Des spectacles

« ERTULLIEN Tertullien (Quintus Septimius Florens Tertullianus, v.

155-v .

220) vécut à Carthage et se convertit lors d'un voyage à Rome ( 190).

Devenu prêtre, quoique marié, il est l'auteur de nombreux ouvrages d 'apologétique et de morale.

« ...

car le monde est de Dieu, mais les choses du monde, du diable.

» Tertulli en Des s ectacles Perversité des spectacles C e traité essaie de démontrer que tous les spec­ tacles, quels qu'ils soient, sont condamnables.

L'auteur réfute d'abord les justifications des amateurs de ce genre de divertissement : contrairement à ce qu'ils affmnent, les spectacles ne sont pas l' œuvre de Dieu, mais de « l'ange falsificateur » ; en outre, même s'ils ne sont pas interdits nommément par les Écritures, certains textes peuvent être interprétés en leur défaveur.

Ils sont d'origine païenne, donc assi­ milables à l'idolâtrie.

Sur la scène du théâtre règne «l'impudicité», au cirque se déchaîne la frénésie, les jeux du stade dont dédiés à des divinités ; enfin, les combats de gladiateurs, issus de sacrifices humains, sont barbares.

Tous les spectacles sont l' œuvre du démon, qui sait y mêler de la douceur, « de l'honnê­ teté même », pour mieux pervertir les âmes.

Ils dé­ tournent de la pensée de Dieu, seule préoccupation des chrétiens, dont les.plaisirs ne sont pas de ce monde : au jour du Jugement, ils se délecteront au spectacle du châtiment des païens.

Un idéal inaccessible P armi ceux qui, au cours des siècles, ont condamné les spectacles au nom de la morale -les plus connus sont Bossuet et Rousseau -Tertullien est sans doute le plus intransigeant.

La plus grande partie de son ouvrage est consacrée à prouver leur origine religieuse préchrétienne, qui les rend immoraux, les dieux de l' Antiquité n'étant que des démons déguisés.

Tertullien veut sauver les âmes, et le salut, pour lui, n 'est possible que par une soumission stricte au vrai Dieu.

Emporté par ses convictions et son zèle, il écrit avec une élo­ quence remarquable; faisant miroiter aux yeux de ses lecteurs le contraste entre le bonheur des élus et les souffrances des damnés, mais n'hésite pas à solliciter quelque peu les Écritures pour les besoins de sa dé­ monstration.

Le ton polémique de l'ouvrage s'ex­ plique peut-être par les persécutions dont les chrétiens étaient alors les victimes .

Cependant, l'idéal proposé n'était pas à la portée du commun des mortels, peu enclin à se détourner entièrement ·des plaisirs ter­ restres dans l'attente des joies de la vie future.

"1H}l111 U n pamphlet sans concession contre les spectacles par le plus rigoriste des Pères de l'Église.

Vue du théâtre antique de Taormina, (reconstitution) d'après Viollet-le-Duc. »