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Echecs

Publié le 10/12/2021

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18 mars 2001 EN LEVER de rideau d'un processus électoral qui va toucher les exécutifs des quatre pays européens membres du G7, d'abord l'Italie et la Grande Bretagne, puis la France et l'Allemagne en 2002, les scrutins municipaux et cantonaux semblent avoir été principalement l'occasion pour les Français de rétablir les élections à venir dans leur... incertitude. Comme s'ils s'étaient ingéniés à distribuer également les mauvais points, sanctionnant Jacques Chirac à Paris et à Lyon, mettant en garde Lionel Jospin dans nombre de villes où ses ministres étaient imprudemment candidats, les Français ont peut-être voulu signifier à l'un comme à l'autre qu'ils ne se laisseraient sous aucun prétexte priver du grand débat qu'ils attendent au moment de l'élection présidentielle. Moment privilégié puisque le seul à l'occasion duquel le peuple a le sentiment de pouvoir infléchir le destin du pays : ce « rien n'est joué » qu'ils viennent de signifier, cette volonté manifeste de ne désigner aucun vainqueur, résonnent donc comme autant de mises en garde. Celles-ci s'adressent en premier lieu au chef de l'Etat, désormais privé de son bastion et de sa logistique parisienne, ô combien symbolique, et désavoué dans sa tentative d'OPA lyonnaise qui visait à faire de Charles Millon, celui de l'alliance avec l'extrême droite, celui qui se réclame de la « chrétienté », l'homme fort de la droite ; le fer de lance d'un dispositif destiné à décourager la tentative d'une alternance au sein de la droite qu'incarne le modéré François Bayrou. Défaite politique et idéologique donc pour Jacques Chirac qui devra reconsidérer son dispositif, même s'il peut se réjouir du succès de son allié Philippe Douste-Blazy à Toulouse. Il est vrai que dans la ville dite « rose », et qui ne l'est toujours pas, le « allez, ouste ! » a fait peur à l'électorat centriste ; mais ce dernier, à Lyon mais aussi à Nice ou à Ajaccio, a montré une capacité de vigilance qui est de nature à rassurer ceux qui veulent éviter à la droite ses tentations démagogiques. Les mises en garde ne sont pas moins nombreuses pour la gauche. Celle-ci voit en effet s'effondrer le communisme municipal tandis qu'une certaine arrogance gouvernementale ou perçue comme telle - Martine Aubry à Lille, plus nettement Elisabeth Guigou à Avignon - est soit tancée soit récusée. Surtout, la popularité incontestable des membres du gouvernement n'est pas un atout sur le terrain et n'a pas permis à la gauche d'échapper à la constante aspiration à un renouvellement du personnel politique. De ce point de vue, la prime va à deux hommes qui émergent, Bertrand Delanoë et François Hollande, aux dépens de celles et ceux qui incarnaient le renouvellement jospinien de 1997. En termes électoraux, et pour qui voudrait à toute force se projeter vers les échéances futures, l'équation est malgré tout plus difficile pour la gauche que pour la droite. La droite a un problème, c'est Jacques Chirac. Mais elle est forte d'une réalité sociologique et désormais électorale redoutable : les électeurs de l'extrême droite se reportent désormais massivement vers la droite et offrent à celle-ci un apport presque mécanique, qui à la limite peut la dispenser de tout effort d'organisation ou de programme. La droite est en quelque sorte, indépendamment de l'état de ses dirigeants, sous perfusion électorale permanente. C'est, dans la perspective d'élections législatives, un avantage considérable. Pour quiconque est attaché à préserver des conditions équitables d'un débat présidentiel, entre gauche et droite, mais aussi au sein de la droite, il n'en est que plus urgent d'inverser le calendrier et de s'assurer que l'élection présidentielle, plus importante et plus ouverte, devancera bien le renouvellement de l'Assemblée nationale. La gauche, de son côté, butte sur une difficulté majeure : comment intégrer ses courants critiques, comment fédérer cette