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PAGNOL Marcel

PAGNOL Marcel. Écrivain et cinéaste français. Né à Aubagne (Bouches-du-Rhône) le 28 février 1895, mort à Paris le 18 avril 1974. Il fait ses études secondaires à Marseille tout en commençant à écrire des poèmes pour la revue Massilia. En 1913, il entre à la Faculté des Lettres d’Aix-en-Provence et fonde la revue Fantasio qui deviendra Les Cahiers du Sud. En 1915, licencié d’anglais, il est nommé professeur au Collège de Tarascon puis, en 1917, au Collège de Pamiers. Il revient à Aix-en-Provence comme répétiteur en 1918. Il occupe le même poste au Lycée Saint-Charles de Marseille et se met a écrire des tragédies. En 1925, il « monte » à Paris comme répétiteur au Lycée Condorcet et commence à fréquenter les milieux littéraires. En 1925, il fait représenter Les Marchands de gloire au Théâtre de la Madeleine. La pièce n a pas grand succès, Nullement, découragé, il fait jouer Jazz l’année suivante au Théâtre des Arts. En 1927, il abandonne l’enseignement. En 1928, Topaze est donné au Théâtre des Variétés sur la recommandation d’Antoine et obtient un succès considérable. Il en est de même pour Marius représenté en 1929 avec Raimu dans le rôle de César. En 1931, Pagnol réalise son premier film tiré de Marius sous la direction de Korda. De ses pièces Fanny (1932) et César (1933) il fera d’autres films. Il fonde en 1935 Les Cahiers du cinéma pour défendre ses théories sur le septième art. Il adapte pour le cinéma des sujets empruntés aux romans de Giono. Il fait quelques incursions du côté du roman — Pirouettes (1932), L ’Eau des collines, en deux parties : Jean de Florette et Nanon des sources (1964) — ainsi que du côté de la traduction — Hamlet (1947), Les Bucoliques (1958). Après la Seconde Guerre mondiale, Marcel Pagnol est élu à l'Académie française (1946). Il revient au théâtre avec Judas (1955) et Fabien , pièces qui connaissent des fortunes diverses. Ce sont surtout ses souvenirs d’enfance qui lui vaudront un regain de succès : La Gloire de mon père (1957), Le Château de ma mère (1957), Le Temps des secrets (1960) et Le Temps des amours (posthume, 1977). Marcel Pagnol a fait rire. Puis il a ému. C’est beaucoup. Qu’entre ces deux sortes d’émotion, il y ait d’étroites relations, impossible d’en douter. Du théâtre au cinéma, puis aux souvenirs d’enfance, il sut préserver une continuité dans le ton. Ce qu’on en retient, c’est le naturel, la spontanéité. On oublie que ces qualités n’étaient pas innées chez lui. Nourri des classiques, il lui a fallu beaucoup travailler pour les acquérir. L’un de ses amis, Yvan Audouard, écrit : « La pièce de Marcel Pagnol, Phaéton, si elle ne semble pas tenir dans l’histoire du théâtre une place de premier plan, fut à lui-même fort utile. Il a renoncé à la tragédie pour la comédie dramatique. Il a admis qu’il pouvait écrire une pièce en prose. Mais les phantasmes universitaires ne sont pas encore totalement dissipés. » Justement, son succès au théâtre viendra de ce qu’il n’hésite pas à reprendre à son compte le mélodrame « qui fait pleurer Margot » dans la célèbre trilogie Marius-Fanny-César. Il suffit d’évoquer ces trois noms pour se souvenir aussi d’une intrigue très charpentée, s’appuyant sur des personnages fortement typés, qui semblent bondir de la rue pour entrer en scène. Mélodrame mais aussi théâtre de Guignol. Dans Topaze, si la morale est bafouée c’est que cette morale est d’abord immorale. Qui n’a rêvé un jour de réduire à quia les princes qui nous gouvernent ? Cette pièce qui n’a pas vieilli a survécu aux assauts de l’avant-garde des années 50. Au demeurant, le théâtre de Pagnol fut servi par des comédiens superbes. Ce théâtre se maintient aussi par son langage. Né de l’observation des petites gens de Marseille qui secouent, sans le faire exprès, notre langage littéraire trop souvent porté à une certaine sclérose d’expression, il apporte sur la scène la vie toute crue. Marcel Pagnol le savait et disait que son théâtre n’est pas un « théâtre de bibliothèque » ou d’avant-garde « mais le vrai, celui qui s’adresse au peuple, le théâtre théâtral ». Parlant de la langue populaire, il notait aussi dans ses Notes sur le rire (1947) : « Ce langage contient de grandes vérités scientifiques et philosophiques si l’on se donne la peine de l’examiner, d’extraire les racines des mots, de démonter les phrases toutes faites. » C’est également dans ce sens que s’oriente Marcel Pagnol en abordant le cinéma. Le théâtre, c’est bien joli, mais pourquoi ne pas lui adjoindre « les moyens du film parlant » ? Ne risque-t-il pas, ce faisant, de verser dans le théâtre sur pellicule ? Tout danger dans ce sens ne se trouve pas toujours écarté de ses films. Mais le procès intenté à ce propos à Marcel Pagnol repose sur une esthétique du « cinéma pur » qui ne l’intéressait pas. Le genre romanesque n’est sans doute pas celui que Pagnol a abordé avec le plus de bonheur, bien que L’Eau des collines retrouve l’un des thèmes profonds de la terre provençale. Cet amour du pays, on le relève également dans les Souvenirs d’enfance, ou il s’associe aux transfigurations de la mémoire. A cet égard, La Gloire de mon père constitue une œuvre remarquable. Marcel Pagnol y évoque la figure de ce père instituteur, qui disposait d’une culture étendue, savait communier avec la nature et possédait une haute conscience morale. Et l’enfant était comme ébloui lorsqu’il le suivait par la garrigue matinale. A la Bastide Neuve, Marcel Pagnol connut le bonheur auprès de ceux qui l’entouraient. Car il y avait encore là sa mère, toute tendresse, et l’oncle Jules, d’une sagacité sans égale. Ces êtres réels, il les a aimés, mais à mesure qu’ils s’étaient éloignés dans le temps, ils s’étaient, selon l’excellente remarque de Bernard de Fallois, transformés en personnages. Et dans le récit qu’il a fait de scènes vraies, le mémorialiste prend autant de plaisir que le romancier qui laisse courir son imagination, il est d’une certaine façon aussi libre. Pagnol a dit : « Si j’avais été peintre je n’aurais fait que des portraits. » Ceux qu’il a tracés des personnages de son enfance restent merveilleusement vivants. Alors que les cultures régionales s’efforcent de renouer avec leurs traditions et de retrouver leurs racines, il n’est pas mauvais de reconnaître en Marcel Pagnol une sorte de précurseur.


