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Ligue, la

Publié le 06/12/2021

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Ligue, la, alliance militaire, politique et religieuse destinée à lutter contre les progrès de la Réforme en France (1576-1598) pendant les guerres de Religion.

La constitution de la Sainte Ligue résulta de la politique conciliatrice menée par Henri III et François d'Anjou, son frère : la paix de Beaulieu, conclue le 6 mai 1576, accordait une entière liberté de culte sauf dans les endroits où séjournait la Cour aux réformés. Ceux-ci, avec l'évasion d'Henri de Navarre — futur Henri IV — qui avait fui la Cour (il y était retenu depuis 1572) au mois de février, avaient retrouvé un chef de parti charismatique capable de reprendre efficacement la tête de l'armée protestante. Cette politique de conciliation, soutenue par la reine mère, Catherine de Médicis, heurta profondément le clan des catholiques intransigeants, en particulier les Guise, François, duc de Lorraine, et Charles, cardinal de Lorraine. Ceux-ci publièrent le 8 juin le « manifeste de Péronne « pour la défense de la religion catholique ; le pape Grégoire XIII, très engagé dans la réforme du catholicisme et l'application des décisions du concile de Trente (1545-1563), apporta son soutien à la Ligue, de même que le très catholique Philippe II d'Espagne, soucieux de ne pas laisser la France devenir une nouvelle puissance protestante.

Dotés d'une légitimité religieuse et de moyens importants, les ligueurs reprirent le combat et imposèrent à Henri III (à peu près dépouillé de toute armée sérieuse) de se rallier à eux. Les protestants furent battus à deux reprises (La Charité, 1er mai 1577, et Issoire, 12 juin) : Henri de Navarre dut signer la paix du Roi à Bergerac (17 septembre) qui restreignait à une ville par bailliage l'exercice du culte réformé et supprimait les garanties judiciaires dont bénéficiaient les protestants. Jusqu'en 1585, la Ligue domina l'ensemble de la politique française, poursuivant l'œuvre de centralisation entreprise par les premiers Valois (ordonnance de Blois, mai 1579) et intensifiant les relations avec les puissances catholiques. La septième guerre de Religion, dite « des amoureux «, confirma l'infériorité des réformés, et les clauses de la paix de Bergerac furent reprises par la paix de Fleix (26 novembre 1580).

Avec la mort de François d'Anjou en 1584, le rapport des forces fut totalement modifié. En effet, en l'absence d'héritier direct d'Henri III, l'héritier du trône de France devenait Henri de Navarre sur la base de la loi salique. De plus, le nouveau pape, Sixte V, était un ardent adversaire de tout compromis avec les protestants. La guerre des Trois-Henri commença lorsque la Ligue souleva les villes du nord de la France contre les prétentions de Navarre, prétentions auxquelles Henri III ne pouvait que souscrire. Devant la puissance des ligueurs, il accorda cependant l'édit de Nemours qui ôtait aux protestants toutes les garanties des paix précédentes. Solidement implanté dans le sud de la France, Henri de Navarre poursuivit le combat contre le duc et le roi. Le 20 octobre 1587, il remporta la victoire de Coutras sur les troupes des ligueurs et du roi. Celui-ci rompit alors avec les Guise et la Ligue.

Or, celle-ci avait accru son implantation dans toutes les grandes villes du royaume, en particulier Rouen, Reims et surtout Paris : le 12 mai 1588 (journée des Barricades), les Parisiens chassèrent Henri III et instaurèrent une municipalité ligueuse, autour d'un comité des Seize, qui représentait les seize quartiers. L'assise populaire de cette municipalité était extrêmement forte et l'enthousiasme entretenu par des processions et des exécutions régulières d'hérétiques, soupçonnés d'être les responsables de tous les maux dont souffrait la capitale.

Henri III confirma, pour rassurer Sixte V et Philippe II, la catholicité de la Couronne (édit d'Union, juillet 1588) puis fit décapiter la Ligue en faisant assassiner, à Blois, les Guise (23-24 décembre 1588). Le fils d'Henri de Guise, le duc de Mayenne, reprit la tête de la Ligue qui le nomma lieutenant général du royaume, tandis qu'Henri III était déclaré déchu et que le cardinal de Bourbon était couronné roi sous le nom de Charles X (mars 1589). Henri III, de ce fait, se réconcilia avec Henri de Navarre à Plessis-lès-Tours (30 avril 1589) et ils mirent le siège devant Paris. L'assassinat d'Henri III par Jacques Clément, un moine ligueur, clarifia les positions : Henri de Navarre devenait, sur le plan du droit, Henri IV, mais devait vaincre la Ligue.

Or les deux principales villes ligueuses, Paris et Rouen, subventionnées par Rome et l'Espagne, qui de plus dépêcha une armée de soutien, résistèrent aux sièges d'Henri IV. Dans une atmosphère enfiévrée de religiosité mystique, elles empêchaient tout retour à la paix. Ce qui finit par convaincre Henri IV de se convertir au catholicisme (« Paris vaut bien une messe «, lui aurait dit Sully). Le 25 juillet 1593, il abjura solennellement le protestantisme à Saint-Denis, ce qui lui permit, Reims étant encore tenue par les ligueurs, de se faire sacrer à Chartres (27 février 1594) et d'entrer dans Paris, le 22 mars.

À Paris, la Ligue avait d'ailleurs perdu le soutien des élites municipales traditionnelles : le mouvement s'était étoffé de revendications sociales complexes, millénaristes et égalitaristes à la fois. Le Parlement et les échevins de la ville furent donc les plus ardents partisans d'un retour à l'ordre ancien. À la suite de la capitale, la plupart des grandes villes et des provinces se soumirent, souvent moyennant rachat pur et simple, mais la Ligue n'avait plus de raison d'être et Mayenne se rallia à Henri IV en 1595.

La Sainte Ligue réunit ainsi les aspects politiques, sociaux, religieux et diplomatiques des conflits religieux dans la France du XVIe siècle. Structure à l'origine issue d'une contestation féodale et catholique du pouvoir royal, elle fut adoptée par une opposition beaucoup plus populaire et radicale à l'ordre que tentait de mettre en place la monarchie française. Ce paradoxe expliqua sans doute le revirement final des élites bourgeoises qui, après avoir soutenu vigoureusement la Ligue, s'en détachèrent et causèrent sa disparition.

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