gauche nouvelle qui s'est exprimée lors des élections municipales, notamment par la poussée des Verts, avec une gauche ancienne, singulièrement affaiblie par l'effacement progressif du PCF. Cette difficulté-là explique nombre d'échecs ou de défaites enregistrés au soir du 18 mars. Il faut en effet pour Lionel Jospin tenir les deux bouts de la chaîne : gagner la bataille au centre et intégrer les aspirations de celles et ceux qui critiquent la gauche parce qu'elle incarne depuis longtemps le pouvoir ; il lui faut continuer de progresser dans le haut du salariat et des couches moyennes sans éloigner la gauche critique. La difficulté est d'autant plus aiguë lorsqu'il s'agit par exemple de l'électorat des Verts, composite s'il en est, qui mêle extrême gauche et extrême centre. Tels sont les termes d'une équation que les Français n'ont pas voulu trancher par avance, se réservant pour le grand débat du printemps 2002. Mais au seuil de cette année-là, ils auront vécu, pendant les mois de janvier et février, le choc de l'arrivée de l'euro : la monnaie unique aura cessé d'être une abstraction ou un jeu d'écriture pour devenir une espèce sonnante et trébuchante. L'on se souviendra alors que la question centrale est bien celle du modèle de société européenne que nous voulons créer et de la dévolution des pouvoirs à laquelle nous aspirons entre les régions, la nation et l'Europe. Or tout se passe comme si, à l'occasion de ces élections municipales, les Français avaient privilégié une hypothèse : avec l'arrivée de l'euro, celle d'un pouvoir européen qui s'affirme. S'il en était hélas besoin, les grandes épizooties dont nous sommes victimes étaient là pour rappeler que nombre de grandes décisions se prennent à Bruxelles. Cette conscience explique la forte demande de proximité qui s'est exprimée, de prise de responsabilités à des niveaux que les Français veulent d'autant plus contrôler que « le » pouvoir est menacé de s'éloigner. De ce point de vue, Paris est une parfaite illustration de cette nouvelle demande de proximité ou de subsidiarité, et de citoyenneté, l'une et l'autre remettant en cause le modèle politique dominant en France. C'est en effet la première fois dans toute l'histoire de Paris qu'après une campagne locale, où la prime est allée à celui qui paraissait le plus proche de la population, un maire à plein temps est élu. Bertrand Delanoë est effet très exactement l'anti-Chirac : son succès manifeste on ne peut plus clairement le renversement d'un modèle qui faisait d'une conquête locale un simple tremplin pour qui ambitionnait un destin national. Paris était non seulement le lieu de la centralisation, celui de la domination sur le reste du pays, mais aussi de la centralisation de la ville elle-même qui permettait son contrôle et celui de ses innombrables marchés par un homme, Jacques Chirac, engagé dans une campagne permanente pour la conquête du pouvoir d'Etat. Il y avait eu en quelque sorte, pendant près d'un quart de siècle, un détournement de ce qui avait été la volonté de Valéry Giscard d'Estaing de doter Paris d'un maire à part entière : au reste, le RPR avait bel et bien été constitué pour permettre la conquête de Paris, en attendant de pouvoir vivre de celle-ci. Le scrutin parisien est donc aujourd'hui le symbole d'une nouvelle demande, puissamment décentralisatrice, jusques et y compris pour la capitale. Cette élection enfin municipale doit être prise un peu comme celle de la New York en gestation de l'Europe en train de naître, et non plus comme celle de la capitale des Capétiens. Nouvelle demande citoyenne, aspiration à une véritable décentralisation, refus de toute arrogance, telles sont les leçons positives d'un scrutin qui, si l'on se tourne vers les sommets, s'est bien gardé de désigner des vainqueurs au seuil d'une période où chacun est désormais sommé, au-delà des bilans - si bons soient-ils, comme n'a cessé de le proclamer Jean Tiberi -, de dessiner les contours d'une nouvelle France.

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