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Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme 1 Description et récit « Et les descriptions !

Publié le 08/12/2021

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

1 Description et récit

« Et les descriptions !. Ce document contient 67808 mots. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système d’échange gratuit de ressources numériques ou achetez-le pour la modique somme d’un euro symbolique. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en : Ressources gratuites
Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

1 Description et récit

« Et les descriptions ! Rien n’est comparable au néant de celles-ci. »
(André Breton, Manifeste du surréalisme, 1924)

Découvrir
1 Lisez ces deux textes et répondez aux questions.
Ces deux extraits, tirés du même roman, sont situés au tout début du livre. Le premier décrit
la pension de Madame Vauquer, où va se dérouler l’intrigue ; le second, Mme Vauquer elle-même.
Texte 1 

Texte 2 

Cette salle, entièrement boisée, fut jadis peinte en
une couleur indistincte aujourd’hui, qui forme un
fond sur lequel la crasse a imprimé ses couches de
manière à y dessiner des figures bizarres. Elle est
5 plaquée de buffets gluants sur lesquels sont des
carafes échancrées, ternies, des ronds de moiré1
métallique, des piles d’assiettes en porcelaine
épaisse, à bords bleus, fabriquées à Tournai. Dans
un angle est placée une boîte à cases numéro10 tées qui sert à garder les serviettes, ou tachées ou
vineuses de chaque pensionnaire.
1. Sous-verres faits d’un tissu présentant
un effet d’ondulation en surface.

Sa face vieillotte, grassouillette, du milieu de laquelle sort un
nez à bec de perroquet ; ses petites mains potelées, sa personne
dodue comme un rat d’église, son corsage trop plein et qui
flotte, sont en harmonie avec cette salle où suinte le malheur,
5 où s’est blottie la spéculation, et dont madame Vauquer respire
l’air chaudement fétide1, sans en être écœurée. Sa figure fraîche
comme une première gelée d’automne, ses yeux ridés, dont l’expression passe du sourire prescrit aux danseuses à l’amer renfrognement de l’escompteur2, enfin toute sa personne explique
10 la pension, comme la pension implique la personne.
Honoré de Balzac, Le Père Goriot, 1835.

1. Répugnant, sentant mauvais.
2. Personne qui rachète les commerces
et les affaires en faisant un bénéfice.

a. Soulignez dans le texte 1 les termes qui évoquent l’aspect misérable et sale du lieu.
b. Soulignez dans le texte 2 les expressions qui caractérisent le personnage de façon négative.
c. Quels éléments du lieu s’expliquent par le personnage qui y habite ? la saleté, la laideur, la décrépitude,
qui viennent de l’avarice de Mme Vauquer.

Retenir
La description et le portrait dans le roman ou la nouvelle permettent :
n de présenter les personnages, de façon positive ou négative
n de présenter l’univers social du roman
n d’annoncer des éléments de l’intrigue
n de créer une ambiance
n de créer un effet de réel (« détail qui fait vrai »)

Madame Vauquer
Malheur, déchéance, souci d’argent
Avarice, laideur, saleté
Décrépitude, univers répugnant
Assiettes fabriquées à Tournai

Analyser et interpréter
Décrire pour annoncer l’intrigue

2 Au bout de la rue Guénégaud, lorsqu’on vient des quais, on trouve le

passage du Pont-Neuf, une sorte de corridor étroit et sombre qui va de
la rue Mazarine à la rue de Seine. Ce passage a trente pas de long et deux
de large ; il est pavé de dalles jaunâtres, usées, descellées, suant toujours
5 une humidité âcre ; le vitrage qui le couvre, coupé à angle droit, est noir
de crasse. Par les beaux jours d’été, quand un lourd soleil brûle les rues,
une clarté blanchâtre tombe des vitres sales et traîne misérablement dans
le passage. Par les vilains jours d’hiver, par les matinées de brouillard, les
vitres ne jettent que de la nuit sur les dalles gluantes, de la nuit salie et
10 ignoble. À gauche, se creusent des boutiques obscures, basses, écrasées,
laissant échapper des souffles froids de caveau.
Émile Zola, Thérèse Raquin, 1867.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Soulignez les éléments qui renvoient
à des lieux réels à Paris.
b. Encadrez les mots révélant un juge­
ment sur le passage du Pont-Neuf :
quel sera l’univers social et moral des
personnages ? un univers de laideur,
sans lumière, lié à la mort.

c. Quelle est donc la double fonction de
cette description ? Ancrer dans le réel
et annoncer l’atmosphère du roman.


Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

Décrire pour représenter le réel

3 Après un accident provoqué par une femme jalouse du conducteur,

une locomotive à vapeur, « La Lison », est couchée sur les rails.
La Lison, renversée sur les reins, le ventre ouvert, perdait sa vapeur ;
par les robinets arrachés, les tuyaux crevés, en des souffles qui grondaient, pareils à des râles furieux de géante. Une haleine blanche
en sortait, inépuisable, roulant d’épais tourbillons au ras du sol ;
5 pendant que, du foyer, les braises tombées, rouges comme le sang
même de ses entrailles, ajoutaient leurs fumées noires. La cheminée, dans la violence du choc, était entrée en terre ; à l’endroit où
il avait porté, le châssis s’était rompu, faussant les deux longerons1
et, les roues en l’air, semblable à une cavale monstrueuse décousue
10 par quelque formidable coup de corne, la Lison montrait ses bielles 2
tordues, ses cylindres cassés, ses tiroirs et leurs excentriques3 écrasés,
toute une affreuse plaie bâillant au plein air, par où l’âme continuait
de sortir, avec un fracas d’enragé désespoir.
Émile Zola, La Bête humaine, 1890.

1. Pièces maîtresses d’un châssis.
2. Tiges rigides d’un mécanisme.
3. Pièces d’un moteur.

a. Soulignez les termes techniques
qui évoquent les différentes parties
de la machine.
b. Soulignez en vert les mots qui renvoient
à l’accident. (ici, en pointillés)
c. Encadrez les termes qui personnifient
la Lison. À quoi est-elle identifiée ?
À une géante, à un monstre blessé.


d. À quel registre renvoie la description ?
? voir fiche 28

Au registre épique

e. Que dit cette description des machines
dans le monde moderne, selon Zola ?
Elles sont vivantes, effrayantes et monstrueuses.


Décrire pour représenter un personnage

4 Désirée avait alors vingt-deux ans. Grandie à la campagne, chez

5

sa nourrice, une paysanne de Saint-Eutrope, elle avait poussé en
plein fumier. Le cerveau vide, sans pensées graves d’aucune sorte,
elle profitait du sol gras, du plein air de la campagne, se développant
toute en chair, devenant une belle bête, fraîche, blanche, au sang
rose, à la peau ferme. C’était comme une ânesse de race qui aurait
eu le don du rire. […] Elle était une créature à part, ni demoiselle,
ni paysanne, une fille nourrie de la terre, avec une ampleur d’épaules
et un front borné de jeune déesse.
Émile Zola, La Faute de l’abbé Mouret, 1875.

a. Soulignez les expressions qui rapprochent
Désirée du monde animal.
b. Permettent-elles au lecteur de se la repré­
senter précisément ?
Non, les détails physiques sont absents.


c. Quel rapport Désirée entretient-elle
avec la nature ?
Une relation simple, directe, sans réflexion,
sans morale.

Décrire pour juger

5 Pour le mariage de Charles et Emma Bovary, un gâteau a été com-

mandé. Le pâtissier s’est surpassé…
On avait été chercher un pâtissier à Yvetot […]. Il apporta, luimême, au dessert, une pièce montée qui fit pousser des cris. À la
base, d’abord, c’était un carré de carton bleu figurant un temple
avec portiques, colonnades et statuettes de stuc tout autour, dans des
5 niches constellées d’étoiles en papier doré ; puis se tenait au second
étage un donjon en gâteau de Savoie, entouré de menues fortifications en angélique, amandes, raisins secs, quartiers d’oranges ; et
enfin, sur la plate-forme supérieure, qui était une prairie verte où
il y avait des rochers avec des lacs de confitures et des bateaux en
10 écales de noisettes, on voyait un petit Amour, se balançant à une
escarpolette de chocolat, dont les deux poteaux étaient terminés
par deux boutons de rose naturelle, en guise de boules, au sommet.
Gustave Flaubert, Madame Bovary, 1857.

a. Encadrez les connecteurs spatiaux
et temporels qui indiquent les trois parties
du gâteau.
b. Soulignez ce que contient chaque étage.
c. Quelle impression garde le lecteur
de ce gâteau ? Une impression de mauvais
goût, de surcharge, de ridicule.


d. Cependant, comment est accueilli
ce gâteau par les invités de ce mariage
petit-bourgeois ? Quel jugement Flaubert
porte-t-il sur ceux qui l’ont commandé ?
Le gâteau est très bien accueilli.
Flaubert ridiculise les personnages.

VERS LE BAC ? Initiation à la dissertation

À l’aide des exemples étudiés ou de vos lectures, répondez à la phrase d’André Breton,
citée en ouverture de cette fiche.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

2 Roman et nouvelle : le temps
« Le récit est le gardien du temps. » (Paul Ricœur, Temps et récit, 1985)
Découvrir
1 Il voyagea.

Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente,
l’étourdissement des paysages et des ruines, l’amertume des sympathies
interrompues.
5 Il revint.
Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore. Mais le souvenir continuel du premier les lui rendait insipides ; et puis la véhémence
du désir, la fleur même de la sensation était perdue. Ses ambitions d’esprit avaient également diminué. Des années passèrent ; et il supportait le
10 désœuvrement de son intelligence et l’inertie de son cœur.
Vers la fin de mars 1867, à la nuit tombante, comme il était seul dans son
cabinet1, une femme entra.
« Madame Arnoux ! » […]
Cependant, il sentait quelque chose d’inexprimable, une répulsion, et
15 comme l’effroi d’un inceste. Une autre crainte l’arrêta, celle d’en avoir
dégoût plus tard. D’ailleurs, quel embarras ce serait !
Gustave Flaubert, L’Éducation sentimentale, 1869.
1. Bureau.

a. Comparez les éléments surlignés
en jaune et ceux en rose : lesquels
racontent un événement long ?
Lesquels racontent un événement bref ?
Les éléments en rose racontent des
événements qui durent des années,
sont marquants. Ceux en jaune racontent un événement bien plus court :
la visite de Mme Arnoux.

b. Lequel de ces événements est le plus
important aux yeux du personnage ?
C’est la visite de Mme Arnoux, l’événement le plus bref, qui revêt la plus
grande importance pour le personnage.


