DÉGUISÉ, -ÉE, participe passé et adjectif.

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DÉGUISÉ, -ÉE, participe passé et adjectif.  

I.—  Participe passé de déguiser* 

II.—  Adjectif. 

A.—  [En parlant d'une personne ou d'un trait du comportement humain] 

1. Dont l'apparence extérieure est transformée à l'aide d'un costume ou d'un élément de costume. 

a) [Notamment pour le carnaval, un bal masqué, etc.]  Qui est vêtu d'un costume d'emprunt, d'un vêtement appartenant à une certaine époque, à une certaine catégorie professionnelle ou sociale, à un personnage imaginaire, etc. Déguisé en clown. Il venait tous les soirs déguisé, tantôt en bourgeois, tantôt en militaire, jamais avec le même habit ou le même uniforme (FRÉDÉRIC SOULIÉ. Les Mémoires du diable, tome 2, 1837, page 163 ). Cette livrée? Est-ce un déguisement? Ruy Blas, avec amertume. —  Non, je suis déguisé quand je suis autrement (VICTOR HUGO, Ruy Blas,  1838, page 350 ). 

·    Emploi comme substantif.  Personne qui porte un déguisement de carnaval. Une déguisée de mardi-gras (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, L'Art moderne,  1883, page 293) : 

Ø 1. Mardi-gras, 18 février. Je n'ai jamais vu un carnaval d'une dégoûtation si complète. Ce soir, sur les boulevards, parmi les déguisés, on ne voit que des hommes travestis en femmes...

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1890, page 1127. 

—  Par métonymie. Bal déguisé. (Quasi-)synonymes : bal costumé, masqué, travesti. Son bal, (...) est un bal déguisé et le masque y est de rigueur (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 4, 1859, page 277 ). 

—  Par ironie : 

Ø 2. Elle avait revêtu (...) une robe à paniers, (...) une de ces robes doucement extravagantes (...). Joseph considéra Suzanne avec une stupeur soudaine. (...) et dit :

—  Déguisée dès le matin?

—  Mais, dit Suzanne avec tranquillité, ce n'est pas un déguisement, c'est mon costume pour aujourd'hui.

GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, page 202. 

b) Par affaiblissement.  [En parlant de l'aspect physique d'une personne, des formes du corps]  Caché, dissimulé par un vêtement quelconque (volontairement ou involontairement). Ses seins mal déguisés sous une ceinture d'écaille (CHARLES MAURRAS, Le Chemin  de Paradis.  1894, page 67 ). 

2. Par métaphore ou au figuré. 

a) [En parlant d'un aspect de la personnalité]  Caché, transformé (généralement volontairement) de façon à être (rendu) méconnaissable. Écriture, voix déguisée. Un ton bourru mal déguisé par son sourire épais (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Christo, tome 2, 1846, page 48 ). Un roi (...) qui se masque toujours d'un propos déguisé (JEAN PAPADIAMANTOPOULOS, DIT JEAN MORÉAS, Iphigénie,  1900, I, 4, page 32 ). Des égoïstes; ils abondent; mais inconscients, sournois, déguisés (ANDRÉ GIDE, Journal,  1943, page 168) : 

Ø 3. Je ne suis point un incrédule déguisé en chrétien, qui propose la religion comme un frein utile aux peuples. (...). Si je n'étois pas chrétien, je ne me donnerois pas la peine de le paroître : toute contrainte me pèse, tout masque m'étouffe;...

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Essai historique, politique et moral sur les révolutions, tome 1, 1826, page XLIV. 

—  En particulier. Déguisé du nom de, sous le nom de. Il y a là-bas [en Orient] aussi, déguisés sous d'autres noms et cachés sous d'autres costumes, des commissaires de police, des juges d'instruction (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Christo, tome 1, 1846, page 759 ). 

·    Emploi comme substantif (Quasi-)synonymes : hypocrite, simulateur. Des déguisés sans le savoir, qui marchent vêtus de façon de sentir qui ne furent jamais les leurs? (MAURICE BARRÈS, Sous l'oeil des Barbares, L'Examen des trois romans idéologiques, 1892, page 35 ). 

b) Au figuré.  [En parlant d'une chose abstraite concernant la personne humaine]  La réalité, la vérité déguisée. (Quasi-)synonymes : dénaturé, falsifié, feint, simulé. La vertu n'est qu'un amour-propre déguisé (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Le Génie du christianisme, tome 1, 1803, page 241 ). 

