O’CASEY Sean
O’CASEY Sean (forme anglicisée de Shaun O’Cathasaigh). Dramaturge irlandais. Né à Dublin le 30 mars 1880, mort à Torquay (Devon) le 18 septembre 1964. Le plus jeune fils d’une famille nombreuse de pauvres gens handicapée par la mort prématurée du père, et de plus affligé lui-même d’une mauvaise vue, il ne fit guère d’études et ne commença à lire qu’à l’âge de treize ans. Il est vrai qu’ensuite il combla vite ses lacunes. Il travailla d’abord chez un quincaillier, puis, à partir de dix-neuf ans et douze années durant, comme cantonnier. Il devint un syndicaliste actif, apprit le gaélique et contribua fortement à mettre sur pied en 1914 l’armée républicaine irlandaise (Irish Citizen Army). Il prit part également à la rébellion pascale de 1916. Cependant, ses trois premières pièces avaient été refusées par le Théâtre de l’Abbaye de Dublin qui enfin reçut L’Ombre d’un franc-tireur, une comédie tragique en deux actes qui fut créée le 12 avril 1923. Sa singularité était de montrer les pièges que tend l’héroïsme et le talent de l’auteur pour imposer absolument ses personnages. Le succès fut tel que O’Casey put dès lors vivre en écrivain professionnel. Suivirent Message à Cathleen (1923) et Junon et le Paon (pièce montée en 1924, et publiée en 1925). Yeats vit dans cette seconde œuvre « un nouvel espoir et une vie nouvelle pour le théâtre », et le public fut lui-même enthousiaste. Mais un malentendu se creusait entre celui-ci et l’auteur, et la pièce suivante, La Charrue et les Etoiles, représentée en février 1926, fut fort mal accueillie. O’Casey montrait la part de la futilité et de l’incohérence dans les combats pour la libération de l’Irlande. Et, au-delà de celle-ci, il posait la question : où est la vraie libération si le pouvoir de l’Église subsiste, allié aux forces bourgeoises ? Malgré ce qu’avait de prodigieux la comédie humaine mise en place par l’écrivain au long de ses quatre actes — les actes III et IV évoquant l’insurrection pascale de 1916, les deux premiers un quartier pauvre de Dublin à 1a fin de 1915 —, le spectacle tourna à l’émeute. O’Casey décida alors de quitter l’Irlande pour l’Angleterre où il passa la suite de ses jours, non sans critiquer parfois la politique britannique avec une extrême vivacité. Il était loin d’avoir épuisé sa verve et ses thèmes, mais ses pièces n’eurent plus qu’un succès épisodique. En 1949 devait être publié, et en 1951 réédité un recueil provisoire - en deux volumes de son œuvre théâtrale. En gros, il semble qu’on puisse découvrir dans celle-ci deux points de vue entrecroisés : celui du révolutionnaire et celui du révolutionnaire regardant l’Irlande, son pays. Dans la première catégorie, on classerait alors des pièces comme : L’Etoile devient rouge, pièce engagée jouée à Londres en 1940, et où sont confrontés fascisme et communisme, Roses rouges pour moi, où O’Casey se souvient de sa ferveur syndicaliste (l’œuvre fut publiée en 1943, jouée à Londres cinq ans plus tard, puis au T.N.P. à Paris en 1959), Poussière pourpre (1951), où l’auteur ridiculise deux capitalistes anglais incapables de comprendre l’âme irlandaise. Dans l’autre catégorie, c’est toujours, à quelques variantes près, la satire du catholicisme irlandais : de sa pruderie, de son pharisaïsme. De 1949 à 1958, ce thème informera Coquin de coq (1949), Histoire de nuit (1951), Il est temps de partir (1951), Le Dispensaire (1952), On attend un évêque (1955), Les Tambours du Père Ned (1958).