Retenir
Type ou forme de narration
Scène (passage dans lequel la durée de narration coïncide
avec celle du déroulement de l’épisode)
Pause (ralentissement dans la progression du récit)
Ellipse (passage sous silence d’un événement de l’histoire)
Sommaire (résumé des actions racontées)
Analepse (retour en arrière)
Prolepse (évocation par anticipation d’un événement à venir)

Outils et procédés
Dialogue, dates, détails des actions
Généralités, termes absolus,
commentaire du narrateur
Absence de date, raccourci
Action résumée rapidement
Adverbes de temps et temps du passé
Adverbes de temps et temps du futur

Exemples
Une femme entra.
« Madame Arnoux ! »
Il ne regretta rien.
Il revint. Il fréquenta
Il voyagea.
Ses souffrances d’autrefois
Plus tard / ce serait

Analyser et interpréter
Temps et sommaire

2 Florent, jeune étudiant devenu orphelin, s’occupe de son demi-frère cadet Quenu.

Cependant, les années passaient. Florent, qui avait hérité des dévouements
de sa mère, gardait Quenu au logis comme une grande fille paresseuse. Il lui
évitait jusqu’aux menus soins de l’intérieur ; c’était lui qui allait chercher les
provisions, qui faisait le ménage et la cuisine. […] Le soir, quand il rentrait,
5 crotté, la tête basse de la haine des enfants des autres, il était tout attendri
par l’embrassade de ce gros et grand garçon, qu’il trouvait en train de jouer
à la toupie, sur le carreau de la chambre. Quenu riait de sa maladresse à faire
les omelettes et de la façon sérieuse dont il mettait le pot-au-feu. La lampe
éteinte, Florent redevenait triste, parfois, dans son lit. Il songeait à reprendre
10 ses études de droit, il s’ingéniait pour disposer son temps de façon à suivre les
cours de la Faculté. Il y parvint, fut parfaitement heureux. Mais une petite
fièvre qui le retint huit jours à la maison creusa un tel trou dans leur budget
et l’inquiéta à un tel point qu’il abandonna toute idée de terminer ses études.
Émile Zola, Le Ventre de Paris, 1873.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Quelle est la durée concernée par
ce passage ? Y a-t-il un événement
particulier ?
des années ; la petite fièvre


b. Soulignez les verbes au passé
simple : quel type de durée chacun
d’eux indique-t-il ?
Les 2 premiers : une pause ; les
4 autres : un sommaire

c. Quelle est la fonction de la pre­
mière phrase ? Donner la durée
générale, introduire un sommaire
de toutes ces années.

Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

Passé et futur dans le récit

3 Ces deux forteresses1 avaient été édifiées par deux hommes nom-

més, l’un Cournet, l’autre Barthélemy. Cournet avait fait la barricade Saint-Antoine ; Barthélemy la barricade du Temple. Chacune
d’elles était l’image de celui qui l’avait bâtie.
5 Cournet était un homme de haute stature ; il avait les épaules
larges, la face rouge, le poing écrasant, le cœur hardi, l’âme loyale,
l’œil sincère et terrible. Intrépide, énergique, irascible, orageux ; le
plus cordial des hommes, le plus redoutable des combattants. […]
Barthélemy, maigre, chétif, pâle, taciturne, était une espèce de
10 gamin tragique qui, souffleté par un sergent de ville, le guetta,
l’attendit, et le tua, et, à dix-sept ans, fut mis au bagne. […]
Plus tard, chose fatale, à Londres, proscrits tous deux, Barthélemy
tua Cournet.
Victor Hugo, Les Misérables, Partie 5, Livre I, Chapitre 1, 1862.

1. Il s’agit des barricades érigées lors de l’insurrection de 1832.

a. Soulignez une prolepse.
b. Encadrez une analepse.
c. En quoi ces précisions sur le passé et l’avenir
des personnages permettent-elles de mieux
comprendre leur portrait ?
Leur différence est très importante : l’un est
fort, loyal mais violent ; l’autre faible et
rancunier.






Temps et effet de surprise

4 Le gamin arriva huit jours après. C’était déjà un grand galo-

pin fluet, à figure de fille, l’air délicat et effronté, d’un blond très
doux. […] Un domestique venait de l’amener de la gare, et il était
dans le grand salon, ravi par l’or de l’ameublement et du plafond,
5 profondément heureux de ce luxe au milieu duquel il allait vivre,
lorsque Renée, qui revenait de chez son tailleur, entra comme un
coup de vent. Elle jeta son chapeau et le burnous1 blanc qu’elle
avait mis sur ses épaules pour se protéger contre le froid déjà vif.
Elle apparut à Maxime, stupéfait d’admiration, dans tout l’éclat
10 de son merveilleux costume.
Émile Zola, La Curée, 1871.

1. Grand manteau de laine à capuchon et sans manches.

a. Soulignez une scène.
b. Encadrez une pause.
c. Comment mettent-elles en valeur
la rencontre des personnages ?
L’attente et la passivité du jeune garçon
rendent la rencontre plus spectaculaire et
expliquent sa fascination pour Renée.




Temps et portrait

5 À peine Julien fut-il à terre, que le vieux Sorel, le chassant rude-

ment devant lui, le poussa vers la maison. Dieu sait ce qu’il va me
faire ! se disait le jeune homme. […]
C’était un petit jeune homme de dix-huit à dix-neuf ans, faible
5 en apparence, avec des traits irréguliers, mais délicats, et un nez
aquilin. De grands yeux noirs, qui, dans les moments tranquilles,
annonçaient de la réflexion et du feu, étaient animés en cet instant de l’expression de la haine la plus féroce. […]
À peine entré dans la maison, Julien se sentit l’épaule arrêtée par
10 la puissante main de son père ; il tremblait, s’attendant à quelques
coups.
Stendhal, Le Rouge et le Noir, 1830.

VERS LE BAC ? L’écriture d’invention

Transformez un élément des sommaires utilisés par
Flaubert dans L’Éducation sentimentale (exercice 1)
en une scène. Vous utiliserez la description, le dialogue,
le récit.
Par exemple : Il connut les froids réveils sous la tente ;
le souvenir continuel du premier…

a. Soulignez une scène.
b. Encadrez une pause.
c. Comment ce traitement du temps permet-il
au lecteur de mieux comprendre la scène ?
Julien est montré comme un jeune homme habituellement calme et doux mais qui, à ce
moment-là, révèle un aspect de lui-même que
le portrait laissait peu prévoir.




BILAN ? Temps et récit

Dans un tableau ou sous forme de carte
heuristique ? voir fiche 38, dites quels effets
produisent les différents traitements
du temps d’un récit. Vous vous appuierez sur
les exemples de cette fiche ou d’autres que
vous aurez étudiés.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

3 Le roman réaliste
«

 Le réaliste cherchera […] à donner [de la vie] une vision plus complète, plus saisissante,
plus probante que la réalité même.  (Guy de Maupassant, préface de Pierre et Jean, 1887)

»

Découvrir
1 Voici l’évocation du fusil d’un paysan.

D’abord, si le bois est d’une simplicité commune,
le canon, choisi avec soin, provient d’un fusil de
prix, donné sans doute à quelque garde-chasse.
Aussi, le propriétaire de ce fusil ne manque-t-il
5 jamais son coup, il existe entre son arme et lui l’intime connaissance que l’ouvrier a de son outil. S’il
faut abaisser le canon d’un millimètre au-dessous
ou au-dessus du but, parce qu’il relève ou tombe
de cette faible estime1, le braconnier le sait, il obéit
10 à cette loi sans se tromper. Puis, un officier d’artillerie trouverait les parties essentielles de l’arme en
bon état : rien de moins, rien de plus. Dans tout
ce qu’il s’approprie, dans tout ce qui doit lui servir,
le paysan déploie la force convenable, il y met le
15 nécessaire et rien au-delà. La perfection extérieure,
il ne la comprend jamais. Juge infaillible des nécessités en toutes choses, il connaît tous les degrés de
force, et sait, en travaillant pour le bourgeois, donner le moins possible pour le plus possible.
Honoré de Balzac, Les Paysans, posthume, 1855.

1. Ici, calcul de la trajectoire de la balle.

a. Soulignez les passages de description du fusil : sont-ils
nombreux ? Non, ils sont peu nombreux.
b. Sur quoi le narrateur insiste-t-il ?
Sur la mentalité du propriétaire du fusil, qui connaît
parfaitement son arme.

c. Encadrez les classes sociales citées.
Quelle est celle du propriétaire du fusil ?
Ouvrier, armée, paysan, bourgeois.
Le propriétaire est un paysan.

d. Comment son usage de l’arme caractérise-t-il, selon Balzac,
cette classe sociale ? Que symbolise alors le fusil ?
Ici, le souci de l’économie, de l’utilité caractérise ce paysan.
Le fusil devient le symbole de la classe paysanne.



e. Que pense le narrateur des paysans ?
Ils sont redoutables, efficaces, voire profiteurs et ont le
sens pratique.


Retenir
?? Le

réalisme est un mouvement littéraire et artistique
qui s’étend de 1830 à 1860 environ. Ses principaux
représentants sont les romanciers Honoré de Balzac,
Stendhal et Gustave Flaubert, et les peintres Gustave
Courbet et Jean-François Millet.
?? À partir de la révolution industrielle, la bourgeoisie et le
matérialisme prennent une place essentielle, tandis que
le romantisme s’essouffle : le réalisme vise donc à rendre
compte du réel et à en donner l’illusion dans la fiction.

?? Cette

reconstitution artistique du réel s’appuie sur
une analyse fine des forces psychologiques, politiques
et historiques de la société. Les romanciers réalistes
décrivent minutieusement le milieu dans lequel vivent
leurs personnages.
?? Mais chaque artiste privilégie un regard personnel
sur le réel, propose sa propre vision du monde et
de la beauté. Le réalisme n’est jamais une simple copie
du réel.

Analyser et interpréter
Le regard du romancier

2 Jadis, il existait dans le cloître, du côté de la Grand’rue, plusieurs mai-

5

sons réunies par une clôture, appartenant à la Cathédrale et où logeaient
quelques dignitaires du chapitre. Depuis l’aliénation des biens du clergé,
la ville a fait du passage qui sépare ces maisons une rue, nommée rue de la
Psalette. […] Un antiquaire1, s’il y en avait à Tours, une des villes les moins
littéraires de France, pourrait même reconnaître, à l’entrée du passage dans
le cloître, quelques vestiges de l’arcade qui formait jadis le portail de ces
habitations ecclésiastiques.
Honoré de Balzac, Le Curé de Tours, 1832.

1. Archéologue.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Que décrit cet extrait ? Soulignez
ce qui permet de situer exactement
l’endroit évoqué.
Cet extrait décrit une rue de Tours.




b. Encadrez l’expression qui laisse
transparaître l’avis du romancier
sur cette ville.

Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

La réalité vue par un personnage

3 Mêlé par hasard à la bataille de Waterloo, le jeune Fabrice arrive sur le

champ de bataille.
Tout à coup on partit au grand galop. Quelques instants après, Fabrice
vit, à vingt pas en avant, une terre labourée qui était remuée d’une façon
singulière. Le fond des sillons était plein d’eau, et la terre fort humide
qui formait la crête de ces sillons, volait en petits fragments noirs lan5 cés à trois ou quatre pieds de haut. […] Il entendit un cri sec auprès de
lui : c’étaient deux hussards qui tombaient atteints par des boulets ; et,
lorsqu’il les regarda, ils étaient déjà à vingt pas de l’escorte. Ce qui lui
sembla horrible, ce fut un cheval tout sanglant qui se débattait sur la
terre labourée, en engageant ses pieds dans ses propres entrailles, il vou10 lait suivre les autres : le sang coulait dans la boue. […]
À ce moment, l’escorte allait ventre à terre, et notre héros comprit que
c’étaient des boulets qui faisaient voler la terre de toutes parts.
Stendhal, La Chartreuse de Parme, 1839.

a. Quel phénomène intrigue Fabrice au
début de l’extrait ? Soulignez le passage.
Fabrice ne comprend pas les fragments
de terre projetés en l’air.

b. À quel moment comprend-il ce qui se
passe ? Encadrez-le. Il ne comprend qu’à
la fin, après avoir vu le cheval blessé
et les hussards morts.

c. Quelle image de la guerre le lecteur
retient-il ? Le lecteur ressent la même
incompréhension et la même répulsion
que le personnage : la guerre est horrible.