B.—  Par analogie.  [En parlant d'une chose concrète ou de ce qui la caractérise]  Dissimulé sous un aspect généralement plus flatteur que l'aspect habituel. Une absence de meubles déguisée par quelques chaises flânant autour d'un fauteuil (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1856, page 301 ). La carriole déguisée en char funèbre ensoleillé sous les couronnes (GEORGES BERNANOS, Monsieur Ouine,  1943, page 1438 ). 

—  Spécialement.  ART CULINAIRE (CONFISERIE, etc.).  Le repas lui déplaisait, les mets vulgaires, point déguisés suffisamment (GUSTAVE FLAUBERT, Trois contes, Hérodias, 1877, page 193 ). 

·    Fruit déguisé. Petit fruit enrobé d'une couche de sucre fondant; pâte d'amande imitant un fruit. Marrons glacés ou déguisés (MARCEL PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,  1918, page 486) : 

Ø 4.... elle [Zaza] piquait sur une aiguille à tricoter des quartiers d'orange, des dattes, des pruneaux et les plongeait dans une casserole où cuisait un sirop à l'odeur de vinaigre chaud : ses fruits déguisés avaient aussi bonne mine que ceux des confiseurs.

SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée,  1958, page 93. 

 Fréquence absolue littéraire : 701. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 1 425, b) 960; XXe.  siècle : a) 699, b) 829. 

 

Forme dérivée du verbe \"déguiser\"

 déguiser

DÉGUISER, verbe transitif.  

I.—  [À propos d'une personne ou d'un trait (du comportement) humain] 

A.—  Transformer l'apparence extérieure à l'aide d'un costume —  ou d'un élément de costume —  de manière à (se) rendre méconnaissable. 

1. [Notamment pour le carnaval, un bal masqué, etc.] (Se) vêtir d'un costume d'emprunt, d'un vêtement appartenant à une certaine époque, à une certaine catégorie professionnelle ou sociale, à un personnage imaginaire, etc. (Quasi-)synonyme : travestir. Ils se déguisèrent en moines de Saint François. Hélène (...) ainsi vêtue, semblait un jeune frère novice (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, L'Abbesse de Castro,  1839, page 169 ). Au bal des jeunes : —  Je me déguiserai en arbre de Noël (MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 13, 1921-22, page 214) : 

Ø 1.... à la fin du carnaval, (...). Toute la ville se déguise, à peine reste-t-il aux fenêtres des spectateurs sans masque pour regarder ceux qui en ont;...

GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Corinne ou l'Italie, tome 2, 1807, page 85. 

2. SPECTACLES. (Se) vêtir d'un costume de scène adapté à un rôle, à un personnage : 

Ø 2. MONSIEUR DE SOLANGES. —  C'est assez difficile d'improviser.

DORMEUIL. —  Non, puisqu'on dit tout ce qui vous passe par la tête; mais il faut de bons costumes. Mon cousin de Courcelles, lui, se déguisait toujours si bien qu'on ne le reconnaissait pas. Il s'était chargé aussi de mettre le rouge aux dames qui jouaient;...

THÉODORE LECLERCQ, Proverbes dramatiques, La Manie des proverbes, 1835, 2, page 18. 

—  Par extension.  Transformer la physionomie d'un acteur, changer ses traits par un maquillage approprié au personnage qu'il s'agit de représenter. (Quasi-)synonymes : farder, maquiller. Le maquillage qui déguise nos figures (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, L'Envers du music-hall,  1913, page 60 ). 

3. Familier, par ironie.  [L'effet produit étant généralement involontaire] (Se) vêtir d'un vêtement bizarre, inadapté à la situation présente et qui produit un effet comique, enlaidit. (Quasi-)synonymes : (s')accoutrer*, (s')affubler. Il n'est pas de paysan qui ne soit assuré de lui-même par sa blouse bleue; mais s'il se déguise en citadin, nous voyons alors tout à fait autre chose (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1923, page 516) : 

Ø 3.... Siegfried (...) de chacun de ses plongeons en Allemagne rapportait un vêtement qui le déguisait un peu plus. Lui, qui ne portait que du linge blanc, s'enveloppa d'un tricot mauve, d'un caleçon rose, de genouillères vert véronèse, s'armant pour je ne sais quel tournoi avec l'arc-en-ciel.

JEAN GIRAUDOUX, Siegfried et le Limousin,  1922, page 98. 

—  Par plaisanterie, argotique.  [Par allusion à la rapidité du cerf]  Se déguiser (en cerf). Se déguiser en courant d'air. S'en aller rapidement, s'enfuir, disparaître. Là-dessus, je me déguise en courant d'air et je fous mon petit camp (ROGER CRÉTIN, DIT ROGER VERCEL, Capitaine Conan,  1934, page 80 ). 

