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Noël Devaulx

Né à Brest en 1905, ingénieur sorti de l’Ecole Supérieure d’Ëlectricité, Noël Devaulx commence à écrire et publie son premier récit dans Mesures en 1939 durant la période (1930-1946) où son activité dans l'industrie est plusieurs fois interrompue par la maladie. En 1946, guéri, il se fixe à Paris et poursuit une double carrière d’ingénieur et d’écrivain. Noël Devaulx est un de ces auteurs secrets qui ont des lecteurs passionnés mais encore trop peu nombreux. Son écriture, à première vue, est transparente. Mais qui s’aventure dans cette transparence, comme dans l’eau des miroirs, se prend aux pièges des reflets, glisse dans l’irréel, avance vers un noyau obscur et fascinant. Du début à la fin du récit, souvent très court, quelque chose bascule et ce quelque chose n’est rien moins que la logique ou la confiance dans la solidité du réel. Noël Devaulx, essentiellement, est un auteur fantastique. Dès son premier livre, l’Auberge Parpaillon, dont les contes disait Jean Paulhan dans sa postface « sont à la fois denses et stricts, mystérieux et cependant exacts », le ton était donné : Noël Devaulx partait de l’évidence quotidienne, de la description réaliste pour mieux s’engouffrer dans la brèche du quotidien, miner la réalité par le rêve ou révéler que l’insolite est toujours déjà là, que la folie hante la raison comme le hasard trouble la nécessité, comme la mort est la compagne cachée de la vie. Ainsi cette ville portuaire dont il montre l’activité nous paraît d’abord familière. Mais qu’il précise que la mer s’en est retirée, et elle devient fantomale, symbole de nos illusions, allégorie de la vie et de la mort. Dans ses livres suivants, du Pressoir mystique au récent et troublant Lézard d’immortalité en passant par les longs récits, Compère, vous mentez et Sainte Barbegrise, Noël Devaulx n’a cessé de poursuivre, avec une rigueur qu’on pourrait paradoxalement dire de clinicien, cette recherche de l’étrange, cette mise à jour (dans la lumière de la parabole) d’un monde nocturne ou onirique qui serait comme l’envers ou la clé du nôtre. Sans que cela pèse, cette recherche est nourrie de savoir. Si une usine désaffectée dans la banlieue de Paris (Avec vue sur la zone) ouvre sur un univers pittoresque et magique, ce passage des frontières (mais justement un des recueils de nouvelles ne s’appelle-t-il pas Frontières) peut se faire à partir des figures d’un tableau (Frontières, le Lézard d’immortalité), de la découverte d’une voie romaine (la Dame de Murcie) d’une visite dans un musée ou un immeuble historique ou d’une rêverie sur des textes sacrés, chrétiens (Au jardin de mon père s’inspire des images de la Genèse) ou orientaux (le Lézard d’immortalité). Toute la science de Devaulx consiste à transformer les données du savoir en machine à produire l’imaginaire, le fantastique.

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