Réalisme et vision de l’homme

4 La mère de Charles Bovary, jeune médecin, a décidé de s’occuper de l’ave-

nir de son fils.
Où irait-il exercer son art ? À Tostes. Il n’y avait là qu’un vieux médecin. Depuis longtemps, Mme Bovary guettait sa mort, et le bonhomme
n’avait point encore plié bagage, que Charles était installé en face, comme
son successeur.
5 Mais ce n’était pas tout que d’avoir élevé son fils, de lui avoir fait
apprendre la médecine et découvert Tostes pour l’exercer : il lui fallait
une femme. Elle lui en trouva une : la veuve d’un huissier de Dieppe,
qui avait ­quarante-cinq ans et douze cents livres de rente.
Quoiqu’elle fût laide, sèche comme un cotret1, et bourgeonnée2 comme
10 un printemps, certes Mme Dubuc ne manquait pas de partis à choisir.
Pour arriver à ses fins, la mère Bovary fut obligée de les évincer3 tous, et
elle déjoua même fort habilement les intrigues d’un charcutier qui était
soutenu par les prêtres.
Gustave Flaubert, Madame Bovary, 1857.

1. Fagot de bois sec. – 2. Son visage est couvert de boutons.
3. Écarter.

a. Quelles sont les deux préoccupations
de Madame Bovary ?
Installer son fils dans son cabinet
médical et lui trouver une épouse.

b. Encadrez les expressions qui indiquent
le jugement du narrateur sur les agisse­
ments et les choix de Madame Bovary.
c. Quelle vision du mariage et de la vie
le romancier montre-t-il chez ses person­
nages ?
Le romancier montre ici des considérations uniquement matérielles,
sordides, qui font du mariage une
affaire d’argent, et de la vie, une série
d’arrangements sans amour ni beauté.


Le réalisme en peinture
© DeAgostini/Leemage.

5 a. Quels éléments rappellent le roman réaliste (thèmes, focalisa­
tion, univers social…) ?
Les personnages sont dans leur milieu, occupés à des tâches
humbles, détails précis, attention à la vie réelle, regard à hauteur
d’homme, monde paysan.

b. À votre avis, quel regard le peintre porte-t-il sur l’univers paysan ?
Justifiez votre réponse par des éléments précis du tableau.
Ces paysans sont harmonieux, beaux (visage de la jeune femme),
paisibles, leurs poses sont dignes, sans bassesse :
le peintre en donne une image très positive.
Jean-François Millet, Les Planteurs de pommes de terre, 1862,
huile sur toile (82,5 x 101,3 cm), Museum of Fine Arts, Boston.



VERS LE BAC ? Construire une carte heuristique

Faites une liste des principales caractéristiques du roman réaliste et organisez-les
en construisant une carte heuristique ? voir fiche 38.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

4 Le roman naturaliste

« Le roman naturaliste est une expérience véritable que le romancier
fait sur l’homme, en s’aidant de l’observation. » (Émile Zola, Le Roman expérimental, 1880)
Découvrir
1 Au milieu du grand silence, et dans le désert

de l’avenue, les voitures de maraîchers1 montaient vers Paris […]. Un tombereau2 de choux
et un tombereau de pois, au pont de Neuilly,
5 s’étaient joints aux huit voitures de navets et
de carottes qui descendaient de Nanterre ; et
les chevaux allaient tout seuls, la tête basse, de
leur allure continue et paresseuse, que la montée ralentissait encore. En haut, sur la charge
10 des légumes, allongés à plat ventre, couverts de
leur limousine3 à petites raies noires et grises, les
charretiers sommeillaient, les guides aux poignets. […]
Balthazar, le cheval de madame François, une
15 bête trop grasse, tenait la tête de la file. Il marchait, dormant à demi, dodelinant des oreilles,
lorsque, à la hauteur de la rue de Longchamp,
un sursaut de peur le planta net sur ses quatre
pieds.
Émile Zola, Le Ventre de Paris, 1873.

1. Marchands de légumes. – 2. Charrette.
3. Vêtement du charretier.

a. Qu’évoque le premier paragraphe ? À quel temps l’action
est-elle racontée ? Pourquoi ?
L’arrivée des maraîchers dans Paris, au petit matin, est décrite
à l’imparfait, temps de l’arrière-plan et du décor.



b. À quel moment l’intrigue s’amorce-t-elle ? Encadrez
les éléments qui le montrent. Justifiez l’emploi des temps.
Au second paragraphe, on passe d’une description générale à
la description d’un élément précis et nommé (Balthazar) et au
récit d’un événement soudain (passage de l’imparfait au passé
simple).


c. Quelle est la place de la réalité matérielle dans ce roman
naturaliste ?
Elle est très importante : c’est le cadre de l’intrigue ;
les personnages sont intégrés dans un milieu précisément
décrit.


Retenir
?? Le

naturalisme est un mouvement littéraire qui cherche
à décrire la réalité de manière encore plus objective que
le réalisme. Ses principaux représentants sont Émile Zola,
Guy de Maupassant, les frères Jules et Edmond
de Goncourt.
?? Il s’appuie sur une approche scientifique de la société
pour cerner, au plus près, le rôle du milieu sur la vie de

l’individu et l’influence de l’hérédité. Cette méthode
expérimentale vise à expliquer la réalité de l’époque
et des hommes.
?? Le romancier s’intéresse à toutes les classes sociales, mais
aussi à tous les aspects de la vie. Il utilise donc beaucoup
les descriptions, les différences de niveaux de langue,
pour être au plus près du réel.

Analyser et interpréter
Naturalisme et langage des personnages

2 Jean vient d’aider Françoise, blessée par une vache qui l’a heurtée.
– Comment ! Déjà midi ! s’écria Jean. Dépêchons-nous.
Puis, apercevant la Coliche, dans le champ :
– Eh ! ta vache fait du dégât. Si on la voyait… Attends, bougresse,
je vas te régaler !
5 – Non, laissez, dit Françoise, qui l’arrêta. C’est à nous, cette pièce.
La garce, c’est chez nous qu’elle m’a culbutée !… Tout le bord est
à la famille, jusqu’à Rognes. Nous autres, nous allons d’ici là-bas ;
puis, à côté, c’est à mon oncle Fouan ; puis, après, c’est à ma tante,
la Grande.
10 En désignant les parcelles du geste, elle avait ramené la vache dans
le sentier.
Émile Zola, La Terre, 1887.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Quel est le niveau de langue
des personnages ? Soulignez les expressions
qui le montrent.
Les personnages utilisent un niveau de
langue familier.

b. Quel est le milieu social décrit ?
C’est le milieu paysan.

c. Quel rôle joue le langage des personnages ?
Le langage montre leur niveau culturel et
produit un effet de réel.



Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

Naturalisme et objectivité

3 Derrière lui, la petite église restait blafarde des pâleurs de la

matinée […]. Près de l’échelle, le confessionnal1, aux panneaux
disjoints, était peint en jaune citron. En face, à côté de la petite
porte, se trouvait le baptistère2, un ancien bénitier3, posé sur un
5 pied en maçonnerie4. Puis, à droite et à gauche, au milieu, étaient
plaqués deux minces autels, entourés de balustrades de bois. Celui
de gauche, consacré à la sainte Vierge, avait une grande Mère
de Dieu en plâtre doré […]. L’autel de droite, où se disaient les
messes de mort, était surmonté d’un Christ en carton peint, fai10 sant pendant à la Vierge.
Émile Zola, La Faute de l’abbé Mouret, 1875.

1. Dans une église, endroit fermé où le prêtre reçoit la confession.
2. Lieu où l’on procède au baptême. – 3. Vasque destinée à contenir
l’eau bénite. – 4. Ici, sans décoration.

4 C’était une masse lourde, un tas écrasé de constructions, d’où

5

se dressait la silhouette d’une cheminée d’usine ; de rares lueurs
sortaient des fenêtres encrassées, cinq ou six lanternes tristes
étaient pendues dehors, à des charpentes dont les bois noircis
alignaient vaguement des profils de tréteaux gigantesques ; et,
de cette apparition fantastique, noyée de nuit et de fumée, une
seule voix montait, la respiration grosse et longue d’un échappement de vapeur, qu’on ne voyait point.
Alors, l’homme reconnut une fosse1.
Émile Zola, Germinal, 1885.

1. Entrée d’une mine.

a. Soulignez les détails qui montrent la pauvreté
de l’église.
b. En quoi ce passage s’inscrit-il dans le courant
naturaliste ?
La description de l’église rend compte d’une
réalité évoquée avec précision et une apparente objectivité ; elle est ancrée dans le réel
matériel et économique, avec des matériaux
ordinaires connus des lecteurs.




a. Soulignez les éléments qui font référence
à la réalité évoquée de façon objective.
b. Encadrez les éléments qui suggèrent le senti­
ment de Zola sur cet univers de la mine :
la présentation est-elle réellement objective ?
Non, Zola insiste bien davantage sur la laideur, la tristesse, la violence de cet univers
qui est comme une « apparition fantastique ».



Naturalisme et vision scientifique

5 Germinie, une domestique, vient d’apprendre la mort de sa fille ;

elle a une crise de nerfs.
Les terribles secousses, les détentes nerveuses des membres, les
craquements de tendons avaient cessé ; mais sur le cou, sur la
poitrine que découvrait la robe dégrafée, passaient des mouvements ondulatoires pareils à des vagues levées sous la peau et
5 que l’on voyait courir jusqu’aux pieds, dans un frémissement
de jupe. La tête renversée, la figure rouge, les yeux pleins d’une
tendresse triste, de cette angoisse douce qu’ont les yeux des blessés, de grosses veines se dessinant sous le menton, haletante et ne
répondant pas aux questions, Germinie portait les deux mains à
10 sa gorge, à son cou, et les égratignait ; elle semblait vouloir arracher de là la sensation de quelque chose montant et descendant
au dedans d’elle.
Edmond et Jules de Goncourt, Germinie Lacerteux, 1865.

VERS LE BAC ? L’écriture d’invention
À la manière d’un écrivain naturaliste,
écrivez un début de roman présentant
un milieu social de votre choix.
Vous y insérerez un ou des personnages
caractéristiques de ce milieu.

a. Soulignez les éléments qui rappellent
une description médicale.
b. Encadrez les expressions qui évoquent
des sentiments.
c. Comment le narrateur rend-il compte
des émotions du personnage ? Que peut-on
en déduire sur la manière dont les naturalistes
présentent la psychologie des personnages. ?
Les émotions morales causent des désordres
physiques,

qui

sont

racontés

cliniquement,

scientifiquement ; l’émotion n’est pas analysée
mais ses effets sont décrits, montrant son
intensité, sans intervention directe du narrateur.

BILAN ? Réalisme et naturalisme

Comparez le réalisme et le naturalisme, en vous appuyant sur
les textes de la fiche 3 et ceux de cette fiche. Vous formulerez
vos réponses sous la forme du tableau suivant :
Réalisme

Naturalisme

Principaux représentants
Dates
Nature des personnages
Rôle du narrateur
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

5 Énonciation et focalisation

« J’aime, quand on me raconte une histoire, savoir qui me la raconte. » (Emmanuel Carrère, Le Royaume, 2014)
Découvrir
1

5

Texte 1 Un voyageur raconte l’une de ses aventures.
Lorsque le court repas fut fini, j’allai m’asseoir devant la
porte, le cœur serré par la mélancolie du morne paysage,
étreint par cette détresse qui prend parfois les voyageurs
en certains soirs tristes, en certains lieux désolés. Il semble
que tout soit près de finir, l’existence et l’univers.

