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ont répondu.

Publié le 08/12/2021

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ont répondu. Et s'ils ont répondu, avec quelle ardeur ? J'ai lu ces lettres bien des fois et je
m'inquiète maintenant de savoir si on a assez fait pour eux. Vraiment fait quelque chose, je
veux dire. Il est vrai que dans une lettre, qui est adressée à mon grand-père, Shmiel fait
référence à une somme d'argent qu'il a reçue -  quatre-vingts dollars. Il y a donc bien eu une
réponse. Et la déclaration sous serment ? Pourquoi, compte tenu de la fréquence et de
l'intensité des lettres de Shmiel à ses frères et soeurs à New York, se plaint-il toujours de
n'obtenir de réponse de personne ? A l'automne 1939 :
 

Cher frère chéri et chère belle-soeur chérie,
 
Puisqu'il y a si longtemps que je n'ai pas eu de lettre de vous, j'en envoie une rapidement pour
vous rappeler de me faire savoir comment vous allez tous et en particulier comment va toute la
chère famille. Cela fait aussi bien longtemps que je n'ai pas eu de lettre de Jeunette. Pourquoi ?
Je n'en ai pas la moindre idée...
 

ou :
 

Ecris-moi plus souvent, c'est comme si on me donnait une vie nouvelle et je ne me sentirai pas
aussi seul.
 

La chère Ester va vous écrire un post-scriptum de sa main. Je vous serre dans mes bras et vous
embrasse de tout mon coeur, et vous me manquez,
Votre Sam
 

ou, plus accablant encore :
 

Cher Aby,
 

J'étais sur le point d'envoyer ceci quand j'ai reçu ta lettre.
Tu reproches à ma chère femme de ne pas s'être tournée vers ses frères et ses soeurs. Et donc
je t'écris pour te dire que tu as perdu la tête. Elle leur a déjà écrit et n'a jamais obtenu de
réponse. Que devrait-elle faire ?
 

Evidemment, il n'y a pas moyen de savoir ce qui s'est passé exactement ici entre les frères. Ce
qui ressemble, dans une lecture froide des mots eux-mêmes, à une certaine inhumanité de la
part de mon grand-père pourrait bien avoir été, après tout, quelque chose de plus innocent.

Peut-être existe-t-il, parmi les trésors cachés dans les greniers et les fosses septiques des
maisons encore debout, qui ont autrefois appartenu aux Juifs de Bolechow, une cachette
remplie de lettres, d'albums de photos, de bijoux, enveloppés dans des couvertures et fourrés
dans une valise en cuir, elle-même plongée dans le purin, et parmi ces lettres, peut-on en
trouver une avec un timbre américain, qui commence par ces mots, Cher frère, nous avons
épuisé toutes les possibilités ici, mais nous ne pouvons pas réunir la somme h laquelle tu faisais
référence. Ester a-t-elle essayé d'écrire à ses frères et soeurs aux Etats-Unis ? ...     Peut-être.
Comme toutes les lettres que mon grand-père, Jeanette et Joe Mittelmark ont (peut-être)
écrites à Shmiel sont depuis longtemps tombées en poussière, nous ne pouvons rien savoir.
J'ai néanmoins essayé. Au cours du mois qui a précédé notre départ en Ukraine, j'ai organisé
une réunion de ma mère et de ses cousins -  les enfants survivants des frères et soeurs de
Shmiel - pour leur demander quels souvenirs ils gardaient de cette époque, juste avant la
guerre, au moment où arrivaient encore les lettres de Shmiel. Ces trois cousins avaient grandi
ensemble, parfois dans les mêmes immeubles, dans le Bronx ; ils savaient tous les mêmes
choses. Nous nous sommes assis, un après-midi de juin 2001, dans le patio du cousin de ma
mère à Chicago, et ils se sont remémorés. Mais ils n'étaient pas assez âgés, ils n'étaient pas
assez proches de ce qui se passait, pour pouvoir savoir avec exactitude ; ce dont ils étaient
certains, de façon catégorique, c'était que tout le monde adorait Shmiel et que tout ce qu'il
était possible de faire pour lui l'avait été. Je voulais des faits établis, des détails, une histoire,
une anecdote qui aurait eu l'asymétrie réconfortante de la vérité, mais je n'ai obtenu que le
doux ronronnement des platitudes rassurantes.
Le cousin de ma mère, Allan, notre hôte, a dit avec fermeté, Ils auraient fait tout ce qui était
possible pour les sortir de là.
Allan est le fils de la soeur cadette, celle qui m'avait écrit autrefois, Je ne vais pas te dire quand
je suis née parce qu'il aurait mieux valu que je ne sois jamais née, et je ne me demande jamais
pourquoi il est devenu psychologue.
Les autres ont approuvé avec enthousiasme. Je me souviens du moment où la nouvelle est
arrivée, après la guerre, qu'ils étaient tous morts, a dit d'une voix traînante l'autre cousine de
ma mère, Marilyn.
Marilyn a deux ans de plus que ma mère, mais elle a un front, un nez et une mâchoire d'une
douceur, d'une délicatesse presque translucide qui lui viennent, me confie-t-elle inutilement,
de sa mère, la tante préférée de ma mère, Jeanette (c'était sa peau à elle qui était tellement
belle, mais on peut le voir sur les photos, a-t-elle dit à un moment donné, pendant ce weekend, avec ce surprenant accent profond du Sud qu'elle a pris, après tant d'années loin du Bronx.
Phoooh-tos. J'ai de nombreuses photos de la mère de Marilyn -  l'une dans une somptueuse
robe de mariée en dentelle que ses riches cousins, sa belle-famille à présent, avaient achetée
pour parer l'épouse captée ; l'autre a été prise juste avant sa mort, à l'âge de trente-cinq ans.
Dans la dernière, me dit ma mère, Jeanette était muette, incapable de parler à cause de la
première des attaques qui allaient finalement la tuer -  et je suis obligé d'être d'accord, car la
beauté légendaire dont j'ai si souvent entendu parler n'a rien d'évident dans ces photos de ce
qui semble être simplement une dame juive du début du siècle dernier plaisante à regarder. Je
me demande à présent si la raison pour laquelle je me suis senti bizarrement soulagé
d'entendre sa fille me dire, presque cinquante ans après sa mort, qu'elle était réellement une
beauté, ne tenait pas au fait de ne pas vouloir encore admettre, à ce moment-là, l'idée que tant
d'histoires de ma famille étaient peut-être des embellissements ou même des inventions).

