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Frédéric Mistral par André Berry

Publié le 23/05/2020

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MISTRAL Frédéric. Écrivain français, de langue provençale. Né au mas du Juge à Maillane (Bouches-du-Rhône) le 8 septembre 1830, mort à Maillane le 25 mars 1914. Ses parents étaient de petits propriétaires terriens provençaux. Sa mère n’avait guère plus de vingt ans quand il naquit, son père près de soixante. Il fit ses études au college royal d’Avignon, dont il sortit bachelier en 1847, puis ses études de droit à la Faculté d’Aix où il passa sa licence en 1851. Dès le collège, il traduisait en langue provençale les Psaumes de la pénitence, et s’était lié avec un répétiteur, Joseph Roumanille, fils d’un jardinier de Saint-Rémy. Alors que la révolution de 1789 et le règne de Napoléon avaient instauré en France un régime de centralisation administrative complet, Roumanille, la Restauration venue, rêvait de rendre ses lettres de noblesse à la langue provençale officiellement bannie, depuis l’ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539. Poètes, ouvriers ou paysans, auteurs d’essais grammaticaux s’y essayaient mais ne parvinrent pas à faire le succès des assemblées littéraires que Roumanille réunit à Arles en 1852 et a Aix en 1853 (Zola, âgé de treize ans, assistait à celle-là). Décidé à ne pas quitter le mas paternel, Mistral se fit remarquer dès 1851 par sa collaboration (dix poèmes) aux Provençales, recueil collectif de vers, et il entreprit aussitôt d’écrire une épopée en plusieurs chants : Mireille , qui ne vit le jour que beaucoup plus tard. Des relations d’amitié et de bon voisinage le liaient à de jeunes intellectuels, eux aussi épris du renouveau des lettres provençales, et en particulier à l’imprimeur Théodore Aubanel, qui appartenait à une vieille famille bourgeoise d’Avignon. Le 21 mai 1854, fête de la Sainte-Estelle, « en pleine lumière de la vie et de l’air », Roumanille, Mistral, Aubanel et quatre autres littérateurs provençaux se réunirent au domicile de Font-Ségugne, près du village de Gadagne, et décidèrent de fonder une école littéraire. Mistral se souvint d’un vieux récitatif de saint Anselme qui évoquait « les sept félibres de la loi » discutant au Temple avec Jésus. Il baptisa les sept compagnons « félibres », sans que l’on puisse connaître exactement l’étymologie ni la signification du mot. Le « félibrige » prit le chiffre sept comme nombre sacré, sainte Estelle pour patronne, et Mistral jura d’écrire sa « Loi ». A la mort de son père en 1855, le mas du Juge passa à son frère aîné, et lui-même alla habiter avec sa mère la maison d’en face, dite du « Lézard » à cause du petit reptile de pierre qui en surmontait le seuil. Il collabora activement à 1’Almanach provençal, recueil annuel du groupe, contenant des contes et des poèmes, et destiné à régénérer la langue, à établir surtout des règles précises d’orthographe, le provençal n’étant plus guère que dialecte parlé. Dans le même dessein, Mistral entreprit un vaste travail linguistique et lexicographique, qui aboutit en 1878 à la publication, à ses frais, du Trésor du félibrige, dictionnaire provençal-français extrêmement copieux. Mireille, enfin lue en public, à Marseille, le 29 octobre 1858, éditée en 1859 par Roumanille, vivement louée par