Un jeune paysan doit soigner un vieux c­ heval.
Depuis longtemps déjà, il s’étonnait qu’on gardât Coco,
s’indignant de voir perdre du bien pour cette bête inutile. Du moment qu’elle ne travaillait plus, il lui semblait injuste de la nourrir, il lui semblait révoltant de
gaspiller de l’avoine, de l’avoine qui coûtait si cher,
pour ce bidet paralysé.

Texte 3

5

Guy de Maupassant, « Le Bonheur », 1885.

Des chasseurs demandent à l’un d’eux de rester.
Après une longue méditation, il murmura, hésitant :
– C’est que… c’est que… je ne suis pas seul ici ; j’ai mon
gendre.
Ce furent des cris et des exclamations :
– Votre gendre ?… Mais où est-il ?
Alors, tout à coup, il sembla confus, et rougit.
– Comment ! vous ne savez pas ?… Mais… mais… il est
sous la remise. Il est mort.
Un silence de stupéfaction régna.

Guy de Maupassant, « Coco », 1885.

Texte 2

5

Un handicapé mendie à la campagne.
Dans les villages, on ne lui donnait guère  : on le
connaissait trop ; on était fatigué de lui depuis quarante
ans qu’on le voyait promener de masure en masure son
corps loqueteux et difforme sur ses deux pattes de bois.
Il ne voulait point s’en aller cependant, parce qu’il ne
connaissait pas autre chose sur la terre que ce coin de
pays, ces trois ou quatre hameaux où il avait traîné sa
vie misérable.

Texte 4

5

Guy de Maupassant, « Le Gueux », 1885.

Guy de Maupassant, « La Roche aux guillemots », 1885.

a. Qui raconte dans le texte 1 ? je, un voyageur
b. Qui raconte dans le texte 2 ? Comment se perçoivent
les sentiments du personnage ? Un narrateur extérieur
raconte. Les sentiments du personnage sont expliqués

c. Dans le texte 3, connaît-on les pensées du personnage ?
Soulignez ce qui le montre. Oui, celles du jeune paysan.
d. Dans le texte 4, de qui connaît-on les pensées ? Y a-t-il
un point de vue particulier ? Le narrateur connaît les

par ses attitudes et ses paroles.

pensées de tous : paysans, mendiant.

Retenir
Procédé
Énonciation
à la 1re personne
Énonciation
à la 3e personne

Caractéristiques

Effet produit

Emploi des pronoms je ou nous.

Narrateur identifiable, qui paraît authentique. J’allai m’asseoir.

Pas de narrateur identifiable.

Le récit apparaît comme objectif. On ne lui donnait guère.

Le lecteur pénètre dans les pensées, les idées du personnage.
Il s’étonnait.
Focalisation externe Le lecteur suit les actes, mais pas les pensées. On voit agir, mais sans comprendre. Il sembla confus, il rougit.
On ne suit aucun personnage
Le narrateur est omniscient.
Focalisation zéro
en particulier.
On était fatigué. – Il ne voulait point s’en aller.
Focalisation interne On suit les pensées d’un personnage.

Analyser et interpréter
Comprendre un personnage

2 Rastignac, jeune homme ambitieux, cherche la réussite sociale.

5

Si d’abord il voulut se jeter à corps perdu dans le travail, séduit bientôt par la nécessité de se créer des relations, il remarqua combien les
femmes ont d’influence sur la vie sociale, et avisa soudain à se lancer dans le monde, afin d’y conquérir des protectrices : devaient-elles
manquer à un jeune homme ardent et spirituel, dont l’esprit et l’ardeur étaient rehaussés par une tournure élégante et par une sorte de
beauté nerveuse à laquelle les femmes se laissent prendre volontiers ?
Honoré de Balzac, Le Père Goriot, 1834.

© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. À quelle personne est racontée
l’histoire ? À la 3e personne.
b. Quelle est la focalisation utilisée ?
Soulignez ce qui le montre.
Focalisation interne

c. Quelle caractéristique du personnage
cette focalisation permet-elle de montrer ?
Son ambition, son caractère volontaire


Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme

Juger des personnages

3 Trois couples de bourgeois fuient Rouen, pendant la guerre

5

franco-prussienne de 1870 : ils partagent la diligence avec une
prostituée.
Mais bientôt la conversation reprit entre les trois dames1, que la
présence de cette fille2 avait rendues subitement amies, presque
intimes. Elles devaient faire, leur semblait-il, comme un faisceau3 de leurs dignités d’épouses […]. Les trois hommes aussi,
rapprochés par un instinct de conservateurs […], parlaient
argent d’un certain ton dédaigneux pour les pauvres. […] Bien
que de conditions différentes, ils se sentaient frères par l’argent.
Guy de Maupassant, Boule de suif, 1880.

1. Ici : femmes de la bourgeoisie. – 2. Ici : prostituée. – 3. Ici : rempart.

a. Quels groupes se forment ? Que pensent-ils ?
Soulignez les éléments qui le montrent.
D’un côté, les femmes, épouses bourgeoises, soudées contre la menace de cette « fille » méprisable ; de l’autre, les hommes, eux aussi réunis
dans une même connivence : celle de l’argent.

b. Quelle est la focalisation employée ?
Focalisation zéro (le narrateur connaît les pensées des personnages).

c. Le regard du narrateur est-il positif ou péjoratif ?
Il est péjoratif.

Décrire un milieu

4 Lisa, charcutière, aménage une boutique neuve.

5

Le revêtement des murs était tout en marbre blanc ; au plafond, une immense glace carrée s’encadrait dans un large
lambris doré et très orné, laissant pendre, au milieu, un
lustre à quatre branches ; et, derrière le comptoir, tenant
le panneau entier, à gauche encore, et au fond, d’autres
glaces, prises entre les plaques de marbre, mettaient des lacs
de clarté, des portes qui semblaient s’ouvrir sur d’autres
salles, à l’infini, toutes emplies des viandes étalées.
Émile Zola, Le Ventre de Paris, 1873.

a. Quelle est la focalisation utilisée ? Qu’est-ce qui
le montre ?
Focalisation externe, il àn’y a qu’un point de vue,
celui du spectateur.

b. Ce roman naturaliste (? voir fiche 4) a pour ambition
de faire connaître au lecteur un milieu particulier :
celui des marchands des Halles. En quoi cette focalisa­
tion permet-elle de le faire ?
Elle donne le sentiment d’objectivité, de neutralité,
montre sans juger.

BIS/© Arch. Larbor.

5 a. Quelle est la focalisation dans chaque

© Photo Josse/Leemage.

Le regard du peintre
œuvre ? Que souligne-t-elle ?

La Classe de danse : on est hors de la salle,
en focalisation externe


L’Étoile : on voit la danseuse depuis la salle,
en focalisation interne du point de vue du
spectateur (y compris ce que le spectateur
devine des coulisses)


b. Quelle image des danseuses chacune des
œuvres offre-t-elle ?
Dans le premier, les danseuses sont désacralisées, voire disgracieuses (poses légè-

Edgar Degas (1834-1917), à gauche : La Classe de Danse (entre 1871 et 1874),
et à droite : L’Étoile (vers 1876), huiles sur toile, musée d’Orsay, Paris.

rement vulgaires à gauche) ;
le second au contraire montre la dimension presque magique de la danseuse étoile… jusqu’à ce qu’on repère les pieds
derrière le décor.



VERS LE BAC ? L’écriture d’invention

Vous décrirez la charcuterie de Lisa (exercice 4) en variant la focalisation : du point de
vue de Lisa, du point de vue d’une cliente, du point de vue d’un charcutier concurrent.
L’un de ces textes utilisera l’énonciation à la première personne.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

6 La double énonciation
«

 Deux hommes entrèrent par la scène, bien en colère, puisqu’ils parlaient assez fort
pour que dans cette salle où il y avait plus de mille personnes on distinguât toutes leurs paroles. 

»

(Marcel Proust, À l’Ombre des jeunes filles en fleurs, 1919)

Découvrir
1 Zerbinette. – Mais le mal de l’affaire était que mon

amant se trouvait dans l’état où l’on voit très souvent la
plupart des fils de famille, c’est-à-dire qu’il était un peu
dénué d’argent ; et il a un père, qui, quoique riche, est un
5 avaricieux fieffé1, le plus vilain homme du monde. Attendez. Ne me saurais-je souvenir de son nom ? Haye2. Aidezmoi un peu. Ne pouvez-vous me nommer quelqu’un de
cette ville qui soit connu pour être avare au dernier point ?
Géronte. – Non.
10 Zerbinette. – Il y a à son nom du ron... ronte. Or...
Oronte. Non. Gé... Géronte ; oui Géronte justement ;
voilà mon vilain, je l’ai trouvé, c’est ce ladre3-là que je dis.
Molière, Les Fourberies de Scapin, III, 3, 1671.

1. Avare incorrigible. – 2. Hé ! – 3. Autre mot pour avare.

a. À qui s’adresse Zerbinette ? À Géronte.
b. Selon vous, Zerbinette sait-elle qu’elle s’adresse
à Géronte ? Les spectateurs le savent-ils ?
Elle ne le sait pas, les spectateurs, si. C’est ce qui
est amusant.


c. Qui comprend de qui elle parle ?
Géronte et les spectateurs, mais pas elle.


d. Qui va rire de la situation ?
Les spectateurs seuls


Retenir
?? Au

théâtre, on appelle double énonciation le fait
que les person­nages échangent des paroles qui visent
deux des­ti­nataires : un autre personnage (1er niveau
de l’énon­ciation) et le public lui-même (2e niveau de
l’énonciation).

?? La

double énonciation permet :

• aux spectateurs :
– d’être informés de la situation ;
– de comprendre les malentendus, les mensonges,
les quiproquos ;
– d’en savoir toujours plus que le personnage.
• à l’auteur :
de faire passer son message (politique, social…) au public.

?? C’est

une convention théâtrale. En effet, le personnage
est censé ignorer la présence des spectateurs qui
écoutent : un « quatrième mur » invisible les lui cache.

Analyser et interpréter
Double énonciation et jeu sur les personnages

2 Béralde. – Moi, mon frère, je ne prends point à

tâche1 de combattre la médecine, et chacun, à ses
périls et fortune, peut croire tout ce qu’il lui plaît.
Ce que j’en dis n’est qu’entre nous, et j’aurais sou5 haité de pouvoir un peu vous tirer de l’erreur où
vous êtes ; et pour vous divertir, vous mener voir
sur ce chapitre quelqu’une des comédies de Molière.
Argan. – C’est un bon impertinent que votre
Molière avec ses comédies, et je le trouve bien
10 plaisant d’aller jouer2 d’honnêtes gens comme les
médecins.
Béralde. – Ce ne sont point les médecins qu’il
joue, mais le ridicule de la médecine. […]
Argan. – Si j’étais que des médecins, je me venge15 rais de son impertinence, et quand il sera malade,
je le laisserais mourir sans secours.
Molière, Le Malade imaginaire, III, 3, 1673.

