Commentaire de "Le soleil" de Charles Baudelaire
Publié le 02/10/2022
Extrait du document
«
Charles Baudelaire, Les fleurs du Mal, «
Tableaux Parisiens », 1861 : LE SOLEIL
Présentation :
Il fait partie des poèmes sur l’art d’écrire et le poète.
-tableaux parisiens = promenade dans la ville de Paris, le Paris d’Haussmann,
en travaux constants.
« la forme d’une ville change plus vite hélas que le cœur
des humains »
→ poèmes de la modernité : le regard sur la modernité qu’il a sous les yeux,
«le transitoire », le fugitif, dont il s’agit d’extraire la beauté.
- choix de la ville → poème citadin : très nouveau.
Et quand il s’attarde sur la
campagne, nous verrons que là aussi, les images sont nouvelles…
- trois strophes en alexandrins ;
Deux strophes de 8 vers ;
Une strophe de 4 vers = une mini-ballade avec envoi ?
Problématique :
En quoi la poésie provoque une alchimie sur les choses et les êtres
comparable à celle du soleil : nous allons voir que, selon
Baudelaire, comme le soleil, le poète aussi a toute puissance sur
les choses, par les mots et les images qu’il crée
Mouvements du texte :
Première strophe : une très longue phrase, dont le sujet est le poète « je», qui
se promène en ville un jour ensoleillé.
Deuxième strophe : deux phrases dont le sujet est le soleil et ses actions sur
les choses et les êtres.
Troisième strophe : une phrase plus courte où l’action du soleil est comparée
à la création du poète.
L’ensemble crée une sorte d’art poétique où le Soleil tient un rôle de « mise en
marche », de « détonateur », d’embrayeur, de « réactif » chimique à la création
= sorte d’élément chimique, alchimique à la création
→ description de l’action du soleil / portrait du poète en train de créer ou de
trouver l’inspiration, celui qui de la boue fait de l’or.
→ projet de lecture : une promenade d’un nouveau style // un art poétique
personnel - des récurrences sonores et de la variété à la rime
- aa/bb/cc/bb
- dd/ee/ff/gg
- Hh/bb
Surtout un jeu très intéressant sur les mots à la rime, qui se font écho et
créent un sens par cet écho :
Masures -> luxures
Redoublés → blés
Escrime → rime
Pavés → rêvés
Chloroses → roses
Ciel → miel
Béquilles → filles
Mûrir → fleurir
Villes → viles
Valets → palais
Rimes suffisantes ou riches mais surtout, effets de sens qui s’appellent ou
s’opposent.
Jouent de paires stéréotypées ou ironiques qui cassent le côté
attendu du topos « poème sur la nature » à la Lamartine ou à la Hugo.
Strophe 1 : Une promenade d’un nouveau style
Autoportrait du poète en ville, par beau temps= ici, nous sommes dans une «
belle » journée.
Mais ne nous réjouissons pas trop vite car…
• Le complément circonstanciel de lieu nous situe dans un lieu en marge,
inquiétant :
« Le long du vieux faubourg, où pendent aux masures Les persiennes, abri des
secrètes luxures, »
→ le poète ne se promène pas n’importe où : il est dans le « faubourg », derrière
les barrières ; monde de la misère, de la prostitution
C’est le monde de la misère citadine = état des maisons / choix du vocable
architectural
+ Hésitation métrique sur « persiennes, » → persi-ennes, abri » ou « persiennezabri » = si on préfère la première à cause de la virgule → le soleil y perce → le
seul à avoir accès aux secrètes luxures
Ce sont aussi les « siennes » = jeux de mots / de sens qu’autorise la poésie
+ Vieux / masure / pendent / luxure = on est dans le monde du décrépit,
du déchet
→ le corps et le désir sont déjà salis par le lieu où ils s’exercent.
• Même chose avec le complément circonstanciel de temps, qui n’envisage pas
le soleil comme quelque chose de forcément agréable :
Quand le soleil cruel frappe à traits redoublés
Sur la ville et les champs, sur les toits et les blés,
→ cf.
adjectif qui qualifie le soleil : « cruel »
→ métaphore des flèches du soleil = brulure
→ appelle peut-être l’idée de combat, de duel
• la proposition principale = le poète se promène à la recherche de l’inspiration,
dans une sorte de duel contre lui-même < pronom personnel « je » < « ma
fantasque escrime » = la poésie, la création poétique vue comme un jeu, un
défi, un duel contre lui-même ou contre le hasard ? = quelque chose de léger,
qui relève de la création pure
< les lieux traversés = réservoirs de possibilités, « dans tous les coins », « sur
les pavés » < actions liées à la marche = métaphores de l’action poétique
= « flairant », « trébuchant », « heurtant »
= l’inspiration poétique ne vient pas d’un dieu en haut, d’une muse
apollinienne qui toucherait le poète de son aile…
= l’inspiration vient de la marche, de la ville, des mauvais coins, du «bas»
= du corporel, du matériel = la part du hasard (cf.
ce qu’en feront les
surréalistes)
→ « hasards de la rime » = qui oblige à chercher un mot donc une idée pour
rimer avec celle qu’on a déjà trouvée
→ violence du hasard, de la trouvaille : « trébuchant sur les mots », « heurtant
parfois des vers » = sorte de violence qui arrête le poète, qui le fait tomber
presque
→ le poète : c’est lui qui marche, qui va à la rencontre des mots.
Ici, les mots n’ont pas grand-chose de mystérieux, ils sont là, il faut....
»
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