♦ « Le classicisme de Marcel Pagnol ne se nourrit pas seulement de textes, son inspiration se rafraîchit aux sources du quotidien. C'est la raison pour laquelle il n'est jamais pédant. Car il confronte toujours sa culture avec ses souvenirs ou ses découvertes. » Yvan Audouard. ♦ « Rien ne montre mieux que ce Temps des Amours combien le génie de Pagnol était avant tout un génie réaliste. Les choses, les gens, les scènes qu'il aime décrire sont toujours ceux de la vie. » Bernard de Fallois. ♦ « Il entrait du soulagement dans le triomphe réservé il y a vingt ans aux Mémoires de Pagnol. Enfin un créateur qui ne rougissait pas d'émouvoir avec des sentiments réputés ordinaires : sa fierté de fils d'instituteur, son humiliation devant la grille close d'un parc, une rodomontade de bouliste, la joie d'un doublé de bartavelles, l'odeur d’une garrigue à la fraîche ! » Bertrand Poirot-Delpech.

PAGNOL, Marcel ( Aubagne, 1895-Paris, 1974). Écrivain et cinéaste français. Après avoir enseigné l'anglais, il se consacra à la littérature. Une comédie de moeurs, Topaze (1928), lui apporta la notoriété. Mais la consécration populaire lui vint après trois oeuvres, adaptées à l'écran, et qui constituent une savoureuse trilogie marseillaise (Marias, 1929 ; Fanny, 1931 ; César, 1936). Pagnol, encouragé par le succès, réalisa aussi des films comme Angèle (1934), Regain (1937) et La Femme du boulanger d'après les oeuvres de Jean Giono. Il publia enfin un recueil de souvenirs : La Gloire de mon père, 1957 ; Le Château de ma mère, 1958 ; Le Temps des secrets, 1960 ; Le Temps des amours, posthume, 1977. Pagnol fut élu membre de l'Académie française en 1946.