1. Je n’essaie pas. – 2. Se moquer de.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Qui écrit le texte ? Molière
b. TICE Recherchez qui jouait le rôle d’Argan lors de
la première représentation du Malade imaginaire, en 1673.
Molière lui-même.

c. Qui s’adresse à qui dans la pièce ?
Argan à Béralde et Béralde à Argan.

d. De qui parle le texte ? De Molière.
e. Quel effet cette double énonciation produit-elle ?
On rit de voir Molière attaqué et défendu par
lui-même.

f. Par ce jeu de double énonciation, Molière rend une des deux
argumentations ridicule : comment ?
En obligeant les spectateurs à s’identifier à Béralde,
Molière rend Argan ridicule. En effet, le spectateur qui voit
une de ses pièves, apprécie Molière.


La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

Double énonciation et tragédie

3 Agrippine, mère du jeune empereur Néron, se plaint à sa

5

confidente de l’accueil que son fils lui a réservé.
Agrippine
J’ignore quel conseil prépara ma disgrâce ;
Quoi qu’il en soit, Néron, d’aussi loin qu’il me vit,
Laissa sur son visage éclater son dépit.
Mon cœur même en conçut un malheureux augure1.
L’ingrat, d’un faux respect colorant son injure,
Se leva par avance, et courant m’embrasser,
Il m’écarta du trône où je m’allais placer.
Depuis ce coup fatal, le pouvoir d’Agrippine
Vers sa chute à grands pas chaque jour s’achemine.
1. Ici, présage.

Jean Racine, Britannicus, I, 1, 1669.

a. Soulignez les termes qui caractérisent Néron :
quel trait en ressort ? la violence.

b. Au XVIIe siècle, tous les spectateurs savaient que
­Néron, devenu adulte, avait sombré dans la folie et fini
par faire assassiner sa mère. Montrez, en relevant les
indices, qu’Agrippine pressent déjà son avenir funeste.
Malheureux augure, il m’écarta du trône ou je m’allais
placer, coup fatal, vers sa chute à grands pas chaque
jour s’achemine : tous ces termes montrent qu’Agrippine
a raison d’avoir peur.Le spectateur en éprouve donc de
la terreur et de la pitié.


Double énonciation et quatrième mur

4 Harpagon (seul sur scène). – C’en est fait, je n’en puis plus,

je me meurs, je suis mort, je suis enterré. N’y a-t-il personne
qui veuille me ressusciter, en me rendant mon cher argent, ou
en m’apprenant qui l’a pris ? Euh ? que dites-vous ? Ce n’est
5 personne. Il faut, qui que ce soit qui ait fait le coup, qu’avec
beaucoup de soin on ait épié l’heure ; et l’on a choisi justement le temps que je parlais à mon traître de fils. Sortons.
Je veux aller quérir la justice, et faire donner la question1 à
toute ma maison ; à servantes, à valets, à fils, à fille, et à moi
10 aussi. Que de gens assemblés ! Je ne jette mes regards sur
personne, qui ne me donne des soupçons, et tout me semble
mon voleur. Eh ? de quoi est-ce qu’on parle là ? de celui qui
m’a dérobé ? Quel bruit fait-on là-haut ? Est-ce mon voleur
qui y est ? De grâce, si l’on sait des nouvelles de mon voleur,
15 je supplie que l’on m’en dise. N’est-il point caché là parmi
vous ? Ils me regardent tous, et se mettent à rire.
Molière, L’Avare, IV, 7, 1668.

1. Faire avouer par la torture.

a. Qui sont les « gens assemblés » dont parle ici
Harpagon dans ce monologue ?
Les spectateurs

b. Cette double énonciation sort du cadre habituel :
pourquoi ?
Parce que le personnage semble conscient de la
présence des spectateurs, il ne respecte plus la
convention du quatrième mur.


c. Soulignez les indices montrant que le personnage
devient fou : en quoi cela explique-t-il cette étran­
geté ?
Devenant fou, le personnage sort du cadre, ici du
quatrième mur.



Double énonciation et mise en scène
© A. Poupeney.

5 a. Qu’est-ce qui, dans l’attitude du comédien, souligne le principe
de la double énonciation ?
Elle a une posture frontale, elle fait face aux spectateurs,.


b. Qu’est-ce qui, dans son regard, permet de maintenir le quatrième mur ?
Elle regarde dans le vide, au-dessus des spectateurs, comme si elle était
seule.

?


La Fleur à la bouche, de L. Pirandello,
avec M. Favory, mise en scène L. Arene,
Comédie-Française, sept. 2013.

VERS LE BAC ? Le commentaire

Vous ferez le commentaire de l’extrait de Britannicus (exercice 3) en vous attachant à analyser
le portrait de Néron et la dimension tragique des propos d’Agrippine ; vous vous appuierez
pour cela sur votre étude de la double énonciation dans cette tirade.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

7 Monologue, tirade et récit
«

 On entend raconter une belle chose : peu à peu la tête s’embarrasse,
les entrailles s’émeuvent, et les larmes coulent. (Diderot, Paradoxe sur le comédien, 1773-1777)

 »

Découvrir
1

Oreste vient de tuer Pyrrhus sur les ordres d’Hermione dont il est amoureux : il lui rend compte de son acte.
Oreste
Je vous l’avais promis ; et quoique mon courage
Se fît de ce complot une funeste image,
J’ai couru vers le temple, où nos Grecs dispersés
Se sont jusqu’à l’autel dans la foule glissés. […]
5 L’infidèle s’est vu partout envelopper,
Et je n’ai pu trouver de place pour frapper.
Chacun se disputait la gloire de l’abattre,
Je l’ai vu dans leurs mains quelque temps se débattre,
Tout sanglant à leurs coups vouloir se dérober,
10 Mais enfin à l’autel il est allé tomber.
Texte 1

Oreste, seul.
Que vois-je ? Est-ce Hermione ? Et que viens-je
[d’entendre ?
Pour qui coule le sang que je viens de répandre ?
Je suis, si je l’en crois, un traître, un assassin.
Est-ce Pyrrhus qui meurt ? et suis-je Oreste enfin ?
5 Quoi ? j’étouffe en mon cœur la raison qui m’éclaire,
J’assassine à regret un roi que je révère,
Je viole en un jour les droits des souverains,
Ceux des ambassadeurs, et tous ceux des humains,
Ceux même des autels où ma fureur l’assiège :
10 Je deviens parricide, assassin, sacrilège.
Texte 2

Jean Racine, Andromaque, V, 4, 1667.

Jean Racine, Andromaque, V, 3, 1667.

a. Qui s’adresse à qui ? Soulignez les éléments
qui le montrent.
Texte 1 : Oreste à Hermione
Texte 2 : Oreste à lui-même
b. Les deux textes traitent du même événement.
Mais, l’analyse du personnage change selon la situation
d’énonciation : comparez les éléments de même couleur.
Que dit Oreste de son crime, de ses scrupules ? À qui
s’adresse-t-il chaque fois ?

Texte 1 : Oreste est discret sur ses scrupules et se
montre presque objectif sur les faits. Il s’adresse à
Hermione qui a ordonné le meurtre.

Texte 2 : Il s’abandonne à sa douleur, à son dépit car il
comprend qu’Hermione ne l’aimera jamais.

c. Comment désigne-t-on, au théâtre, le texte 1 ? le texte 2 ?
Texte 1 : un récit, sous la forme d’une tirade
Texte 2 : un monologue

Retenir
Nom

Caractéristiques
Discours d’un personnage, seul sur scène et qui se parle
Monologue
à lui-même.
Longue réplique qu’un personnage adresse à un autre
Tirade
personnage.
Tirade ou monologue racontant des faits qui ne sont pas
Récit
montrés sur scène.

Fonction
Présenter les états d’âme, les délibérations
du personnage.
Faire un récit, développer une argumentation,
exprimer des sentiments, confier des secrets.
Insérer des faits contraires à la bienséance ou impossibles
à montrer (mouvements de foules, combat…).

Analyser et interpréter
La tirade

2 À la demande d’Harpagon, son valet lui révèle ce qu’on dit de lui.

5

Maître Jacques. – Monsieur, puisque vous le voulez, je vous
dirai franchement qu’on se moque partout de vous ; qu’on nous
jette de tous côtés cent brocards1, à votre sujet ; et que l’on n’est
point plus ravi, que de vous tenir au cul et aux chausses2, et de
faire sans cesse des contes de votre lésine3. […] Vous êtes la fable
et la risée4 de tout le monde, et jamais on ne parle de vous, que
sous les noms d’avare, de ladre5, de vilain, et de fesse-mathieu6.
Molière, L’Avare, III, 1, 1668.

1. Moqueries. – 2. Se moquer de vous. – 3. Avarice.
4. Le sujet de plaisanteries. – 5. Avare. – 6. Usurier.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Selon vous, quel effet peut produire cette tirade
d’un valet sur son maître ? et sur le spectateur ?
Elle crée un effet de surprise, car la situation
est inversée, le valet fait la leçon au maître.
Elle fait rire le spectateur.

b. Soulignez les termes qui insultent Harpagon :
dans quels buts le valet les emploie-t-il ?
Trois buts : dire ce qu’il a sur le coeur ; montrer
que l’avarice d’Harpagon le coupe de la société,
espérer faire changer Harpagon.

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

Le monologue
a. À qui s’adresse Camille ? Soulignez les termes qui le
montrent. À son coeur, à ses douleurs.

3 Camille vient d’apprendre que son frère a obéi à leur père

et a tué l’homme qu’elle aime, pour satisfaire l’honneur et
la patrie. Elle est seule sur scène.
Camille
Dégénérons1, mon cœur, d’un si vertueux père ;
Soyons indigne sœur d’un si généreux frère :
C’est gloire de passer pour un cœur abattu,
Quand la brutalité fait la haute vertu.
5 Éclatez, mes douleurs : à quoi bon vous contraindre ?
Quand on a tout perdu, que saurait-on plus craindre ?
Pour ce cruel vainqueur n’ayez point de respect ;
Loin d’éviter ses yeux, croissez2, à son aspect ;
Offensez sa victoire, irritez sa colère,
10 Et prenez, s’il se peut, plaisir à lui déplaire.



b. Quels sont les deux sentiments qui la tiraillent ? Lequel
l’emporte sur l’autre ? Elle choisit d’être fidèle à son
amour, et non à sa famille.

c. Encadrez les phrases exprimant des vérités générales :
quelle fonction ont-elles dans la décision de Camille ?
Elles la confortent dans sa décision, elles lui donnent
bonne conscience.

d. Sachant qu’un personnage vertueux lutte contre
ses passions, peut-on dire que Camille est vertueuse ici ?
la colère, la haine, la démesure l’habitent : selon l’es-

Pierre Corneille, Horace, IV, 4, 1640.

thétique classique, elle ne peut être considérée comme

1. Ici : se montrer infidèle à sa famille. – 2. Augmenter, se renforcer.
© BIS/Ph. L. de Selva © arch. Larbor.

vertueuse.

4 a. Quel épisode ce tableau décrit-il ? Aidez-vous de la légende

et du texte de l’exercice 3.
La mort de Camille.

b. Quels éléments du monologue de l’exercice 3 apparaissent ici ?
La violence, la guerre, l’opposition entre Camille et les siens.


?


Jean Duvivier, Le Dernier des Horaces,
le meurtre de Camille, musée de Tessé, Le Mans.

