« La Charge des cuirassiers de Waterloo », Les Misérables, 1862 - Bac de français

« SUJET : LES MISERABLES DE VICTOR HUGO (1802-1885).Ç La Charge des cuirassiers de Waterloo È, Les MisŽrables, 1862.Alors on vit un spectacle formidable.Toute cette cavalerie, sabres levŽs, Žtendards et trompettes au vent, formŽe en colonnes par division, descendit, dÕun mme mouvement et comme un seul homme, avec la prŽcision dÕun bŽlier de bronze qui ouvre une brche, la colline de la Belle-Alliance, sÕenfona dans le fond redoutable o tant dÕhommes dŽjˆ Žtaient tombŽs, y disparut dans la fumŽe, puis, sortant de cette ombre,reparut de lÕautre c™tŽ du vallon, toujours compacte et serrŽe, montant au grand trot, ˆ travers un nuage de mitraille crevant sur elle, lՎpouvantable pente de boue du plateau de Mont-Saint-Jean.Ils montaient, graves, menaants, imperturbables, dans les intervalles de la mousqueterie et de lÕartillerie, on entendait ce piŽtinement colossal.

ƒtant deux divisions, ils Žtaient deux colonnes ; la division Wathier avait la droite, la division Delord avait la gauche.

On croyait voir de loin sÕallonger vers la crte du plateau deux immenses couleuvres dÕacier.

Cela traversa la bataille comme un prodige.Rien de semblable ne sՎtait vu depuis la prise de la grande redoute de la Moskowa par la grosse cavalerie ; Murat y manquait, mais Ney sÕy retrouvait.

Il semblait que cette masse Žtait devenue monstre et nÕežt quÕune ‰me.

Chaque escadron ondulait et se gonßait comme un anneau du polype.On les apercevait ˆ travers une vaste fumŽe dŽchirŽe ˆ et lˆ.

Ple-mle de casques, de cris, de sabres, bondissement orageux des croupes des chevaux dans le canon et la fanfare, tumulte disciplinŽ et terrible ; lˆ-dessus les cuirasses, comme les Žcailles sur lÕhydre.Ces rŽcits semblent dÕun autre ‰ge.

Quelque chose de pareil ˆ cette vision apparaissait sans doute dans les vieilles ŽpopŽes orphiques racontant les hommes-chevaux, les antiques hippanthropes, ces titans ˆ face humaine et ˆ poitrail Žquestre dont. »