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Nous n'avons pas d'autre réalité que l'illusion. Luigi Pirandello

Publié le 16/05/2020

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« Nous n'avons pas d'autre réalité que l'illusion.

Luigi Pirandello • Luigi Pirandello (1867-1936), auteur italien né en Sicile, a écrit de nombreux romans, nouvelles et pièces dethéâtre.

Le drame intitulé Six personnages en quête d'auteur, auquel est empruntée la citation ci-dessus, necomporte ni actes ni scènes et a d'abord été représenté en 1921, à Rome, où il a fait scandale : on accueille alorsl'auteur aux cris de farceur («buffone») et au cabanon «manicomio»)! Cependant, quatre mois plus tard, la pièce,reprise à Milan avec les mêmes interprètes, obtient un triomphe.L'argument de ce drame est simple : six personnages, inachevés par l'auteur (Pirandello), et donc réduits au « rôle»potentiel qui leur a été assigné, viennent troubler la répétition d'une comédie du même Pirandello intitulée A chacunson rôle; ils réussissent à imposer au directeur de la troupe, comme aux acteurs présents sur scène, lareprésentation de leur propre drame.

Dans sa Préface à la pièce, Pirandello s'explique à ce sujet :«J'ai voulu représenter six personnages qui sont à la recherche d'un auteur.

Leur drame ne parvient pas à êtrereprésenté, précisément parce que fait défaut l'auteur qu'ils cherchent; et ce qui, par contre, est représenté, c'estla comédie de cette vaine tentative qu'est la leur, avec tout ce qu'elle a de tragique du fait que ces sixpersonnages ont été refusés.

»Ce «supplice qui nous paraît injuste et inexplicable», auquel Pirandello, l'auteur, condamne ses personnages,entraîne pour eux le désespoir d'être interdits de scène, véritable condamnation à mort pour un personnage, on enconviendra.

De cette « tragédie» possible, Pirandello a fait une comédie en représentant le drame personnel quecha cun prétend avoir vécu : ces personnages inachevés tentent, en désespoir de cause, de justifier, aux yeux du directeur de la troupe et des acteurs, l'intérêt que présente leur propre drame. Si ces personnages avaient eu l'aubaine de se faire représenter par des acteurs qui, par vocation, auraient incarnéleur drame, à partir d'un texte mené à son terme en bonne et due forme, nous aurions eu soit une comédie demoeurs (un vaudeville), soit un mélodrame, compte tenu du pathétique dont chacun des personnages cherche à se prévaloir. En tout état de cause, ces personnages veulent à toute force jouer eux-mêmes leur rôle qu'il s'agisse du Père, maritrompé, la cinquantaine, de la Mère et de ses enfants abandonnés (deux rôles muets, celui d'un adolescent âgé dequatorze ans et celui d'une fillette) ou encore de la Belle-Fille, âgée de dix-huit ans, fille naturelle.

C'est que, aprèsavoir eu un Fils, le Père s'est séparé de sa femme.

La Mère est allée fonder un autre foyer : trois enfants naissentde ce second lit. Après la mort de son second mari, la Mère revient vivre, avec ses trois enfants, auprès du premier mari.

Mais, entretemps, l'aînée des trois enfants, la Belle-Fille, se prostitue (discrètement) et rencontre dans la maison de rendez-vous le premier mari de sa mère, qui est donc son beau-père (le Père, dans la pièce et, selon la loi italienne, qui nereconnaît pas la séparation, le père selon la loi).

La Belle-Fille évite de justesse de consommer l'«inceste».

Dans la pièce, la soeur, âgée de quatre ans, se noiera dans l'eau d'un bassin et l'adolescent de quatorze ans se tuera d'uncoup de pistolet. Dans cette «pièce à faire», comme l'indique le sous-titre de la pièce, Pirandello a donc imaginé que ces personnages dont nous venons de parler, certes issus de son invention créatrice, n'ont pas reçu de lui une forme théâtraledéfinitivement structurée mais que, toutefois, ils ont trouvé le moyen de se rendre autonomes et d'exprimer eux-mêmes sur la scène (sans l'aide des acteurs présents) leur drame personnel. Si l'on admet, avec Pirandello (dans la Préface de la pièce) que « le drame est la raison d'être du personnage», ou encore sa «fonction vitale, nécessaire pour qu'il existe», chacun des personnages veut effectivement exister, vivre au présent son drame et le faire connaître à l'auditoire.

Nous observons que les personnages prennent de plus enplus d'assurance à mesure que se déroule la pièce et parviennent à convaincre le directeur de représenter leurhistoire au théâtre. Bien plus, le Père ose soutenir que sa nature de personnage, réalité illusoire s'il en est, du moins hors de la scène oùils accèdent à l'existence par acteurs interposés, se révèle plus réelle et plus vraie que la « réalité», pourtant incontestable, du directeur de la troupe.

Il argumente pour convaincre qu'il appartient, en tant que créature dethéâtre, à un univers immuable et intemporel, domaine de l'« être», tandis que le directeur reste soumis aux vicissitudes dissolvantes de l'existence et à la destruction du temps qui passe.

Si, comme le dit le Père, porte-paroledes autres personnages, seul le théâtre confère une réalité à l'illusion, il n'en est pas moins certain que l'illusionthéâtrale doit être conçue comme la réalité par excellence ou, pour tout dire, la seule réalité.

Après avoir soutenu,avec «dignité mais sans hauteur», précise Pirandello, qu'« un personnage a vraiment une vie à lui» et que, de ce fait, il est toujours «quelqu'un», le Père veut en conclure que, dans la réalité hors du théâtre, « un homme pris comme ça, en général, peut n'être personne».

Le Directeur se récrie alors, faisant rebondir le débat : « LE DIRECTEUR, sans avoir très bien compris, effaré par cette argumentation spécieuse.

— Et alors, où voulez-vous en venir? LE PERE.

- Oh, à rien, monsieur.

Qu'à vous faire voir que si nous autres (il indique de nouveau lui-même et les autres personnages), nous n'avons pas d'autre réalité que l'illusion, vous feriez bien, vous aussi, de vous défier de votre réalité, de celle que vous respirez et que vous touchez en vous aujourd'hui, parce que — comme celle d'hier —elle est destinée à se révéler demain pour vous une illusion.. »

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