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perversion

Publié le 06/12/2021

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perversion n.f. (angl. Perversion; allem. Perversion). Expérience d'une passion humaine où le désir supporte l'idéal d'un objet inanimé.

La perversion n'est pas simple aber­ration de la conjonction sexuelle par rapport aux critères sociaux établis. Elle met en oeuvre le primat du phallus en réalisant une fixation de la jouis­sance sur un objet imaginaire — sou­vent erratique — en lieu et place de la fonction phallique symbolique qui organise le désir sous le coup de la castration et du manque.

La perversion isole bien la fonction de l'objet dans son rapport au com­plexe de castration en tant que cet objet s'énonce comme cause qui dicte la dia­lectique du désir chez le névrosé. S. Freud notait «que la prédisposition aux perversions était la prédisposition originelle et universelle de la pulsion


sexuelle« (Trois Essais sur la théorie sexuelle, 1905). Cette proximité est la raison de la difficulté à scinder distinc­tement la spécificité de la perversion dans sa généralité.

LA PERVERSION DANS SON CONTEXTE

MORAL

Car le terme, fort ancien, de perversion, signifiant « renversement «, suggère d'emblée la notion d'une norme morale ou de la nature, dont le pervers s'écarte­rait. On se souvient que, très tôt, l'Église avait relégué la sexualité à la stricte finalité de la reproduction.

Une telle appréciation ne tient évi­demment pas compte de la dimension véritable du désir sexuel, qui, soumis aux lois du langage, échappe à toute finalité directement appréhendable. Or, cette référence morale est à l'ori­gine du mouvement d'intégration des perversions dans le champ de la com­pétence médicale au xix' siècle. L'éta­blissement de leur catalogue et leur description, par R. von Krafft-Ebing et Havelock Ellis, visaient à préciser l'in­cidence médico-légale d'actes délic­tueux et à apprécier leur rapport avec la nosographie psychiatrique. L'intérêt de ces publications réside dans la ques­tion de l'existence d'une structure cli­nique perverse individualisée. Dire qu'elles aient un intérêt doit être nuancé puisque le fait ou l'acte pervers constitue le plus souvent une impasse dans l'organisation névrotique. Cepen­dant, il se peut que le pervers, pressen­tant l'incompatibilité de son économie libidinale avec la démarche analytique, évite cette dernière. Par ailleurs, les efforts de certains auteurs pour élabo­rer un tableau exhaustif d'un « sujet pervers« sont peu convaincants, voire analytiquement discutables.

Une mention spéciale doit être faite à propos des oeuvres littéraires, où se distinguent trois ordres :

— d'une part, les textes de liberti­nage érotique (Restif de La Bretonne,


Réage, Klossowski), qui relèvent bien d'une des caractéristiques de l'homme: de pousser l'expérience du désir à ses limites comme expérience morale ;

— d'autre part, des oeuvres autobio­graphiques (abbé de Choisy, Sacher-Masoch);

— enfin, les utopies philosophiques et sociales (Sade, Ch. Fourier), qui montrent à quel point le lien social peut être affecté par la promotion d'une jouissance universelle d'un objet.

Ainsi s'exemplifie une structure sociale capable d'organiser une perver­sion généralisée par la voie d'une subli­mation collectivement assumée. Ces utopies suggèrent alors que la notion de perversion relève plus sûrement d'un lien social que d'un sujet exclusif.

Les perversions illustrent à des degrés divers la fonction de l'objet tel qu'il s'énonce dans le fantasme du névrosé mais avec une différence notable. C'est à la psychanalyse que revient le mérite d'une description spé­cifique. Articulée dans sa forme défini­tive par Freud en 1927, à propos d'un cas de fétichisme, cette dernière reste le modèle à partir duquel peuvent s'éclai­rer les autres formes de perversion. Ce cas confirme le primat du phallus, la mise en place d'un objet de substitu­tion métonymique dans son rapport à la castration symbolique. Ces élé­ments s'explicitent dans l'expérience primordiale de l'enfant, lors de sa ren­contre avec la question du sexe, laquel­le apparaît sous un jour foncièrement traumatique.

DESCRIPTION PRINCEPS DE LA
DÉCOUVERTE FREUDIENNE

La description de Freud observe trois temps.

1. La découverte puis la reconnaissance par le garçon d'abord, et à un degré moindre par la fillette, de deux catégo­ries d'êtres : ceux pourvus d'un pénis et ceux qui ne l'ont pas. La stupeur et l'effroi qui connotent cette découverte


déterminent chez le garçon la crainte d'une castration dont l'exécution est traditionnellement attribuée à la fonc­tion du père.

2.               Le second temps est celui du refus, du désaveu de la représentation ou désaveu, que d'autres auteurs traduisent par déni* (allem. Verleugnung): « Il n'est pas vrai... «, proposition qui combat l'an­goisse et la menace de castration.

