils avaient
passé un ciré de couleur noire« (A.
Barsacq). Le décor était, comme proposé par l'auteur, purement fonctionnel,
sans fixation à une époque
déterminée. Outre un caractère provocateur, la présence de ces
«anachronismes« serviraient - et servirent -
à créer une certaine complicité avec le spectateur d'aujourd'hui et à
montrer par cette modernisation du
mythe que les héros mythiques sont de tous les temps.

L'inspiration mythologique est une donnée fondamentale du théâtre français
de la première moitié du XXe
siècle (1927 Cocteau, «Orphée«, 1932 Gide, «Oedipe«, 1934 Cocteau, «La
Machine infernale«, 1935
Giraudoux, «La Guerre de Troie n'aura pas lieu«, 1937 Giraudoux, «Électre«,
Cocteau, «Oedipe roi«,
1943 Sartre, «Les Mouches«, 1944 Anouilh, «Antigone«, 1946 Gide, «Thésée«,
Anouilh, «Médée«). Dans
l'atmosphère d'inquiétude des années trente, où le monde apparaît de plus
en plus plongé dans l'absurdité
et dans la détresse, le mythe, désacralisé et réactualisé, véhiculait des
questions brûlantes. Le héros
antique, prisonnier de son destin, faisait tristement écho à l'individu du
XXe siècle, menacé par la guerre
et la montée des périls.
Depuis sa première présentation aux Athéniens en 441 av. J.-C. sur les
flancs de l'Acropole, le sujet
d'Antigone a joui d'une popularité extraordinaire. C'est cette «Antigone«
de Sophocle, «lue et relue et que
je connaissais depuis toujours«, qu'Anouilh a décidé de réécrire, à sa
façon, sous la forme d'une tragédie
moderne qui, si elle reste parfois fidèle au modèle, est avant tout une
création originale de l'auteur.
Dans les deux pièces, l'histoire est la même: Antigone, en dépit de
l'interdiction de Créon, a rendu les
honneurs funèbres à son frère Polynice. Cette désobéissance lui vaudra la
mort. Le déroulement de
l'action et son dénouement sont également semblables, et les principaux
personnages - même si leur
signification dans la tragédie d'Anouilh est totalement différente - ont
été conservés. Il a supprimé, par
contre, le personnage de Tirésias, vieux devin aveugle qui, dans la
tragédie grecque, représentait la voix
des dieux et qui n'aurait guère eu de sens dans une pièce où la religion
est niée et le mythe désacralisé.
Mais c'est dans la signification du face-à-face symbolique entre Antigone
et Créon que se situe la
différence majeure entre les deux oeuvres. L'opposition entre la loi des
hommes et la loi des dieux est
devenue opposition entre la Raison d'État et la Rébellion. Ce qui était,
chez Sophocle, un conflit entre le
plan humain - l'orgueil des hommes, leur démesure - et le plan divin n'est
ici que l'affrontement de deux
êtres désabusés. L'Antigone grecque se sacrifiait pour la justice, celle
d'Anouilh «ne sait plus pourquoi
elle meurt«.

Après le succès de l'«Antigone« d'Anouilh, à leur tour de rôle,
l'«Antigone« de Garnier, celle de Cocteau
et puis la tragédie de Brecht, sortirent de l'ombre. En 1968, on fit monter
Antigone sur scène en blue jean
et contester l'autorité de l'État et les structures universitaires
répressives. Pour elle, les professeurs étaient
«une bande de Créons«. En 1972, une « Antigone« de Mikis Theodorakis fut
présentée au festival
d'Avignon, et vers la fin des années quatre-vingt, deux théâtres parisiens
ont ajouté de nouvelles variantes
à la gamme des représentations de la pièce d'Anouilh.
Comment s'explique la popularité durable du thème sophocléen? D'abord par
la multitude des approches
possibles: Antigone revendiquant les libertés et les droits de l'individu
contre les nécessités de la Raison
d'État; l'opposition entre une jeunesse intransigeante et l'âge mûr tendant
vers le compromis réaliste; la
quête de l'absolu et le contentement d'un bonheur modeste; le conflit de
générations etc. Puis, le succès
résulte certainement de la personnalité chatoyante de la protagoniste elle-
même: Antigone est passée pour
l'image accomplie de la vertu féminine, on l'a faite le porte-parole des
faibles et persécutés, pour d'autres,
elle n'était qu'une fille excessive et capricieuse; elle était
républicaine, révolutionnaire et anarchiste; le
personnage d'Antigone n'a jamais perdu son attrait et sa fascination. Sa
tragédie est toujours actuelle.

Liens utiles