Lamartine, connut à Paris même un vif succès. Entre les ténèbres, le spleen des Fleurs du mal (1857) et la force épique et chevaleresque de La Légende des siècles (1859), on eut plaisir à saluer ce poème de lumière et d’amour. Son succès fut plus vif encore lorsqu’en 1864 Gounod, avec la collaboration de Mistral, en fit le thème d’un opéra-comique. En 1867, après n’avoir effectué dans la capitale que de brefs séjours, Mistral publia Calendal , qui a pour théâtre la « Provence orientale ». Il s’était lié d’amitié avec Alphonse Daudet, de dix ans son cadet, et servit de témoin à son mariage. Lorsqu’on 1862 le neveu de Mistral se suicida au mas du Juge par désillusion amoureuse, Daudet y puisa le thème de son Arlésienne . Si Saint-René-Taillandier, professeur de la Faculté de Montpellier, servait de tuteur et pour ainsi dire de caution universitaire au félibrige alors en pleine expansion, Mistral était déjà reconnu comme le chef littéraire incontesté du mouvement. En cette qualité, il récita au Peyrou de Montpellier, en août 1867, l'Ode à la race latine. Ce fut au cours de cette inauguration que les poètes catalans, chassés d’Espagne par la Révolution offrirent aux félibres une coupe, véritable Graal félibréen, pour lequel il composa la Coupo Santo, hymne encore à l’honneur chez tous les Provençaux. Le sursaut patriotique, qui remit en vogue les forces provinciales et régionales au lendemain du siège de Paris et de l’invasion, renforça le mouvement félibre, qui célébra le cinquième centenaire de la mort de Pétrarque par de grandes fêtes à Avignon et toutes sortes de manifestations à Marseille, Aix, Arles et Montpellier, où Mistral reçut l’appui des spécialistes des langues romanes, tels Gaston Paris et Michel Bréal. 1876 fut une année particulièrement importante pour Mistral. Il publia, sous le titre Les Iles d’or , un recueil de tous les poèmes composés depuis sa jeunesse, et qui pour beaucoup contient le meilleur de lui-même. Le 21 mai, le félibrige reçut à Avignon une constitution très complète dont Mistral traça les grandes lignes, et qui lui a survécu. Un « capoulié » préside la république félibréenne, dont chaque dialecte provençal constitue une maintenance. Tous les sept ans, les Jeux Floraux rassemblent la nation félibre et leur lauréat, et choisissent la reine du félibrige pour sept ans. En septembre de cette même année, Mistral, âgé de quarante-six ans révolus, épousa à Dijon Renée Louis-Rivière, fille d’un négociant dijonnais d’origine dauphinoise, de vingt-sept ans sa cadette. En 1883, sa popularité avait dépassé de loin la Provence. Le café Voltaire à Paris avait ouvert un livre d’or à sa gloire. Lorsqu’en 1884 il publia Nerte , « poème avignonnais », l'Académie lui fit partager — avec Gustave Droz — le Prix Vitet. Puissamment soutenu par Paul Mariéton, riche Lyonnais devenu félibre fervent, Mistral assista au même moment à l’apothéose parisienne du félibrige. Avec l’appui de nombreux intellectuels de langue romane, il songea même à une sorte de véritable fédération internationale du félibrige, allant du Portugal à la Roumanie. Les dix mille francs du Prix Jean Reynaud, de l’Académie, lui permirent de fonder en 1891, à Avignon, un journal provençal intitulé L’Aïoli. Avec l’aide de Folco de Baroncelli-Javon et Marius André, cette publication parut trois fois par mois pendant sept ans.

