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MOUNIER (Emmanuel)

MOUNIER (Emmanuel). Universitaire français (1905-1950) qui a développé une théorie personnaliste ouverte aux courants modernes (phénoménologie, freudisme, marxisme) en gardant une référence chrétienne. Il a fondé en 1932 la revue Esprit, destinée à un vaste public intellectuel, et qui regroupait des personnes autour des thèmes qu'elle diffusait. Il s'est intéressé à la caractérologie.
 Philosophe français. Disciple de Bergson et de Péguy, il fonda en 1932 la revue Esprit, qui tint un rôle important dans le mouvement intellectuel français entre les deux guerres. Hostile à l'égoïsme capitaliste et bourgeois, il tenta, avec le personnalisme, de constituer une philosophie agissante, conciliant christianisme et préoccupations sociales.
Œuvres principales : Traité du caractère (1946) ; Introduction aux existentialismes (1946) ; Le Personnalisme (1949).
MOUNIER (Emmanuel), philosophe et écrivain français (Grenoble 1905 - Châtenay-Malabry 1950). Il conçut, à la lecture de Péguy, l'idée d'une synthèse entre le christianisme et le socialisme, qu'il nomma le « personnalisme » : son principe est de maintenir « le primat de la personne humaine sur les nécessités matérielles et sur les appareils collectifs qui soutiennent son développement ». Pour cela, il fallait que le philosophe s'engageât dans la vie réelle et dans l'histoire. Mounier quitte alors l'Université et renonce à la tâche un peu abstraite de l'enseignement pour fonder, en 1932, la revue Esprit. Ses deux maximes étaient d'« être soi-même » (l'éveil de la personne) et de travailler à améliorer les conditions de la vie en société (pédagogie de la vie communautaire). On lui doit notamment : Révolution personnaliste et communautaire (1935), l'Affrontement chrétien (1945), Liberté sous conditions (1946), Qu'est-ce que le personnalisme? et Introduction aux existentialismes (1947), Traité du caractère (1948).
MOUNIER Emmanuel. Philosophe et publiciste français. Né le 1er avril 1905 à Grenoble, mort le 22 mars 1950 à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine). Après avoir fait ses études au lycée de sa ville natale, il passe son agrégation de philosophie en 1928, et subit, par l’intermédiaire de son maître Jacques Chevalier, l’influence de Bergson, puis celles de Maritain, de Péguy surtout, auquel il consacre son premier livre, La Pensée de Ch. Péguy (1931). Entrant dans la vie intellectuelle au plein moment de l’évolution vers la gauche de certains milieux catholiques, à la suite de la condamnation de L'Action française, il fonde, en 1932, la revue Esprit, qui se fixe la double tâche de séparer les valeurs spirituelles de la société bourgeoise, considérée comme condamnée par Mounier, pour les réincarner dans une société nouvelle, à base ouvrière. Mounier se trouve donc bientôt entraîné dans les luttes politiques de l’époque : reprenant le vieil espoir de Lamennais et de Sangnier de concilier le christianisme et la révolution, il adopte une attitude fort délicate, riche de nuances et de subtilités, car tout en cherchant une collaboration avec les communistes, il répugnera toujours à leurs solutions extrêmes et surtout à leur matérialisme (Feu la chrétienté et Certitudes difficiles). C’est surtout à partir de 1944 que Mounier aura une certaine influence sur les catholiques engagés dans la Résistance, influence qui tenait autant à son rayonnement personnel qu’à sa pensée dont il a donné une synthèse dans Le Personnalisme (1950). L’attention qu’il ne cessa de donner aux divers courants de la pensée moderne — v. Introduction aux existentialismes, Traité du caractère, La Petite Peur du XXe siècle — contribua aussi à son succès auprès des jeunes chrétiens décidés à rompre l’isolement de l’Eglise dans le monde contemporain.


Emmanuel Mounier : un christianisme engagé dans le siècle

De formation philosophique, Mounier se partage entre l’influence de Bergson et celle de Péguy, à qui il consacre son premier ouvrage en 1931, La Pensée de Charles Péguy. Sa véritable importance intellectuelle se concentre cependant dans la fonda­tion de la revue Esprit, en 1933, qui gardera tout au long du siècle, à travers quelques infléchissements et recompositions de détail, une fidélité à ses préoccupations d’origine : constituer un laboratoire d’analyse, un observatoire sur l’évolution du monde ambiant, d’où puissent découler des principes de jugement et d’action cohérents avec l’enseignement profond des Évangiles.
Le dernier avatar du terme « esprit »• résistant à l’usage fonc­tionne ici à contresens de la fameuse philosophie de l’Esprit. De couverture qu’il était pour tous les compromis, les dérobades et les atermoiements, le voici promu mot d’ordre des engagements irréversibles. C’est avec l’engagement dans la Résistance des cadres et intellectuels chrétiens que l’identité d’Esprit va se pré­ciser et rayonner jusqu’à la Libération, où elle se localisera dans cette véritable communauté spirituelle de vie de Châtenay- Malabry : Mounier y mourait en 1950 et des personnalités comme Domenach, Fraisse, Ricœur allaient s’y côtoyer pendant des années.
Mais l’engagement de Mounier n ’était pas exempt de subtili­tés. Son inclination à se rapprocher de la gauche militante était balancée par son souci de ne pas se couper des traditions de la France profonde dans des valeurs proches de celles qu’incarnait le pétainisme ; de là, certaines ambiguïtés de l’École des cadres d’Uriage, où Mounier eut un rôle primordial ; ouverte de 1940 à 1943, beaucoup de ceux qui allaient faire la France de l’après-guerre y passèrent.
La base philosophique de ce mouvement, qui ouvrait le chris­tianisme moderne à l’économique, au politique et au social, s’exprime dans le livre éponyme de Mounier, Le Personnalisme, publié à la mort de son auteur et dans l’imposant Traité du carac­tère (1944) où elle sert d’introduction sous forme de profession
de foi. Le titre avait déjà servi tel quel à un ouvrage de Renouvier paru en 1902, mais avec un usage très différent.
La notion de personne semble issue du kantisme, mâtiné de christianisme, avec un rien de juridisme. Particulièrement opéra­tionnelle, elle était promise à un franc succès par sa souplesse et sa facilité à se représenter. Justement, son opposition au carac­tère est un bon indice pour la saisir. À l’opposé de tout ce qui dans l’individu constituerait un conditionnement, une charge et une détermination matérielle, la personne désignerait ce qu’il y a en chacun d’irréductible, d’éminemment sujet au respect, de divin si l’on veut, de libre en tout cas. Rien qui fasse contraste avec le moi de Lavelle ou de Marcel, à ce stade. La divergence commence au point où Mounier insiste sur le devoir de partici­pation au monde, sur l’exigence de générosité aux autres et d’intérêt au sort collectif, qui incombent à cette personne plutôt que l’exaltation de son unicité incomparable ou de son destin surnaturel. De là, l’attention portée à la gestion du social, à tous ses niveaux : de l’urbanisme à l’économie, de l’éducation à l’organisation industrielle, en prenant soin, sur tous ces terrains, à faire pièce à une lecture marxisante et à ne pas se laisser confondre avec elle. Une hiérarchie devra surplomber toute action, qui subordonne le souci du monde à la préoccupation éminente de la personne et de sa dignité. D’un bout à l’autre, les méthodes et le style de pensée restent proches, chez Mounier, de l’existentialisme, sur lequel d’ailleurs il écrit une Introduction. Il se centre sur le primat de la communauté et de la communion substituée à la solitude et sur l’efficacité de l’action sociale de préférence au fatalisme tragique.