4. Par affaiblissement.  Cacher, dissimuler (volontairement ou involontairement) par un vêtement quelconque les caractéristiques physiques d'une personne, les formes du corps. Laissez-moi déguiser l'exiguïté de mes jambes sous le pantalon large (ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls, 1832, page 12 ). La jupe, enflée encore sous les reins, déguisait les formes en les exagérant et voilait la réalité sous son image amplifiée (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Les Dieux ont soif,  1912, page 51 ). 

B.—  Par métaphore ou au figuré. 

1. [Le sujet désigne généralement une personne ou un mode d'expression]  Cacher, transformer (généralement volontairement) un aspect de sa personnalité. Déguiser son ambition, son écriture, son énervement, le motif de. Les poltrons, qui chantent pour déguiser leur peur (NICOLAS-SÉBASTIEN ROCH, DIT DE CHAMFORT, Caractères et anecdotes,  1794, page 147 ). Une voix au timbre enfantin qu'il cherchait à grossir pour la déguiser (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 237) : 

Ø 4.... l'amour, (...) n'est qu'un sentiment de plaisir. L'égoïsme est au fond de tout acte humain, de quelque apparence ou de quelque nom qu'on veuille le couvrir, et ces expressions superbes de dévouement, d'abnégation, d'immolation de soi-même, ne servent qu'à déguiser nos vrais penchans sous une pompe qui flatte notre orgueil.

PÈRE HENRI-DOMINIQUE LACORDAIRE, Conférence de Notre-Dame,  1848, page 181. 

—  En particulier. Déguiser (quelque chose) du nom de, sous le nom de. (Quasi-)synonyme : décorer du nom de : 

Ø 5. Celui qui déguise la tyrannie, la protection ou même les bienfaits, sous l'air et le nom de l'amitié, me rappelle ce prêtre scélérat qui empoisonnait dans une hostie.

NICOLAS-SÉBASTIEN ROCH, DIT DE CHAMFORT, Maximes et pensées,  1794, page 55. 

—  Absolument.  (Savoir) déguiser. Jamais je ne déguise (...) Aussi, pour m'achever de peindre avec franchise, Je suis taquin, grondeur sans trop savoir pourquoi (GUILLAUME-VICTOR-ÉMILE, DIT ÉMILE AUGIER, La Ciguë,  1844, page 58 ). 

2. Dissimuler, dénaturer, falsifier (une chose abstraite). 

a) [Le sujet désigne une personne]  Emploi pronominal. Se déguiser quelque chose Se cacher à soi-même une vérité. Il ne faut pas se le déguiser, les grands états ont de grands désavantages (BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, De l'Esprit de conquête et de l'usurpation,  1813, page 174 ). 

b) [Le sujet désigne une chose]  L'argot n'est autre chose qu'un vestiaire où la langue, (...) se déguise. Elle s'y revêt de mots masques et de métaphores haillons (VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 2, 1862, page 193 ). L'amour des faibles déguise un besoin de domination très primitif (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 512) : 

Ø 6. Dans cette mascarade immense des vivants

Nul ne parle à son gré ni ne marche à sa guise;

Faite pour révéler, la parole déguise,

Et la face n'est plus qu'un masque aux traits savants.

ARMAND PRUDHOMME, DIT SULLY PRUDHOMME, Les Solitudes, Dernière solitude, 1869, page 109. 

II.—  Par analogie.  [À propos d'une chose concrète] (Se) cacher sous une apparence, généralement plus flatteuse que l'apparence habituelle. Le jeune architecte avait eu l'honnêteté et le courage de ne pas le [le fer] déguiser sous une couche de badigeon, imitant la pierre ou le bois (ÉMILE ZOLA, Au Bonheur des dames,  1883, page 626 ). Planches qui se déguisent en marbre (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Jumelle noire,  1938, page 45 ). 

—  Spécialement.  ART CULINAIRE.  

·    CONFISERIE.  La pomme se déguise en beau fruit déguisé (JACQUES PRÉVERT, Paroles,  1946, page 280 ). 

Par métaphore. La vie est quelque chose de si abominable qu'il faut la déguiser pour l'avaler. Si on ne la sucre pas avec une drogue extraordinaire, le coeur vous manque! (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance,  1878, page 105 ). 

·    GASTRONOMIE.  Plusieurs viandes (...), qu'un cuistot (...), déguisait sous des sauces savamment immondes (JEAN BRULLER, DIT VERCORS, Le Silence de la mer,  1942, page 15 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 573. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 1 255, b) 809; XXe.  siècle : a) 409, b) 684.