Lautréamont

« 1 / 2 Lautréamont Préface à un livre futur: tel est le sous-titre de Poésies ; tel est, si l'on en croit le retentissement si longuement différé, des Chants de Maldoror, le statut de l'œuvre ducassienne dans son entier.

Préface à un livre futur, ou mieux : à un livre qui jamais ne sera écrit.

De cet échec - s'il est permis de nommer ainsi la butée qui fatalement fait barrage à une entreprise inhumaine-, la preuve est, durant plus de trois quarts de siècle, administrée par la résistance de la critique.

Inutile d'insister sur ceux qui se tranquillisent en donnant Lautréamont pour un «épateur» ou un «fumiste»; tel critique, tout récemment encore, demandant si l'on avait «lu Lautréamont», n'a-t-il pas tenté de réduire les Chants à un simple accès de« bouffonnerie» ? Il y eut aussi la thèse de l'aliénation : Isidore Ducasse «mort dans un cabanon» (Léon Bloy); un poète dont« la conscience s'en va peu à peu au fil du livre» (Rémy de Gourmont).

Ici également la thèse est têtue : il y a dix ans, on décelait encore, matériel scientifique à l'appui, chez ce malheureux poète, tous les «signes d'une schizophrénie particulièrement typique».

La sécurité que dispensent au public cultivé ces procédures explicatives a permis au moins à l'œuvre de voir le jour.

Une fois lâchée, elle demeura naturellement soumise à une surveillance; et c'est là que se multiplièrent les tentatives de réduction, dont on ne peut éviter de faire le bilan. 2 / 2. »