Le récit

5 Agnès, jeune fille innocente, raconte à son tuteur

Arnolphe la rencontre qu’elle a faite avec un jeune
homme. Mais Arnolphe veut secrètement épouser Agnès…
Agnès
J’étais sur le balcon à travailler au frais :
Lorsque je vis passer sous les arbres d’auprès1,
Un jeune homme bien fait, qui rencontrant ma vue,
D’une humble révérence aussitôt me salue.
5 Moi, pour ne point manquer à la civilité2,
Je fis la révérence aussi de mon côté.
Soudain, il me refait une autre révérence.
Moi, j’en refais de même une autre en diligence3 ;
Et lui d’une troisième aussitôt repartant,
10 D’une troisième aussi j’y repars à l’instant.
Il passe, vient, repasse, et toujours de plus belle
Me fait à chaque fois révérence nouvelle.

Molière, L’École des femmes, II, 5, 1662.

1. Proches. – 2. Politesse. – 3. Rapidement.

a. Que raconte Agnès ? Cet événement vous paraît-il
important ? Soulignez les répétitions : y a-t-il beaucoup de
péripéties ?
Elle raconte un échange interminable de révérences : événement sans intérêt en soi, sans péripétie.

b. Selon vous, que ressent Arnolphe en écoutant Agnès ? En
a-t-elle conscience ?
Arnolphe est jaloux et Agnès l’ignore. Elle le torture sans
le savoir.

c. Qu’apprend le spectateur sur Agnès ? sur le problème qui se
pose à Arnolphe ? Quelles sont donc les fonctions de ce récit ?
Agnès est pure et innocente, elle est courtisée ; Arnolphe est
en danger ; ce récit informe donc à la fois sur la rencontre,
la psychologie des personnages et l’intrigue qui se noue.



VERS LE BAC ? L’écriture d’invention

Après le départ de Maître Jacques, Harpagon, scandalisé, se lance dans un monologue où il se défend
des accusations de son valet (exercice 2). Il sort. Maître Jacques revient sur scène et raconte la scène au fils
d’Harpagon. Écrivez, en une dizaine de lignes à chaque fois, le monologue et la tirade correspondants.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

8 Le classicisme : esthétique et règles formelles
« C’est le caractère des grands esprits de faire entendre en peu de paroles beaucoup de choses. »
(La Rochefoucauld, Maximes, 1664)

Découvrir
1

5

Texte 1

Texte 2

Il n’y a que le vraisemblable qui touche dans la tragédie. Et quelle
vraisemblance y a-t-il qu’il arrive en un jour une multitude de
choses qui pourraient à peine arriver en plusieurs semaines ? Il y en
a qui pensent que cette simplicité est une marque de peu d’invention. Ils ne songent pas qu’au contraire toute l’invention consiste
à faire quelque chose de rien.
Jean Racine, Bérénice, Préface, 1670.

a. À qui font référence les termes en jaune ?
Ils font référence aux spectateurs, aux gens du monde,
à la société.

b. À quelles qualités humaines les termes en rose font-ils
référence ? La logique, la cohérence, la raison
c. Quelle conception du beau et du bien est exprimée
par les mots en bleu ? Une conception simple et sobre du

Il faut, parmi le monde, une vertu traitable1,
À force de sagesse on peut être blâmable,
La parfaite raison fuit toute extrémité,
Et veut que l’on soit sage avec sobriété.
Molière, Le Misanthrope, I, 1, 1666.

1. Compatible avec la vie en société.

d. Finalement, quel aspect de l’homme est privilégié
par le classicisme ? Comment s’expliquent alors les règles
de la tragédie évoquées par Racine (? voir fiche 10), en gras
dans le texte 1 ?
C’est la mesure qui guide le comportement de l’homme
qu’on qualifiera d’«?honnête?» au XVIIe siècle : cela
explique les règles liées à la cohérence et la vraisemblance, mais aussi la bienséance.

beau et du bien.

Retenir
?? Le classicisme est un mouvement esthétique du XVIIe siècle

qui repose sur une conception précise de l’homme :
la raison, la mesure, la clarté sont mises en avant. Lié au
souci de l’ordre, qui règne sous la monarchie absolue de
Louis XIV, le classicisme propose le modèle de l’honnête
homme : modéré dans ses passions comme dans sa pensée,
celui-ci souhaite vivre harmonieusement en société.
?? Le théâtre, lieu de l’illusion et de l’artifice (donc contraire à
la raison), s’efforce cependant de se conformer à cette
conception en privilégiant la simplicité, la clarté, le bon
sens.

?? Au

théâtre, on s’efforce de se conformer aux trois grandes
règles du théâtre antique  :
– règle de vraisemblance : il ne s’agit pas de faire vrai,
mais de raconter un événement crédible pour le public ;
– règle de bienséance : il convient de ne pas choquer le
public par des faits pouvant le heurter (meurtres, suicides…),
de conformer le langage des personnages à leur origine
(un roi ne peut avoir le langage d’un valet) ;
– règle des trois unités : de temps (l’action doit se dérouler
en une journée maximum) ; d’action (un sujet central
traité) ; de lieu (dans un espace unique).

Analyser et interpréter
Raison et mesure

2 Cléante fait des reproches à son beau-frère Orgon qui, trompé par Tartuffe, un

hypocrite, ne croit plus du tout à la sincérité des hommes.
Hé bien ! ne voilà pas de vos emportements !
Vous ne gardez en rien les doux tempéraments ;
Dans la droite raison, jamais n’entre la vôtre ;
Et toujours d’un excès vous vous jetez dans l’autre.
5 Vous voyez votre erreur, et vous avez connu
Que par un zèle feint1 vous étiez prévenu2 :
Mais pour vous corriger, quelle raison demande
Que vous alliez passer dans une erreur plus grande,
Et qu’avecque3 le cœur d’un perfide vaurien
10 Vous confondiez les cœurs de tous les gens de bien ?

Molière, Tartuffe, V, 1, 1669.

© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

a. Soulignez les expressions qui
condamnent les exagérations.
b. Quelle qualité classique
Cléante représente-t-il ?
La raison, le sens de la mesure,
des proportions


1. Par une apparence
de grande sincérité.
2. Ici : trompé.
3. Orthographe
pour la métrique.



c. Quel défaut Molière dénoncet-il ici ?
L’excès.


La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

La maîtrise de soi

3 L’empereur Auguste, trahi et menacé par Cinna, l’un de ses

5

proches, se fait violence : au lieu de se venger, il lui pardonne.
Auguste
En est-ce assez, ô ciel ! et le sort, pour me nuire,
A-t-il quelqu’un des miens1 qu’il veuille encor séduire ?
Qu’il joigne à ses efforts le secours des enfers ;
Je suis maître de moi comme de l’univers ;
Je le suis, je veux l’être. Ô siècles, ô mémoire !
Conservez à jamais ma dernière victoire !
Je triomphe aujourd’hui du plus juste courroux2
De qui le souvenir puisse aller jusqu’à vous.

Pierre Corneille, Cinna, V, 1, 1642.

1. De mes proches. – 2. Colère.

a. Soulignez deux termes qui relèvent du champ lexical
de la guerre : contre qui Auguste s’est-il battu ?
Contre lui-même

b. Quels vers montrent la fierté d’Auguste vis-à-vis de
son acte ? Les vers 3 à 8.
c. Quelle valeur du classicisme Auguste incarne-t-il ici ?
Encadrez les termes qui le montrent et justifiez votre
réponse.
Ces vers montrent la maîtrise de soi dont fait preuve
Auguste et le triomphe de la raison sur la passion.



Le triomphe de l’ordre et de la morale sur les dérèglements de la passion

4 À la fin de la pièce, après la mort de son épouse, Phèdre,

5

et celle de son fils Hippolyte, Thésée reste seul et se lamente.
Thésée
Allons, de mon erreur, hélas ! trop éclaircis
Mêler nos pleurs au sang de mon malheureux fils.
Allons de ce cher fils embrasser ce qui reste,
Expier1 la fureur d’un vœu que je déteste2.
Rendons-lui les honneurs qu’il a trop mérités.
Et, pour mieux apaiser ses mânes3 irrités,
Que, malgré les complots d’une injuste famille,
Son amante aujourd’hui me tienne lieu de fille4.

Jean Racine, Phèdre, V, 7, 1677.

1. Payer pour – 2. Thésée a demandé aux dieux de punir son fils,
dont il ignorait l’innocence. – 3. Dans l’Antiquité, âmes des morts.
4. Thésée a adopté Aricie, aimée d’Hippolyte.

a. Soulignez les termes montrant le jugement
de Thésée sur son geste (v. 1 à 4).
b. Quels sont ses projets ?
Rendre hommage à son fils et adopter sa belle-fille,
pour expier les crimes qu’il a commis.


c. Cette fin rétablit-elle un ordre ? En quoi est-ce
classique ?
L’ordre social et la morale seront rétablis, et les
dérèglements de la passion seront terminés.




Classicisme et peinture
BIS/Ph. H. Josse © Arch. Larbor.

5 Quelles caractéristiques du classi­
cisme retrouvez-vous dans ce tableau ?
Observez en particulier les proportions,
l’attitude des personnages, les lignes de
force.
C’est un tableau fondé sur des verticales et des horizontales, aux personnages calmes, sans débordements,
graves ; les couleurs et le décor sont
très sobres et simples, mais pleins de
grandeur. L’équilibre est essentiel, souPhilippe de Champaigne (1602-1674), La Cène, vers 1652,
huile sur toile (1,58 x 2,33 m), musée du Louvre, Paris.

VERS LE BAC ? Initiation à la dissertation

« Le classicisme, c’est la santé ; le romantisme, c’est
la maladie » écrit Goethe dans Maximes et Réflexions
(1833). À partir de vos lectures, vous rédigerez trois
paragraphes qui vont dans le même sens que la première
partie de cette affirmation.

tenu par un sens aigu des proportions.


BILAN ? Le classicisme et le théâtre

Sous la forme d’une carte heuristique (? voir fiche 38)
ou d’un paragraphe rédigé, en vous appuyant sur
les œuvres et les textes classiques que vous avez lus,
donnez les principales caractéristiques du théâtre
classique.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

9 La comédie classique : personnages et société
«

 La comédie a un grand avantage sur la tragédie : c’est de peindre les caractères ;
la tragédie ne peint que les passions.   (Stendhal, Journal, 6 juin 1804)

»

Découvrir
1 Je trouve qu’il est bien plus aisé de se guinder sur1 de grands

sentiments, de braver en vers la Fortune, accuser les Destins, et
dire des injures aux dieux, que d’entrer comme il faut dans le
ridicule des hommes, et de rendre agréablement sur le théâtre
5 les défauts de tout le monde. Lorsque vous peignez des héros,
vous faites ce que vous voulez ; ce sont des portraits à plaisir,
où l’on ne cherche point de ressemblance […]. Mais lorsque
vous peignez les hommes, il faut peindre d’après nature ; on
veut que ces portraits ressemblent ; et vous n’avez rien fait si
10 vous n’y faites reconnaître les gens de votre siècle.
Molière, La Critique de L’École des Femmes, scène 6, 1662.

1. Se rendre intéressant avec.

a. À quel genre Molière oppose-t-il la comédie ?
À la tragédie

Soulignez les termes caractéristiques de ce genre.
b. À partir des termes en bleu, dites quel est le but
de la comédie. Critiquer les défauts des hommes,
en faisant rire.

c. D’après les termes en jaune, qui sont les person­
nages de la comédie ?
Les hommes en général, qu’on pourrait côtoyer, montrés tels qu’ils sont.


