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Edvard Grieg

Publié le 16/05/2020

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« Edvard Grieg Petit légèrement contrefait, il porte autour du front le nimbe d'argent de la Norvège.

L'Oeil bleu clair retient le rêve, l'aveude la souffrance aussi, visiteuse, puis compagne de l'âge mûr.

Ce n'est qu'un poeta minor, mais de ceux qui, parce qu'ilsont indissolublement mêlé à leur âme légendes et paysages, résument parfois, en les quelques mesures d'un lied, lecaractère profond d'une race, sa passion, sa nostalgie.

Pour le reste, un lyrique de salon, selon la formule en usage vers lafin de l'autre siècle, un improvisateur, un élégiaque de souffle court.

Incapable de construire, il possède une sensibilité viveet fraîche, l'art de faire tenir une impression en deux accords, la plus rare intuition de ce qui peint ou suggère.

Un amateurde génie, en somme. Son Oeuvre n'est qu'une suite d'états d'âme, un carnet de notes où alternent sensations de nature et motifs populaires,un album d'aquarelles pimpantes.

Rien ne s'y renouvelle, ne s'y développe, mais, sous tant de soupirs heureux, de frissonslimpides, se laisse percevoir la basse continue d'une inguérissable Sehnsucht, d'une morbidezza plutôt, languide etinquiète, qui donne à toutes ces images trop gratuitement pittoresques je ne sais quelle unité tonale, quelle fruste saveurque l'on ne saurait négliger sans injustice.

Grieg avait-il conscience que par cela, par cela seulement, quelque tracedemeurerait de son éphémère réussite ? Il connaissait en tout cas ses limites ; il savait que sa musique n'existait que paret pour les sens.

L'eau, la neige, le froid, les tresses blondes de Solveij, la braise rouge que l'on contemple au fond del'âtre, la ronde des kobolds dans le vent, le printemps frileux et magique, le murmure des sources et l'appel des fées, unefois pour toutes il avait fait de cela son royaume, le décor de son âme superstitieuse et puérile et, dans cette bulle irisée, ilavait enclos le monde menu de son art. Ce n'était pas, pourtant, qu'à l'âge des grandes ambitions il n'eût rêvé d'autre chose.

De conquérir, par exemple, la grandescience oratoire pour la mettre au service de ses dons.

Au Conservatoire de Leipzig, il avait mesuré au prix de quel effort,insurmontable à sa frêle nature, les formes de la musique pure acceptent de faire alliance avec l'invention.

De cetteépreuve, vite renoncée, il avait gardé un souvenir d'effroi, peut-être un remords.

Le travail méthodique, la concentrationde la pensée, ce n'était point là son affaire.

Même les encouragements de Liszt avaient été incapables de le convertir à unrôle qu'il ne pouvait manifestement assumer.

Il est significatif de constater que le poétique concerto de piano, qui est de1865, constitue l'unique contribution du compositeur à une ample tradition pianistique et que, de retour à Christiania, puisà Bergen, Grieg revienne définitivement à la forme de marqueterie musicale qui convient à son impressionnisme inquiet.C'est là sa vocation, la loi modeste et d'ailleurs providentielle de son destin.

La rencontre de Richard Nordraak, ce pèlerinhanté par l'idée d'un art national puisé aux sources de la chanson populaire, puis celle de Kjerulf, autre rhapsode imbu dumême fanatisme, entraînent pour Edvard Grieg des conséquences infiniment plus décisives que l'influence de Mendelssohn,de Schumann, de Gade.

De la commune ferveur de ces trois hommes naît l'École du Nord et c'est au triomphe d'un artdévotement fidèle aux vertus de sa race que Grieg, durement frappé, mais non abattu par la disparition prématurée deses deux amis, se consacre désormais tout entier. Dans quelle mesure a-t-il assuré cet avènement ? Pour répondre à une telle question, il faudrait savoir ce que l'art deGrieg représente aujourd'hui encore pour la Norvège, comme il faudrait savoir ce que Smetana, Dvorák et Suk, musiciens"épisodiques" à nos yeux, symbolisent actuellement pour la Bohême.

Nous avons tendance, injustement peut-être, àimmoler à la gloire du folklore les exploiteurs de celui-ci : ils ne sont que des arrangeurs, adroits à tirer parti, sansscrupule, d'une formule suspecte entre toutes.

Pourquoi montrer tant de sévérité à l'égard de ceux chez lesquels l'habiletén'a pas fait tort à la fraîcheur et qui ont su allier un accent authentique à celui de la collectivité qu'ils traduisaient ? Où voit-on, mises à part quelques compositions d'une solennité un peu niaise, que Grieg se soit immodestement efforcé detruquer, de donner le change ? La musique de Peer Gynt est peut-être plus près de l'âme de la Norvège que ne l'est ledrame d'Ibsen : elle n'est pas seulement pittoresque, elle suggère, comme Bizet, comme les Russes savent le faire.

Il y alà un accord étonnamment profond entre le poète et la race, entre le songe et l'esprit : ce même miracle d'équilibre qui faitde l'Arlésienne un joyau sans prix.

Point n'est besoin d'être Norvégien pour sentir cela. Ailleurs, dans les Pièces lyriques, dans les Sonates, faut-il l'être pour le goûter ? A l'exception des lieder (quelques-unsseulement ayant été traduits, le sens des textes qu'ils commentent nous échappe), reconnaissons qu'une flânerie àtravers cette musique de plein air n'est pas un dépaysement très grave ; il est néanmoins sensible, et c'est assez pourque nous ayons quelque obligation à qui nous le fait éprouver à ce Grieg, impressionniste furtif, élégiaque sansprofondeur, mais non sans intensité, collectionneur de frissons, de reflets, rêveur à la fois archaïque et raffiné, comme enfuite devant lui-même et qui ne recueille de la réalité que son fantôme de brumes et de mirages. On l'assure tout à fait démodé.

Pourtant plusieurs des épithètes qui viennent de naître sous notre plume s'appliqueraientassez bien à Debussy et à ses meilleurs disciples.

Il pèse sur Grieg un injuste discrédit, qui s'attache d'ailleurs moins à sapersonne qu'à l'époque "salonnarde" dont il a longtemps été un des artistes choyés.

A mesure que se révélait à nos yeuxla vraie nature du génie nordique, son réalisme tonique et amer, son intime vertu de transfiguration, nous avonsaccoutumé de rejeter comme une duperie cet art épidermique et mineur, tout ce pittoresque aimable et facile, dont l'attraitde suggestion nous semblait un leurre.

Prenons garde pourtant que le revêtement harmonique de Grieg est d'un maîtreétonnamment intuitif et délicat, que son langage pianistique conserve le charme et la saveur de la vérité, qu'en adaptant àsa forme de sensibilité particulière certains caractères ethniques essentiels, il ne les a ni travestis ni édulcorés autantqu'on le pense.

L'âme rêveuse de la Norvège se reflète aux pages sensibles de celui qui, en dépit de tout ce qui luimanque, a été son musicien national, le poète agreste de son humeur, le chantre émerveillé de ses sortilèges.. »

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