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MUSSET Alfred de

MUSSET Alfred de 1810-1857
Après de brillantes études au lycée Henri IV, le jeune Alfred — il est né à Paris le 11 décembre 1810 — entreprend des études de médecine, puis de droit, enfin de peinture. Mais dès 1928 a paru un premier poème de lui et il fréquente le Cénacle de Victor Hugo. Musset est alors un brillant jeune homme, à qui rien ni personne ne résiste. Il commence à publier dans des revues les poèmes qui seront rassemblés dans ses Poésies complètes (1840) en même temps qu’il écrit plusieurs pièces de théâtre dont Les Caprices de Marianne (1833), On ne badine pas avec l'Amour (1834), Lorenzaccio (1834), Il ne faut jurer de rien (1836) et le très célèbre roman La Confession d'un Enfant du Siècle qui paraît en 1836. Entre-temps, en juin 1833, il a rencontré George Sand: fortes amours, brèves amours: à Venise, où il est tombé malade, elle le soigne, puis le délaisse (fin de l’hiver 1834). Puis la tonalité change; il a trente ans, son œuvre est faite — il n’écrira à peu près plus sauf II faut qu'une Porte soit ouverte ou fermée — et sa jeunesse est loin. Tout devient gris: maladies (1840, 1843, 1844), dépression, alcoolisme aussi, échecs amoureux qui se répètent, échecs à l’Académie française (1848 et 1850), révocation du poste de bibliothécaire (1848). Gris, pas noir: il finit par être élu à l'Académie (dont, selon le mot d’un de ses collègues il s’absinthera souvent), il reçoit la légion d’honneur, il a des amis, n’est pas dans la misère. Mais le public l’oublie, lui le poète désormais déchu. Il mourra en 1857. Trente personnes accompagneront au Père-Lachaise celui qui avait été, à peine vingt-cinq ans plus tôt, la coqueluche du Paris romantique. Dans les manuels, Musset a longtemps figuré dans le quarté de tête des romantiques français, La Nuit de Mai et La Nuit de Décembre étaient le passage obligé de tous les adolescents en quête de pathétique et de sentiments. Puis la cote des romantiques a baissé et celle de Musset avec, jusqu’à ce que l’on «redécouvre» son théâtre qui demeure le meilleur de son œuvre. On aurait tort pourtant de dédaigner sa poésie; on l’a dite facile, prolixe, tout entière soumise aux caprices du don, du génie, de l’inspiration... C’est aller un peu vite, et ne pas entendre chez Musset la voix de la poésie, celle qui parlera chez Verlaine, chez Laforgue, n’est-ce pas céder trop vite à des a priori issus de vagues souvenirs scolaires?


Un Musset aurait épousé, au xvie siècle, une petite cousine du poète Joachim du Bellay... Victor de Musset-Pathay, chef de bureau au ministère de l'intérieur, cultive lui-même la muse. Son fils Alfred naît le 11 décembre 1810. Enfant prodige puis adolescent brillant, il hésite, après un baccalauréat obtenu à 17 ans, entre Polytechnique et la poésie... et choisit la seconde. Ses premiers poèmes séduisent Sainte-Beuve et Théodore de Banville. Enivré par le succès, il vit comme un dandy, s'affichant dans les lieux à la mode dans des vêtements voyants. Ses Contes d'Espagne et d'Italie, en 1830, sont applaudis. La Nuit vénitienne, jouée en décembre, est un échec retentissant. Le premier. Il en restera meurtri. En 1833, année d'une autre pièce, Les Caprices de Marianne, il rencontre George Sand chez le directeur de La Revue des Deux Mondes qui publie ses œuvres. (À l'époque, les pièces sont fréquemment publiées sans être pour autant jouées.) Le Tout-Paris commence à peine à s'amuser de leur liaison que deux mois après leur première rencontre, c'est déjà le drame : Musset, alors qu'il se promenait en forêt, est pris d'une crise de folie. Il affirme avoir vu passer un spectre, son double, mais vieilli, ivre, malade... George Sand, afin de le guérir, l'emmène à Venise où il court les cabarets, avant d'être en proie à une nouvelle crise. Et George Sand de s'éprendre du médecin qui le soigne... Revenu à Paris, Musset reprend ses habitudes de débauche. Pendant deux ans, au cours desquels il achève Lorenzaccio et On ne badine pas avec l'amour (1834), ce sera une suite de disputes, de réconciliations, de ruptures avec George Sand, qui finit par aller se réfugier à Nohant. Instable, malade, souvent ivre, Musset écrit La Confession d'un enfant du siècle (1836), Les Nuits (1835-1837), transcription poignante de ses amours avec George Sand... tout en entretenant des liaisons orageuses avec ses admiratrices, parmi lesquelles la comédienne Rachel. Nommé conservateur de la bibliothèque du ministère de l'intérieur en 1838, il tombe gravement malade. Le Tout-Paris littéraire, qui ne lui pardonne pas ses frasques, le prétend déjà fini. À 28 ans ! Il en a conscience et ébauche Le Poète déchu, un roman qu'il n'achèvera jamais. Ses pièces sont refusées par les directeurs de théâtre pour « immoralité » et « apologie de l'adultère ». En 1847, Un caprice est monté à la Comédie-Française. Musset renoue avec le succès, confirmé l'année suivante par le bon accueil fait à Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée et II ne faut jurer de rien. L'Académie française, toutefois, repousse sa candidature et il est révoqué de son poste de conservateur. Il essuie d'autres échecs avant d'être finalement admis à l'Académie en 1852. Il n'a que 42 ans mais c'est un homme vieilli, détruit par l'alcool, rongé par le dégoût de lui-même et le manque d'inspiration, et qui s'exaspère de voir ses pièces encore repoussées sous le prétexte qu'elles ne sont plus « au goût du jour ». « Ame trop ardente pour se contenter du réel de la vie », selon Stendhal, il s'éteint le 2 mai 1857.