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NICOLAS DE CUES

NICOLAS DE CUES. Né à Cues, sur la Moselle, entre Trêves et Coblence, Nicolas Krebs ou Chrippfs, dit Nicolas de Cues (1401-1464), prêtre catholique élevé à la dignité de cardinal en 1448, philosophe et savant, doit être considéré comme un des grands penseurs du XVe siècle. Sa méthode intellectuelle, la coïncidence des opposés, dont il a eu l'intuition au cours d'une traversée, en 1437, n'est pas sans faire penser à la dialectique hégélienne. Esprit très ouvert et homme de dialogue, il manifesta un esprit conciliant à l'égard des hussites, alors qu'en 1450 il était légat itinérant du pape, à travers l'Allemagne, la Bohème et les Pays-Bas. Son ouvrage la Paix dans la foi est particulièrement audacieux : il présente un christianisme philosophique qui permettrait une synthèse des religions et une réconciliation des peuples. Dans la Cribatio Alchorani (1461) il examine avec sympathie le Coran. La Docte Ignorance de 1437 expose, à la fois, la volonté de sortir de la logique aristotélicienne, des esquisses mathématiques et une cosmologie révolutionnaire. Par ses tendances mystiques, Nicolas de Cues est à rapprocher de maître Eckart. Il est l'auteur de nombreux ouvrages théologiques, philosophiques, et scientifiques : le Dieu caché (1444), la Quête de Dieu, la Filiation divine (1445), l'Annonciation (1446), Dialogues sur la Genèse (1447), la Vision de Dieu (1453), Compléments mathématiques, la Quadrature du cercle, le Béryl (critique de la logique d'Aristote), l'Être-Pouvoir (1460), le Non-Autre (1462), la Chasse de la sagesse, le Jeu de boule, Résumé de la Cime de contemplation (1462-1463). Ajoutons à tout cela de nombreux sermons. Nicolas de Cues fut aussi un homme d'action, principalement en tant que vicaire du pape Pie II au temporel.

Nicolas de Cues (1400/1401-1464) ; cardinal allemand. Né d’un batelier aisé, Johannes Cryffts (en allemand Krebs, d’où son surnom latin de Cancer) à Cues (aujourd’hui Bemkastel-Kues) sur la Moselle, près de Trêves (d’où son autre surnom, Cusanus), N. aurait reçu sa première formation chez les Frères de la Vie commune de De venter. En 1416, il est inscrit à l’université de Heidelberg, avant d’étudier le droit, sans doute aussi la philosophie et les mathématiques à Padoue (1417-1423). Il y fait connaissance avec le futur cardinal Giuliano Cesarini. Il complète sa formation à Cologne (1425) et devient secrétaire du cardinal Orsini, légat pontifical en Germanie (1426). Ordonné prêtre en 1432, il se lie avec les futurs papes Nicolas V et Pie IL En 1433-1434, il prend part au concile de Bâle sur l’invitation du cardinal Cesarini. Il se fait remarquer en prônant une doctrine conciliariste adoucie (De concordantia catholica). Il part de l’idée que la papauté et la prêtrise sont instituées de la même manière par Dieu : la primauté du pape est un fait historique, qui ne peut cependant empêcher que le concile possède un pouvoir toujours supérieur et se trouve au-dessus du pape, qui ne peut donc ni annuler ni ajourner ses réunions. De même que le pape est primas inter pares, l’empereur est le premier d’entre les rois. Tous deux sont, à leur manière, égaux et indépendants l’un de l’autre ; il n’existe qu’une différence fonctionnelle dans la mesure où l’un est le chef de l’Église sacerdotale et l’autre le souverain de l’Église impériale. C’est de son élection réglementée que l’empereur tient son pouvoir, qui s’étend au pape et au clergé pour autant qu’ils ont des possessions temporelles. De même que le Concile général représente la communauté de l’Église, les assemblées des ordres de la nation, en coopération avec l’empereur, doivent édicter les lois qui régissent l’Empire. L’empereur leur est soumis, de même que le pape l’est aux décisions du Concile, selon le vieux principe canonique, fondateur de l’idée médiévale de représentation, que ce qui concerne tout le monde doit être approuvé par tous (Quod omnes tangit ab omnibus approbetur). Ainsi N. attribue-t-il au peuple l’origine de tout pouvoir ; mais il considère que l’ordre social a été donné par Dieu, car selon lui les difficultés de l’Empire et de l’Église ne peuvent être surmontées que par un pouvoir structuré qui, grâce à l’intervention divine, émane du consensus général. Voyant qu’à Bâle le parti conciliariste défend ses exigences de manière toujours plus radicale, N. se rallie en 1437 à Eugène IV et appuie le transfert du concile à Ferrare. Le pape l’envoie en mission à Constantinople (1438), pour préparer le terrain à la nouvelle union des Eglises latine et grecque. Le voyage a une tout autre importance pour N. : il commence à réfléchir à l’unification de toutes les religions, y compris celle des juifs et des Arabes ; et surtout, il a alors l’intuition, par inspiration divine, de la « docte ignorance ». Commence alors pour N. une double expérience : celle de propagandiste et d’acteur d’une réforme de l’Église, initiée par Rome ; celle d’un mysticisme profond, où il fait une magnifique synthèse de la mystique allemande, « populaire » si l’on peut dire, et des nouveaux courants philosophiques humanistes, fortement teintés de néoplatonisme. En 1448, il devient cardinal-prêtre du titre de San Pie-tro in Vincoli et en 1450, évêque de Brixen/ Bressanone ; la charge, liée à de vastes pouvoirs temporels, le met aux prises avec le chapitre de sa cathédrale, rétif devant ses essais de réforme, et avec le duc de Tyrol. N. est légat pontifical en 1449 pour réformer l’Église allemande, en 1454 pour traiter avec les Hussites, en 1459 pour ramener la paix entre familles de la noblesse romaine. Il poursuit parallèlement la rédaction de plusieurs traités théologico-mystiques, dont les plus importants sont le De docta ignorantia et le De conjecturis. Il y développe en particulier l’idée, pleinement humaniste, christianisée dans une habile synthèse, que l’homme est un microcosme reflétant tout l'Univers, Dieu compris. Il meurt le 11 août 1464 à Todi, avant d’être enseveli dans son église cardinalice de Rome, mais son cœur est envoyé à l’hospice des pauvres qu’il a fondé à Kues en 1458. L’hospice conserve sa magnifique bibliothèque, et les études sur N., figure intellectuelle essentielle de l’Allemagne et de l’Italie à la charnière du Moyen Age et de la Renaissance, sont depuis plusieurs décennies promues par une « Cusanus Gesellschaft » et un « Cusanus Institut ».

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