CorrespondanceCicéronAd Atticum (VII, 13a)Minturmes, 23 janvier 49Mon cher Atticus,[.
Publié le 22/05/2020
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«
Correspondance
Cicéron
Ad Atticum (VII, 13a)
Minturmes, 23 janvier 49
Mon cher Atticus,
[...] Tu vois de quel genre de guerre il s'agit : une guerre civile, mais qui n'est pas
l'effet d'une discorde entre citoyens ; non, c'est l'audace d'un seul citoyen maudit,
César, qui l'a fait naître.
Il a toute la force que donne une armée, il tient une foule de
gens dans sa main en leur donnant espoirs et promesses, il y a beau temps qu'il
convoite tous les biens de tout le monde.
C'est à cet homme qu'on a livré Rome, vide
de toute protection, et bourrée de ressources.
Que peut-on ne pas redouter d'un
homme qui voit, dans ces temples et ces maisons, non sa patrie, mais son butin ?
Quant à ce qu'il fera, sans sénat, sans magistrats, je n'en sais rien : il ne pourra même
pas simuler la moindre légalité politique.
Mais nous, où pourrons-nous émerger ? quand ? et avec un général qui, tu le vois
comme moi, est une nullité stratégique, au point de ne même pas connaître le
Picénum ! Il n'a rien en tête, les faits en sont témoins ! Pour ne pas évoquer les fautes
de ces dix dernières années, quel compromis n'aurait pas été préférable à cette
fuite ? Mais aujourd'hui encore, je ne sais pas à quoi il pense, et j'envoie lettre sur
lettre pour essayer de le savoir.
Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'on ne saurait trouver pire
pusillanimité, ni pire désordre d'esprit.
Voilà pourquoi je ne vois ni troupes de
défense (c'est pour les organiser qu'on le retenait aux portes de Rome !), ni positions
pour les installer.
Tout l'espoir réside en ses deux légions, qu'il a retenues contre une
vive opposition, et qui ne sont pas loin de lui échapper.
Car pour le moment on
n'enrôle que des recrues forcées, et qui n'ont aucune envie de se battre.
Or le temps
d'un compromis est désormais passé.
Ce qui va se passer, je ne le vois pas.
La faute,
la nôtre en tout cas, ou celle de notre général, c'est d'être sorti du port sans
gouvernail pour nous livrer à la tempête.
Si bien que je ne sais quoi faire de nos deux jeunes Cicérons, mon fils et mon neveu.
Je songe parfois à les envoyer en Grèce.
Pour Tullia et Térentia, lorsque je me
représente l'arrivée de ces barbares à Rome, je crains le dire ; quand je me représente
la présence à leurs côtés de mon gendre Dolabella, je respire un peu.
Réfléchis, je
t'en prie, à ce qu'on pourrait faire, selon toi, d'abord pour leur sécurité (pour elles, les
précautions à prendre ne sont pas les mêmes que pour moi) ; ensuite, en tenant
compte de l'opinion, pour qu'on ne nous reproche pas de vouloir les laisser à Rome
quand tous les gens du bon parti quittent la Ville.
Et puis, il y a toi et ton ami Sextus Péducaeus (il m'a écrit).
Voyez quoi faire.
Vous
êtes si en vue qu'on n'attend pas de vous moins que des premiers des citoyens.
Mais
tu en jugeras pour ce qui te concerne, puisque je souhaite que tu considères mon cas
et celui des miens....
»
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