3.               Enfin, une solution de compromis maintient les deux propositions con­traires dans l'inconscient, qui peut les admettre, favorisant un clivage subjectif [ou clivage du moi selon d'autres au­teurs] (allem. Ichspaltung) comportant aussi bien le désaveu que la reconnais­sance de la castration. L'observation de Freud édaire la raison pour laquelle la perversion est le point faible de l'homme alors qu'elle ne se rencontre qu'exceptionnellement chez une femme.

LA CASTRATION SYMBOLIQUE

La castration imaginée par le garçon autant que la privation éprouvée par la fillette relèvent spécifiquement de la castration symbolique, qui universa­lise le manque à l'origine du désir selon les lois du langage, où le phallus est le signifiant originairement refoulé. À ce titre, le phallus ne peut intervenir que dans sa fonction symbolique, c'est-à-dire sous la forme de ce qui doit rester voilé ou encore selon le privilège que lui donne la névrose : d'avoir à le « retrouver « au lieu même où s'exerce la castration.

Mais essentiellement la castration implique que, chez le mâle, ce sur quoi il a à se fonder est cette part d'une jouissance perdue (voire proscrite par l'interdit de l'inceste). Et c'est cette part originairement soustraite que le per­vers s'emploie à récupérer par le biais d'un objet de jouissance à la différence du névrosé, pour lequel l'intérêt réside dans les effets de désir que suscite le manque. Ainsi, le fétiche réalise cette


double opération d'un désaveu tout en fournissant la garantie dernière à cette jouissance par le biais d'un objet con­cret (chaussure, «brillant du nez «...) établissant un rapport métonymique au signifiant phallus.

De même c'est par un dévoilement inopiné que l'exhibitionniste révèle la dimension phallique de ce qui est exhibé, en forçant la pudeur de l'autre, en provoquant sa stupeur. La relation au signifiant phallique étant ordinaire­ment fermée au sujet, il ne peut y avoir accès que du lieu de l'Autre. Ainsi, pri-mordialement, c'est au lieu de la mère (Autre primordial) qu'est requis ce signifiant qui divise inauguralement le sujet dans son désir. Ce dispositif sym­bolique affecte le lien social du pervers dans la mesure où sa volonté de fléchir l'autre au gré de la jouissance d'une partie de son corps (« Kant avec Sade «, 1963; in Écrits, 1966) jusqu'au tréfonds de l'angoisse de l'autre marque la divi­sion du sujet qui lui revient comme de l'Autre. Mais c'est également dans le fléchissement de cet autre que revient au sujet sa propre abolition au regard du signifiant qui anime son désir. Éva­nouissement que réalise le masochiste en s'identifiant à l'objet méprisable qui conditionne sa jouissance non sans que soit exigée la participation d'un autre dans le contrat.

En sorte que, si le pervers met en oeuvre la gamme des objets (voix, regard, sein, fèces) comme le névrosé, son désir reste confiné à une jouissance clandestine, asservie à cette part inter­dite de l'Autre. D'où la nécessité de s'assurer de l'Autre inconscient et de réaliser conjointement la fixation exclusive du désir à cet objet, moment de suspension de la chaîne signifiante. Par ce biais, toutes les perversions solli­citent donc l'imaginaire intersubjectif de la relation à l'autre non sans que soit à chaque fois désignée la condition symbolique de la référence à l'Autre au travers du signifiant phallique.


LE MODÈLE CLINIQUE

DE L'HOMOSEXUALITÉ MASCULINE

À tout ce qui vient d'être évoqué jus­qu'ici, l'homosexualité masculine ajoute une dimension supplémentaire : l'image du moi libidinalisée dicte le choix d'un objet dans la personne propre au travers d'un autre. Cette situation fait la complexité et la vacillation perpé­tuelle qui caractérisent l'homosexua­lité masculine. Freud indiquait déjà en 1915 que les «pulsions sexuelles s'étayent d'abord sur la satisfaction des pulsions du moi« (Pulsions et destins des pulsions). Ainsi, la fixation à une bles­sure ou à l'état d'abandon narcissique induit un procès de restitution dans la vie amoureuse au travers d'une revalo­risation phallique de l'image libidinali-sée du sujet à laquelle l'autre est prié d'aliéner sa liberté. Cette image, à la fois blessée et libidinalisée, commande le choix narcissique fait d'identité et de fraternité : cette perversion, grâce à la sublimation dont elle est capable, devient l'idéal social par excellence.

 

La perversion ne fait donc qu'imiter l'apparence du désir du névrosé sous le coup de la castration puisqu'elle vise la part interdite de la jouissance; de ce fait, le pervers se rend d'autant plus esclave de l'Autre, qui le divise radi­calement au point où il tente justement de parer à l'angoisse de castration. D'être la proie crucifiée par le signifiant phallique le rend accessible à la cure.

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