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EDT N°2 : Le portrait de Manon, un personnage en marge p.70-71, l.1363.1385

Publié le 06/04/2023

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« EDT N°2 : Le portrait de Manon, un personnage en marge p.70-71, l.1363.1385 Introduction Contextualisation : Cet extrait se situe au milieu de la 1ère partie du roman après que M et DG, grâce à l’argent obtenu de M.

B… se soient installés à Chaillot, que leur maison a brûlé et que DG a obtenu encore une fois l’aide de son ami Tiberge. Envisageant un temps le retour à la vertu (p.70), DG abandonne vite cette voie, ne pouvant résister aux charmes de M.

Dans ce passage, DG élabore un portrait de M fait des contrastes que l’on retrouve dans la nature même de la jeune femme ; un portrait qui se veut sincère mais parfois empli de la mauvaise foi du narrateur qui expose la vérité de l’héroïne pour, aussitôt, la contredire ou l’absoudre. Problématique : Quelle portrait de Manon Des Grieux dresse-t-il dans ce passage ? Mouvements du texte 1) L.1363-1373 : un portrait paradoxal 2) L.1373-1385 : inquiétudes et justifications Analyse linéaire 1) Un portrait paradoxal Cette 1ère partie du texte expose le paradoxe du caractère de Manon, attachée au plaisir et non à l’argent.

DG, en tant que personnage est pratiquement absent, et en tant que narrateur veut donner l’impression d’un portrait objectif. En effet, le narrateur est conscient de l’image dévalorisée qu’a pu donner M de sa relation avec l’argent et il essaie de la dédouaner de l’accusation de cupidité. Et pourtant, son discours ancre paradoxalement la jeune femme dans un rapport permanent avec l’argent. - Phrase 1 : « Manon était une créature d’un caractère extraordinaire.

» → « Manon » : utilisation de ce nom propre en début du passage qui place le personnage comme sujet de cet extrait + répétitions anaphoriques du pronom de la 3ème personne du singulier = DG tente encore une fois d’éclaircir le mystère de la personnalité de M. → « était » : verbe d’état + imparfait = description. → connotation du terme « créature » : il renvoie à la figure d’Eve, la femme tentatrice et pécheresse, responsable de la perdition de l’homme. Thématique de la chute qui précède l’extrait : « La vue de Manon m’aurait fait précipiter du ciel.

» l.1360 → le terme renvoie également à Manon comme « créature de Dieu », à l’image de son créateur, donc apte au salut et à la rédemption. → nom qui désigne aussi une femme légère, aux mœurs dissolues, peu respectable. → ce terme associé à l’adjectif hyperbolique « extraordinaire » transforme Manon en un être à part, produit unique d’un créateur = l’auteur ? → elle est la « créature » de son propre « caractère » cf reste de l’extrait et de l’œuvre = elle est la victime de son penchant au plaisir et de sa beauté. - Phrases 2-3-4-5 : DG veut prouver ici que ce n’est pas l’argent qui intéresse M mais les plaisirs. → cependant l’emploi du terme « fille » fait à la fois référence à son statut de femme non mariée et aussi, dans son sens péjoratif à une femme entretenue = paradoxe du narrateur : il veut dédouaner M de la vénalité des « filles » mais la situe, d’un point de vue social, dans cette catégorie-là. → les 4 phrases qui traitent de ce thème sont construites de la même façon : elles commencent par une 1ère partie négative qui concerne l’argent : « Jamais fille n’eut moins d’attachement qu’elle pour l’argent », « Elle n’eût jamais voulu toucher un sou », « Elle ne s’informait pas même quel était le fonds de nos richesses », « n’étant ni excessivement livrée au jeu, ni capable d’être éblouie par le faste des grandes dépenses ». → dans ces propositions la négation est absolue + renforcée par les adverbes « jamais, même, ni » et par le comparatif « moins ». → il s’agit pour DG de montrer que M n’est pas cupide et il oppose donc « l’attachement pour l’argent » l.1364 à « la crainte d’en manquer » l.1365. → ensuite, dans la 2ème partie de ces phrases, l’argent est remplacé par le motif des plaisirs : « se divertir », « passer agréablement la journée », « des amusements » = l’argent doit être considéré comme un simple moyen pour accéder au plaisir, qui, lui, est nécessaire à M ; il est ainsi dissocié de la nature profonde de l’héroïne. → cependant, ce raisonnement fonctionne sur le mode de la prétérition : figure par laquelle on attire l’attention sur une chose en déclarant ne pas en parler :  emploi de la conjonction de coordination « mais » l.1364 qui marque une opposition.  restriction conditionnelle : « si l’on pouvait l.1367, « pourvu que » l.1369.  recours à l’irréel : « elle n’eût jamais voulu toucher un sou » l.1366-1367 ↘ DG semble dédouaner M du désir d’argent par délicatesse morale tout en attestant cependant qu’elle en a bien touché. ↘ complexité du personnage de M ainsi que mélange de sincérité et de mauvaise foi de DG. → à noter la polyptote du verbe « pouvoir » (répétition de plusieurs termes de même racine ou d’un verbe sous différentes formes) qui revient dans les 3 propositions restrictives expliquant le rapport de M à l’argent at au plaisir : « elle ne pouvait être tranquille un moment » l.1365, « si l’on pouvait se divertir » l.1367, « pourvu qu’elle pût passer » l.1369. ↘ ces 3 occurrences, où le verbe est employé à la ferme négative ou conditionnelle insistent bien sur cette impossibilité pour M de vivre sans plaisir, donc sans argent. → on peut également relever des termes qui expriment l’obligation : « C’était des plaisirs et des passe-temps qu’il lui fallait » l.1366 et « une chose si nécessaire » l.1373 = dépendance au plaisir qui apparaît comme une fatalité inhérente à la nature de M contre laquelle elle ne peut rien et qui ne dépend pas de sa volonté.

+ cf allusion à cette double fatalité de la passion : « Manon était passionnée pour le plaisir ; je l’étais pour elle.

» p.61. → la motivation principale de M est donc le plaisir : champ lexical important : « plaisir X2, passe-temps, se divertir, agréablement, amusement » = plaisir à distinguer de la débauche = plaisir qui semble plus proche du divertissement pascalien : il s’agit de chasser l’ennui par des amusements nouveaux et d’occuper l’esprit : « tous les jours » l.1372, « être ainsi occupée par le plaisir » l.1374. → ce besoin de plaisir apparaît donc davantage comme une passion humaine qui traduit l’intranquillité de l’âme : « elle ne pouvait être tranquille un moment » l.1365 que comme un vice dont elle n’a pas.... »

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