OTTOKAR ou OTAKAR II
Roi de Bohême (1253/78). Petit-fils d'Ottokar Ier, il agrandit considérablement ses États, acquit la Moravie (1247), se fit proclamer duc d'Autriche en 1251 et épousa l'année suivante la dernière héritière des Babenberg, puis annexa la Styrie (1260), la Carinthie, la Carniole et l'Istrie (1269). À deux reprises (1254/55 et 1267), il mena des croisades contre les Prussiens païens, et il fonda la ville qui reçut en son honneur le nom de Königsberg (mont du Roi). Aidé dans son oeuvre d'administration par l'évêque Bruno d'Olmütz, il favorisa la colonisation allemande à l'Est. Il ambitionnait de jouer un rôle d'arbitre dans le Saint Empire, mais, à l'élection de 1273, il se vit préférer Rodolphe de Habsbourg. Ayant contesté cette élection, il fut mis au ban de l'Empire (1274) et Rodolphe l'obligea à rendre toutes ses possessions, sauf la Bohême et la Moravie (1276). Ayant repris la guerre en 1278, il fut vaincu et tué à la bataille de Dürnkrut, dans le Marchfeld. Voir AUTRICHE. L'Autriche des Habsbourg, et BOHÊME.
Ottokar II (v. 1230-1278) ; roi de Bohême [1253-1278].
L’un des plus grands souverains de la dynastie des Przemislides tchèques, O. est le second fils du roi Venceslas Ier et de Cunégonde, de la famille des Staufen. En 1248, à l’âge d’environ dix-huit ans, il est proclamé roi contre son père, mais ne peut s’imposer ; ce n’est qu’en 1253 qu’il devient définitivement roi de Bohême. Après l’extinction des Babenberg (1246) et en accord avec la Curie romaine, à laquelle il restera toujours attaché, il met à profit l’effondrement de la puissance des Staufen pour s’approprier l’Autriche (1251) et, pour légitimer son pouvoir, épouse Marguerite, soeur du dernier Babenberg, Frédéric II, et veuve du roi Henri [VII]. Mais O. ne réussit tout d’abord pas à prendre la Styrie à Béla IV de Hongrie. Ce n’est qu’au cours d’une expédition militaire dans les années 1260-1261 qu’il réussit à y prendre pied et à y installer comme gouverneur son fidèle chancelier, Brunon, évêque d’Olmütz [1245-1281]. En 1254, O. entreprend une croisade en Prusse et en Lituanie avec des troupes imposantes, de concert avec les Chevaliers teutoniques et Otton de Brandebourg. Königsberg (Kaliningrad) est fondée en 1255, et son nom est un hommage au roi (König) O. O. n’intervient pas dans les problèmes de la couronne allemande de 1256, mais prend parti pour les deux rois étrangers, Richard de Cornouailles et Alphonse de Castille. La seconde croisade en Prusse (1267-1268) ne donne aucun résultat, mais l’année suivante O. réussit à entrer en possession de la Carinthie, de la Camiole, de la marche de Windisch et de la terre d’Eger. Au fil du temps, il se crée un royaume dont le centre se trouve dans la zone frontalière germano-slave ; son influence s’étend ainsi, diffuse, de la Baltique à l’Adriatique. Avec une pareille ambition, il n’y a rien d’étonnant à ce qu’en 1273, il convoite la couronne royale allemande et qu’au moment de l’élection de Rodolphe de Habsbourg, il devienne l’adversaire du nouveau roi. Aucun arrangement n’est trouvé aux diètes de Nuremberg (1274) et d’Augsbourg (1275). Depuis Salzbourg, partent alors les hostilités contre O., condamné selon le droit de l’Empire et mis à son ban. Mais tous les territoires alpins n’y participent pas et, au sein du duché d’Autriche, on ne trouve pas d’attitude homogène à l’encontre d’O. L’opiniâtre et puissant adversaire de Rodolphe, que menacent également à l’est les Hongrois alliés aux Habsbourg, doit se soumettre après la défection de la noblesse d’Autriche et de Bohême. En 1276, aux portes de Vienne, il s’agenouille devant Rodolphe et renonce à l’Autriche, à la Styrie, à la Carinthie, à la Camiole, à la marche de Windisch et à la terre d’Eger ; il reçoit de Rodolphe l’investiture de la Bohême et de la Moravie. Mais cette paix ne dure guère. Le conflit qui a repris, s’achève en 1278 avec la défaite d’O. à Dümkrut dans le Marchfeld (26 août 1278) ; au cours de sa fuite, il est tué par des Autrichiens de son entourage. En Bohême et en Moravie, de même qu’en Styrie tant qu’il la posséda, O. a été un prince prévoyant, soutenu de manière exemplaire par son talentueux conseiller, Brunon d’Olmütz. A son époque, le mouvement de colonisation allemande est à son apogée. Le commerce et la circulation sont encouragés, l’industrie minière prospère, un artisanat à haut rendement apparaît, le tout sous la protection d’une justice et d’une administration intègres, largement détachées de leur assujettissement à l’Église. O. multiplie partout les fondations urbaines. En raison de l’ordre qui règne dans ses territoires, O. a pu compter sur la bourgeoisie allemande, à laquelle il a accordé de nombreux privilèges.
Bibliographie : C. Higounet, Les Allemands en Europe centrale et orientale au Moyen Age, 1989.