Retenir
?? La

comédie classique vise deux objectifs : faire rire et
dénoncer les défauts des hommes (mœurs injustes,
ridicules…). Ses personnages sont donc des
contemporains des spectateurs, issus du monde réel.

?? Elle

se réclame de l’héritage de la comédie antique
(Aristophane, Plaute, Térence).

?? Par son respect des règles de bienséance et de vraisemblance

(? voir fiche 8), la comédie classique se distingue de la farce.

?? Corneille

et Racine ont écrit quelques comédies. Mais
le maître du genre est, bien sûr, Molière.

?? La comédie de Molière prend une dimension sérieuse quand

elle dénonce l’ hypocrisie sociale ou religieuse, mariage forcé,
volonté de séduire des jeunes filles…
?? On distingue ainsi trois types de comédies qui se
combinent parfois :
– d’intrigue : action complexe, riches en péripéties
(Les Fourberies de Scapin) ;
– de caractère : centrée sur un défaut du protagoniste
(L’Avare) ;
– de mœurs : critique d’une mode ou d’un comportement
(Tartuffe).

Analyser et interpréter
La comédie et la nature humaine

2 Philinte s’adresse ici à son ami, Alceste, qui ne supporte pas

5

les mensonges qu’impose la vie sociale.
J’observe, comme vous, cent choses, tous les jours
Qui pourraient mieux aller, prenant un autre cours :
Mais quoi qu’à chaque pas je puisse voir paraître,
En courroux, comme vous, on ne me voit point être ;
Je prends, tout doucement, les hommes comme ils sont,
J’accoutume mon âme à souffrir1 ce qu’ils font.
1. Supporter.

Molière, Le Misanthrope, I, 1, 1666.

Mise en scène de Stéphane Braunschweig,
Théâtre des Bouffes du Nord, 2004, © D.R.

Non, ils sont sérieux.

d. TICE Observez cette photograhie de mise en scène.
• Que voit-on en fond de décor ?

b. De qui parle-t-il ? Soulignez les termes qui le prouvent.

On voit le public, reflété dans un miroir.

Des hommes en général



c. En quoi cette tirade reflète-t-elle l’esthétique classique
(? voir fiche 8) ? Elle fait la critique de la société, des

• Que signifie, selon vous, ce dispositif ?

défauts humains, mais propose un idéal de mesure car

directement concerné, que la pièce est actuelle.

Philinte est un honnête homme.



a. Les propos de Philinte sont-ils comiques ?

© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Que le public est partie prenante de la pièce, qu’il est

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

La mise en scène de la bêtise des hommes

3 Monsieur Jourdain, riche bourgeois, prend des cours pour

5

devenir un gentilhomme instruit. Son maître de philosophie commence par les voyelles.
Maître de philosophie. – La voix O se forme en rouvrant les mâchoires, et rapprochant les lèvres par les
deux coins, le haut et le bas : O.
Monsieur Jourdain. – O, O. Il n’y a rien de plus juste.
A, E, I, O, I, O. Cela est admirable ! I, O, I, O.
Maître de philosophie. – L’ouverture de la bouche fait
justement comme un petit rond qui représente un O.
Monsieur Jourdain. – O, O, O. Vous avez raison, O.
Ah ! la belle chose, que de savoir quelque chose !
Molière, Le Bourgeois gentilhomme, II, 4, 1670.

a. Soulignez les expressions qui montrent la bêtise
de M. Jourdain.
b. Lisez à haute voix les répliques de M. Jourdain :
quel effet sonore produisent-elles ?
Elles ressemblent à des sons inarticulés,.

c. M. Jourdain a ici toutes les caractéristiques
du personnage de comédie : lesquelles ?
Il est sot, ridicule et se laisse tromper.


d. Que pense Molière des hommes voulant se hisser
au-dessus de leur condition sociale ?
Ils se ridiculisent souvent.

Une satire de la société
a. Quels sont, selon Cliton, les défauts des Parisiens ?

4 Cliton

5

Connaissez mieux Paris, puisque vous en parlez :
Paris est un grand lieu plein de marchands mêlés ;
L’effet n’y répond pas toujours à l’apparence1,
On s’y laisse duper2 autant qu’en lieu de France3 ;
Et parmi tant d’esprits, plus polis et meilleurs,
Il y croît des badauds4 autant et plus qu’ailleurs.
Pierre Corneille, Le Menteur, I, 1,1644.

1. La réalité ne correspond pas aux apparences.
2. Tromper. – 3. Que n’importe où en France.
4. On y trouve (« il y pousse ») des gens naïfs.

Ils sont crédules et se fient aux apparences.

Soulignez les expressions qui le montrent.
b. Un milieu social est-il davantage concerné ?
Les gens ordinaires, les gens d’esprit, tout Paris : tous
les milieux sont concernés.

c. Quel type de personnage est prévisible ici ?
Aidez-vous du titre de la pièce.
Le personnage du menteur, construit sur la duperie,
la tromperie.

Comédie et langage

5 Valère. – Oui, Monsieur, je crois que vous serez satis-

fait : et nous vous avons amené le plus grand médecin
du monde.
Lucas. – Oh morguenne, il faut tirer l’échelle après
5 ceti-là1 : et tous les autres, ne sont pas daignes de li
déchausser ses souillez2.
Valère. – C’est un homme qui a fait des cures3 merveilleuses.
Lucas. – Qui a gari des gens qui estiant morts.
10 Valère. – Il est un peu capricieux, comme je vous ai dit :
et parfois, il a des moments où son esprit s’échappe, et
ne paraît pas ce qu’il est.
Lucas. – Oui, il aime à bouffonner, et l’an dirait par fois,
ne v’s en déplaise qu’il a quelque petit coup de hache à
15 la tête.
Molière, Le Médecin malgré lui, II, 1, 1666.

1. On ne trouvera pas mieux que cet homme-là.
2. Dignes de lui ôter les souliers. – 3. Guérisons.

VERS LE BAC ? Inititation à la dissertation

Vous discuterez cette affirmation de Molière dans la préface
de Tartuffe (1669) : « Les plus beaux traits d’une sérieuse
morale sont moins puissants, le plus souvent, que ceux de la
satire ; et rien ne reprend mieux la plupart des hommes que
la peinture de leurs défauts. »

a. Quelle est, selon vous, la classe sociale de chaque
personnage ? Quels éléments le démontrent ?
Valère : s’exprime bien, instruit, classe sociale supé
rieure.

Lucas : parle un français déformé, c’est un serviteur,
il vient d’un milieu populaire.

b. Soulignez les expressions appartenant à la langue
populaire. Quelles sont les déformations principales ?
Des déformations phonétiques et grammaticales.


c. Ce que dit Lucas est-il différent de ce que dit ­Valère ?
D’où vient le comique ?
Lucas répète les propos de Valère en les déformant, en
les traduisant en images concrètes et hyperboliques,
caricaturales, dans une langue populaire.


BILAN ? La comédie classique

Sous la forme d’un paragraphe rédigé, en
vous appuyant sur des exemples tirés des textes
que vous avez lus, dites quelles sont les caracté­
ristiques de la comédie classique.

© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

10 La tragédie : personnages et contraintes

« Cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie. » (Jean Racine, préface de Bérénice, 1670)
Découvrir
1

5

Texte 1 Pour obéir à la loi romaine, Titus, devenu empereur, doit quitter Bérénice, reine de Palestine, qu’il aime.
Titus, seul.
Soutiendrai-je ces yeux1 dont la douce langueur
Sait si bien découvrir les chemins de mon cœur ?
Quand je verrai ces yeux armés de tous leurs charmes,
Attachés sur les miens, m’accabler de leurs larmes,
Me souviendrai-je alors de mon triste devoir ?
Pourrai-je dire enfin : « Je ne veux plus vous voir ? »
Je viens percer un cœur que j’adore, qui m’aime ;
Et pourquoi le percer ? Qui l’ordonne ? Moi-même.
Jean Racine, Bérénice, IV, 4, 1670.

1. Ceux de Bérénice.

a. D’après les expressions en jaune dans ces textes,
quelles sont les caractéristiques du héros tragique ?
Un héros pris au piège de sa destinée, se débattant, en

Texte 2 Racine présente sa pièce Phèdre et son personnage
principal, reine mythique passionnément amoureuse du fils
de son mari.
Ce caractère […] a toutes les qualités qu’Aristote1 demande
dans le héros de la tragédie, et qui sont propres à exciter
la compassion et la terreur. En effet, Phèdre n’est ni tout
à fait coupable, ni tout à fait innocente : elle est engagée,
5 par sa destinée et par la colère des dieux, dans une ­passion
illégitime dont elle a horreur toute la première : elle fait
tous ses efforts pour la surmonter : elle aime mieux se laisser mourir que de la déclarer à personne ; et lorsqu’elle est
forcée de la découvrir, elle en parle avec une confusion qui
10 fait bien voir que son crime est plutôt une punition des
dieux qu’un mouvement de sa volonté.
Jean Racine, Phèdre, préface, 1677.

1. Philosophe grec antique, théoricien du théâtre.

vain, contre sa passion.

c. Quels sont les excès de Phèdre que Racine expose dans
le texte 2 ? Encadrez les mots qui le montrent.



Les excès de passion, la violence, son crime (aimer son



beau-fils, Hippolyte).

b. Quelle est la classe sociale des personnages ?

d. Selon vous, quel est le dénouement annoncé
de Phèdre ? La mort de l’héroïne.

Reine et empereur

Retenir
?? Conformément

à son modèle antique, la tragédie
classique a pour fonction de provoquer la terreur
et la pitié pour faire réfléchir l’homme à sa condition
mortelle.
?? Les héros tragiques sont pleins de grandeur : de condition
supérieure (rois, héros, voire fils de dieux), ils sont
occupés de problèmes d’État, de vie ou de mort ;
leurs passions sont dévorantes. Leur registre de langue
est toujours soutenu.

?? Mais

le classicisme veut aussi que la tragédie soit
crédible : elle doit répondre à la règle des trois unités
(un lieu, une journée, une intrigue), à la règle de
la vraisemblance (les personnages doivent être cohérents
dans leurs actes) et à celle de la bienséance (pas d’actes
choquants ou violents montrés sur scène). ? voir fiche 8
?? La tragédie, la plupart du temps en alexandrins, le vers
jugé le plus noble, utilise le registre tragique.

Analyser et interpréter
Temps et destin

2 Le frère et l’amant de Camille doivent s’affronter pour

5

mettre un terme à la guerre. C’est Camille qui parle.
Vit-on jamais une âme en un jour plus atteinte
De joie et de douleur, d’espérance et de crainte,
Asservie en esclave à plus d’événements,
Et le piteux jouet de plus de changements ?
Un oracle m’assure, un songe me travaille ;
La paix calme l’effroi que me fait la bataille ;
Mon hymen1 se prépare, et presque en un moment
Pour combattre mon frère on choisit mon amant […]
1. Mariage.

© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Pierre Corneille, Horace, IV, 4, 1640.

a. Combien de temps s’est écoulé depuis le début
des événements racontés ? Un jour
b. À quelle règle ce passage correspond-il  ?
Il concentre en un jour les événements : unité de temps.


c. Soulignez les sujets grammaticaux des vers 5 à 8 :
qui agit ? Encadrez les pronoms personnels qui renvoient
à Camille. Quelle est leur fonction ?
Ce sont les événements qui agissent, Camille subit toutes
les actions : me et m’ sont compléments d’objet.