En tout cas, Marilyn répondait maintenant à ma question concernant ce qui avait été fait ou
non pour Shmiel par ses parents, qui étaient après tout les destinataires de deux de ces lettres
au moins ; mais alors qu'elle était incapable de se souvenir de les avoir jamais entendu discuter
des requêtes de Shmiel avant la guerre, Marilyn avait des souvenirs précis du jour où, des mois
après la fin de la guerre, ils avaient appris la nouvelle que lui, sa femme et leurs enfants avaient
été tués avec tous les autres.
Je me souviens du jour où la nouvelle est arrivée, m'a dit cette séduisante dame du Sud, en me
fixant de ses yeux bleus écarquillés, un peu surpris. Il n'y a pas eu que des larmes -  il y a eu des
cris.
Qui sait ce qui a pu se passer entre ces frères et soeurs, il y a soixante-dix ans ? Impossible de le
dire. A un moment donné, pendant la conférence des cousins à Chicago, j'ai pris les
photocopies des traductions que j'avais faites des lettres de Shmiel à ses divers Parents, et je
les leur ai fait lire.
Non, non, non, a dit ma mère, en repoussant sa lettre au milieu de la table. Je ne veux pas les
lire, c'est trop triste.
Puis, elle a émis ce son légèrement sifflant, gloussant et triste, de la langue qu'elle a toujours
fait quand elle est sur le point de prononcer le mot yiddish nebuch, qui veut dire quelque
chose comme Quelle chose de terriblement pitoyable.
 

 

Lorsque Caïn s'offense du fait que Dieu a préféré l'offrande de son jeune frère à la sienne, Dieu
le réprimande : « Pourquoi es-tu irrité et pourquoi ton visage est-il abattu ? Si tu es bien
disposé, ne relèveras-tu pas la tète, et si tu n'es pas bien disposé, le péché n'est-il pas à la porte
? Qui te convoite. Et pourras-tu le dominer ? »
Rachi est très soucieux d'expliquer cette image frappante et plutôt mystérieuse du péché,
décrit comme un animal femelle, tapi à la porte. Où est-elle tapie, cette bête ? nous
demandons-nous. A la porte de quoi, exactement? «A l'entrée de ta tombe », répond Rachi,
c'est là «que ton péché est conservé ». Mais, pour lui, plus importante encore que la
signification de ce passage est celle de l'antécédent du « qui te convoite ». Le texte hébreu est
ici assez contrariant. « Péché » en hébreu se dit hatâ't, nom féminin, et par conséquent nous
devrions avoir littéralement un pronom au féminin, t'shukâtâh -  qui correspondrait à « elle te
convoite ». Et pourtant l'hébreu emploie ici un masculin plutôt qu'un féminin : t'shukâtu, « il te
convoite ». C'est-à-dire que lorsqu'on lit cette phrase, il semble qu'elle dise « il te convoite »,
auquel cas le « il » se référerait probablement à Abel. Par conséquent, le sens de la phrase
semblerait être quelque chose comme « son désir de toi » -- c'est-à-dire de se réconcilier avec
toi, de maintenir de bonnes relations avec toi, son frère -- « mais tu le domineras » -- en

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