Depuis la fin du Second Empire, les tentations politiques n’avaient pas manqué au félibrige, parfois accusé de menées séparatistes par la presse parisienne. Le débat qui se prolongeait dans l’opinion française autour du dilemme monarchie-république renforçait ces tentations que, pour sa part personnelle, Mistral s’efforça de surmonter, ou tout au moins d’arbitrer. En 1878 il dut sacrifier à Roumanille le pieux mais sensuel Aubanel, imprimeur du pape, bizarrement devenu suspect de républicanisme et d’immoralisme aux yeux de la société bourgeoise d’Avignon. Aux élections de 1880, Mistral refusa de se porter candidat des conservateurs monarchistes et de leur parti « usé jusqu’à la corde ». En 1890, année où fut publié La Reine Jeanne , il apparaissait que l’action linguistique du félibrige comportait une part d’illusion et qu’elle ne pourrait aboutir à l’enseignement du provençal dans les écoles primaires; aussi bien en mars 1892, une partie du jeune félibrige se lançait avec Charles Maurras dans l’action politique. Mistral condamna la politisation du félibrige, ne se rallia pas à L’Action française, tout en gardant sa sympathie à la droite de L’Epoque, qui correspondait le mieux à ses efforts de rénovation provençale. Il apporta son appui à la « Ligue de la Patrie française », fut antidreyfusard, anti-combiste, « son amitié pour Maurras ne s’est jamais démentie » (Thibaudet); il refusa, en 1907, de cautionner la rébellion des vignerons montpelliérains contre le pouvoir central. Mais il serait présomptueux de vouloir préciser une doctrine politique de Mistral. A partir de 1900, dans un climat pourtant tout enfiévré par les querelles d’opinions, il allait avec beaucoup de sérénité consacrer sa vieillesse à l’exaltation pacifique des lettres provençales. Déjà, en 1897, avait paru Le Poème du Rhône . Acquéreur d’une grande maison sur la route de Saint-Rémy, recevant courrier, cadeaux et visites de France et de nombreux Pays, Mistral devint alors tel que la postérité l'a durablement retenu : coiffé du large et légendaire chapeau de feutre noir auréolant son noble et fin visage de mousquetaire qu’allongeait la barbiche à l’impériale, cravate nouée lâche sous le col bas, fierté à la fois accueillante et souveraine, un rien de pose dans l’attitude. En 1904, l’année où parurent Mes origines. Mémoires et récits , il reçut la moitié du Prix Nobel, cent mille francs. Il les consacra à installer à Arles le « Museon arlaten », où l’on peut trouver une image totale de la Provence : rustique, pastorale, maritime, fluviale, citadine, artisanale, familiale. Deux ans plus tard, il entreprit, au cimetière de Maillane, de faire édifier son tombeau, copie du pavillon où la reine Jeanne et la princesse des Baux tenaient leur cour d’amour, mais que surmonte la croix au lieu de la pomme de pin. Ce fut à son tombeau qu’il consacra la dernière prière de son dernier recueil de vers, Les Olivades , paru en 1912. L’inauguration pompeuse de sa statue à Arles en 1909, assez médiocre agrandissement d’une figurine de trente centimètres, ne lui causa sans doute qu’une demi-satisfaction : il refusa, quoique dispensé des visites protocolaires, toute candidature à l’Académie Française. Les fêtes félibréennes d’Aix, en mai 1913, lui firent un succès d’apothéose, et en octobre de la même année Raymond Poincaré fit arrêter son train présidentiel près de Maillane pour aller visiter Mistral et l’amener déjeuner à son wagon. Le 18 mars 1914, Mistral sortit pour aller présider au baptême de la cloche de l’église de Maillane dont il avait composé en vers l’inscription votive. Le froid le saisit. Il mourut quelques jours plus tard. En 1926 parut, à titre posthume, Prose d’almanach , et en 1927 Nouvelle Prose d’almanach et Dernière Prose d’almanach . Témoignage de l’émulation qu’il avait suscitée, Mistral laissait au « Museon arlaten » vingt in-folio de coupures de presse, à la bibliothèque d’Avignon cinquante mille lettres de correspondants; douze mille lettres qu’il échangea avec ses amis sont conservées dans les collections privées et publiques du Midi. Sa femme, gardienne vigilante de son souvenir, comme elle l’avait été, de son vivant, de son œuvre, lui survécut jusqu’en 1943. Si l’œuvre écrite de Mistral vit par elle-même durablement et, pour une grande part, sauve en France et hors de France le félibrige du dépérissement, la vie même de Mistral appartient de très près à l’histoire du félibrige. Grand écrivain il fut aussi chef d’école, quoique souvent par son génie et sa personnalité il se plaçât — involontairement — en dehors de cette école. Ainsi il assuma seul une œuvre personnelle très considérable, sans cesser de proclamer qu’il incarnait avant tout la « Causo ». L’épitaphe qu’il a imaginée pour son tombeau exprime parfaitement ce vœu : « Non nobis, Domine, non nobis, sed nomini tuo et Provinciae nostrae da gloriam » [Non pas à nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton nom et à notre Provence, donne la gloire].

« Frédéric Mistral. »

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