La tragédie et la comédie au XVIIe siècle : le classicisme

Le dénouement tragique

3

5

Texte 1 Oreste apprend qu’Hermione, qu’il aime, vient
de se suicider pour suivre Pyrrhus dans la mort.
Oreste
Grâce aux dieux ! Mon malheur passe mon espérance !
Oui, je te loue, ô ciel, de ta persévérance !
Appliqué sans relâche au soin de me punir,
Au comble des douleurs tu m’as fait parvenir.
Ta haine a pris plaisir à former ma misère ;
J’étais né pour servir d’exemple à ta colère,
Pour être du malheur un modèle accompli.

Junie poursuivie par César (Néron) qui l’aime et
qui vient de tuer son amant, se fait vestale ; Albine raconte.
Albine
Pour accabler César d’un éternel ennui,
Madame, sans mourir elle est morte pour lui. […]
(Le peuple accompagne Junie qu’il prend en pitié et protège)
Ils la mènent au temple, où depuis tant d’années
Au culte des autels nos vierges destinées
Gardent fidèlement le dépôt précieux
Du feu toujours ardent qui brûle pour nos dieux.

Texte 2

5

Jean Racine, Andromaque, V, 5, 1667.

a. Ces deux tragédies se terminent-elles par la mort
de tous les personnages ?
Non, certains survivent.

b. Soulignez les expressions qui rappellent le sacré.
c. Encadrez celles qui marquent le caractère exemplaire
de la fin tragique.

Jean Racine, Britannicus, V, 8.

d. Relevez deux hyperboles dans le texte 2 :
en quoi ces éléments du registre tragique reprennent-ils
des caractéristiques de la tragédie classique ?
Éternel ennui, au comble des douleurs suscitent compassion et terreur, montrent la grandeur des personnages
en respectant la bienséance.

Politique et grandeur

4 L’empereur Auguste a fait exécuter Toranius, le père d’Émilie, qu’il

5

considère désormais comme sa fille. Amoureuse de Cinna, celle-ci
lui demande de venger son honneur en tuant Auguste. Cinna, aidé
de son ami Maxime, organise alors un complot…
Maxime
Je veux voir Rome libre.
Cinna

Et vous pouvez juger
Que je veux l’affranchir1 ensemble et la venger.
Octave2 aura donc vu ses fureurs assouvies,
Pillé jusqu’aux autels, sacrifié nos vies,
Rempli les champs d’horreur, comblé Rome de morts,
Et sera quitte3 après pour l’effet d’un remords ! […]
Vengeons nos citoyens, et que sa peine étonne4
Quiconque après sa mort aspire à la couronne.
Pierre Corneille, Cinna, II, 2, 1643.

a. De quelle ville, de quel sujet et de quel homme
les personnages parlent-ils ?
D’Octave, empereur, de Rome, du régime politique.


b. Quel semble être le sujet principal de la pièce ?
Soulignez les expressions qui le montrent.
C’est un problème de politique très sérieux qui
engage la responsabilité des puissants. Il s’agit
donc bien d’un sujet tragique.





1. Ici : la libérer de la tyrannie. – 2. Successeur de César à la tête de l’Empire romain, il prendra le titre d’Auguste. – 3. Sera pardonné. – 4. Ébranle.

Classicisme et mise en scène

5

TICE Regardez un extrait de Phèdre, de Racine (acte II,

scène 5), mis en scène par P. Chéreau (théâtre de l’Odéon,
2003) : http://www.youtube.com/watch?v=tVojvGK7wHM.
a. Comment Chéreau souligne-t-il la puissance du destin

b. En quoi a-t-il tenu compte des commentaires de Racine
dans sa préface (voir exercice 1) ? Citez les termes de Racine.
Elle n’est « ni tout à fait coupable, ni tout à
fait innocente », « parle » « avec confusion » d’une

et de la passion sur l’héroïne ? Elle regarde le ciel, puis

passion « dont elle a horreur toute la première ».

la terre, elle est égarée, perdue, elle se déplace de



façon irrégulière, recule, tente de fuir.



VERS LE BAC ? Initiation à la dissertation

Pensez-vous que la tragédie classique soit un genre
dépassé, qui ne concerne plus le spectateur ou le lecteur
d’aujourd’hui ? Vous vous appuierez sur vos lectures et
les représentations que vous connaissez pour répondre.

BILAN ? Écrire un paragraphe argumenté
Au-delà des règles, donnez les caractéristiques
de la tragédie classique en un paragraphe rédigé
et appuyé sur des exemples.

© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

La poésie du XIXe au XXe siècle : du romantisme au surréalisme

11 La versification

« J’ai disloqué ce grand niais d’alexandrin » (Victor Hugo, « Quelques mots à un autre », Les Contemplations, 1856)
Découvrir
1 Le poète

5

Le mal dont j’ai souffert / s’est enfui comme un rêve.
Je n’en puis comparer / le lointain souvenir
Qu’à ces brouillards légers / que l’aurore soulève,
Et qu’avec la rosée / on voit s’évanouir.
La muse
Qu’aviez-vous donc, ô mon poète !
Et quelle est la peine secrète
Qui de moi vous a séparé ? […]
Musset, La Nuit d’octobre, 1840.

a. Comptez les syllabes dans la strophe du poète puis dans
celle de la Muse. Nommez les mètres.
Poète : 12 syllabes = alexandrins
Muse : 8 syllabes = octosyllabes
b. Encadrez les rimes des vers 1 à 6 et précisez leur organi­
sation. Rimes croisées (abab) et suivies (cc)
c. Lisez la 1re strophe en marquant une légère pause aux
endroits indiqués par une barre oblique. Quel est le rythme
créé ? 6/6
d. Pourquoi, selon vous, les deux personnages
ne s’expriment-ils pas dans le même mètre ?
Le poète fait un récit lent et long. La Muse est plus inquiète, sa parole est plus brève.

Retenir

est l’ensemble des techniques propres à la poésie traditionnelle et à tous les textes
en vers (théâtre, épopée, roman en vers, fables…). En voici les principaux procédés :

?? La versification

Vers
Rime
Strophe
Mètre
Coupe
Césure
Enjambement
Rejet
Contre-rejet
« e » muet
Diérèse

Unité rythmique, qui commence traditionnellement par une majuscule, à l’écrit.
Répétition de sons, d’un vers à l’autre : suivies ou plates (aabb), croisées (abab), embrassées (abba).
Ensemble de vers, en nombre varié, qui constituent des unités de sens
Nombre de syllabes d’un vers, souvent pair : l’hexasyllabe (6 syllabes), l’octosyllabe (8 syllabes),
le décasyllabe (10 syllabes), l’alexandrin (12 syllabes). Il existe toutefois des vers impairs.
Dans un vers, pause liée au sens ou à la ponctuation.
Coupe principale d’un vers. En poésie classique et jusqu’aux romantiques, l’alexandrin a une césure
entre les deux hémistiches (demi-vers).
Débordement de la phrase ou de la proposition au-delà de la longueur du vers.
Élément d’une phrase placé au début du vers suivant.
Détachement à la rime du vers précédent, d’un mot du vers suivant.
Placé en fin de vers ou devant une voyelle, il ne se prononce pas ni ne compte dans le nombre des syllabes.
Prononciation en deux syllabes de deux voyelles successives (li/on).

Analyser et interpréter
L’alexandrin dans le théâtre classique

2 Néron a fait emprisonner Junie ; il raconte à son confi-

dent comment, en la voyant, il en est tombé amoureux.
Que veux-tu ?| Je ne sais si cette négligence1,
Les ombres,| les flambeaux, les cris et le silence,
Et le farouche aspect de ses fiers ravisseurs,
Relevaient de ses yeux les timides douceurs,
5 Quoi qu’il en soit,| ravi d’une si belle vue,
J’ai voulu lui parler, et ma voix s’est perdue :
Immobile,| saisi d’un long étonnement,
Je l’ai laissé passer dans son appartement.
J’ai passé dans le mien. C’est là que, solitaire,
10 De son image en vain j’ai voulu me distraire2.
1. Celle d’avoir vu Junie.
2. Délivrer.
© Nathan 2015 – Photocopie non autorisée.

Jean Racine, Britannicus, II 2, 1669.

a. Marquez d’une barre les coupes, d’une double barre
les césures des vers ; que remarquez-vous par rapport
à la ponctuation ?
Les coupes sont toutes liées à la ponctuation,.

b. TICE Regardez l’enregistrement suivant : https://
www.youtube.com/watch?v=qaMKDQCfo0Q Le comé­
dien marque-t-il les césures ? Pourquoi selon vous ?
Il cherche à rendre à l’alexandrin sa souplesse en soulignant plutôt les coupes.

c. Qu’est-ce qui explique le choix de l’alexandrin
pour le théâtre plutôt que d’autres mètres ?
Il permet, par sa longueur, un effet de solennité et de
régularité, à l’image de la pensée de Néron qui avance
peu à peu dans sa découverte du sentiment amoureux .

La poésie du XIXe au XXe siècle : du romantisme au surréalisme

Versification et romantisme

3 Nous marchions sans parler, dans l’humide gazon,

5

Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes1,
Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des Landes,
Nous avons aperçu les grands ongles marqués
Par les loups voyageurs que nous avions traqués.
Nous avons écouté, retenant notre haleine
Et le pas suspendu. – Ni le bois, ni la plaine
Ne poussait un soupir dans les airs ; seulement
La girouette en deuil criait au firmament. […]

L’alexandrin

b. Lisez oralement les vers 1 à 5 en soulignant la régularité
du rythme. Quels champs lexicaux sont valorisés ?
Les champs lexicaux de l’ouïe, de la forêt.

c. Relevez dans les vers 6 à 9 :
– un contre-rejet : vers 8-9
– un rejet  : vers 6-7
d. À quoi correspondent ces changements de rythme ?

A. de Vigny, « La Mort du Loup », Les Destinées, 1864.

1. Terres plantées d’arbustes.

a. Encadrez les « e » muets ». Quel mètre a été choisi ?

À l’arrêt de la marche et à l’écoute des sons ; à la mise
en valeur des éléments significatifs

Le vers impair
a. Comptez les syllabes : que remarquez-vous ?

4 Je ne sais pourquoi

5

Les vers sont irréguliers, presque tous impairs.

Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m’est cher,
D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots.
[Pourquoi, pourquoi ?

b. Relevez un enjambement. Vers 1 à 2
c. Soulignez les termes qui suggèrent le déséquilibre et le mouve­
ment. En quoi le mètre choisi traduit-il ces notations ?
Le vers impair, déséquilibré, suggère le flottement du poète

Paul Verlaine, Sagesse, 1881.

entre ciel et mer, sans point d’appui.

Les jeux sur le mètre

5 Les djinns1

5

Murs, ville,
Et port.
Asile
De mort,
Mer grise
Où brise2
La brise,
Tout dort.

Dans la plaine
Naît un bruit.
C’est l’haleine
De la nuit.
Elle brame3
Comme une âme
15 Qu’une flamme
Toujours suit !
10

La voix plus haute
Semble un grelot.
D’un nain qui saute
20 C’est le galop.
Il fuit, s’élance,
Puis en cadence
Sur un pied danse
Au bout d’un flot.
Victor Hugo,
Les Orientales, 1829.

1. Génies ou démons de la tradition maghrébine.
2. Terme de marine signifiant « où vient se heurter ».
3. Cri du cerf, aux tonalités perçues comme mélancoliques.

a. Qu’a de particulier le mètre dans ce début de
poème ? Que constatez-vous d’une strophe &...

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