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MIDAS

MIDAS. Fils de Gordias et de Cybèle, ou d’une prophétesse de Telmessos. Midas succéda à son père sur le trône de Phrygie. Il joue un rôle dans plusieurs légendes. Dans la première, le vieux Silène, qui avait été le tuteur de Dionysos, fut capturé, ivre, par des paysans de Lydie et amené, enchaîné de guirlandes de fleurs, à Midas ; celui-ci reconnut le compagnon de Dionysos, le traita avec bienveillance et l’hébergea avec prodigalité pendant dix jours et dix nuits. Puis il ramena Silène en Lydie et le rendit au dieu. Dionysos fut si content du retour de Silène qu’il offrit à Midas de lui donner ce qu’il désirerait ; le roi demanda que tout ce qu’il toucherait fût changé en or. Midas fut tout d’abord ravi des résultats, mais sa joie se transforma en horreur lorsqu’il se rendit compte que la nourriture et les boissons étaient aussi transformées en or. Il finit par supplier le dieu de lui retirer ce don, et reçut l’ordre de se laver dans l’eau du Pactole; depuis, le sable du fleuve resta chargé de paillettes d’or. D’après une variante de la légende, Midas s’aperçut un jour que Silène avait coutume de venir secrètement, la nuit, boire à la fontaine de son jardin ; il mélangea du vin à l’eau, si bien que Silène s’enivra. Midas le captura, car il désirait que Silène lui enseignât la sagesse, ce qu’il fit. Dans une autre histoire, il s’agit d’un concours de musique entre Apollon et Pan (ou, selon une autre tradition, Marsyas). Lorsque Tmolos, le juge, attribua le prix à Apollon, Midas exprima son désaccord. Sur quoi, Apollon, en colère, lui fit pousser des oreilles d’âne. Midas réussit à dissimuler à tout le monde cette humiliation en portant un bonnet phrygien, mais il dut montrer ses oreilles à son barbier. Le pauvre homme, qui avait reçu l’ordre de se taire, sous peine de mort, ne sut rester muet plus longtemps; il creusa un trou dans le sol, y chuchota la terrible nouvelle et reboucha le trou. Malheureusement pour Midas, la terre fit pousser des roseaux, qui lorsqu’ils étaient agités par la brise, répétaient au monde entier le secret du roi : «Le roi Midas a des oreilles d’âne ! »
Midas ; roi de Phrygie [v. 738-696 av. J.-C.].
Héritiers de l’Empire hittite d’Anatolie, les Phrygiens apparaissent après la grande invasion des peuples vers 1250 avant J.-C. Cette tribu indo-européenne originaire de Thrace traverse l’Asie Mineure en la conquérant. Le roi assyrien Tiglat-Pileser 1er évoque vraisemblablement les Phrygiens sous le nom de Moushki (ce nom semble aussi désigner les Mysiens) vers 1115 avant J.-C., comme ses adversaires sur l’Euphrate supérieur. Puis, vers le VIIIe siècle, des Phrygiens s’installent dans les régions d’Antiane, de Pessinonte et de Gordion, la capitale fondée avant 725, et forment plusieurs principautés. À la fin du VIIIe siècle avant J.-C., les Annales de S argon II signalent que le roi des Moushki, Mitas (Midas) a tenté d’inciter à la rébellion des vassaux des Assyriens en Syrie du Nord et qu’il a même voulu, en Cilicie, avancer jusqu’à la côte, mais a été repoussé. Malgré son alliance avec le royaume de l’Urartu, M. ne peut résister à la puissance militaire des Assyriens : il se soumet et paye son tribut. À l’ouest, M. vit en parfaite entente avec ses voisins immédiats, les Grecs, auxquels nous devons d’autres informations : sa femme était une Grecque originaire de Kyme, en Eolie ; il aurait appris l’alphabet de Rhodes, peut-être par l’intermédiaire des Lyciens, à moins qu’une écriture alphabétique soit venue du sud-est de l’Anatolie où l’influence phénicienne est attestée. Hérodote rapporte (1,14) qu’il aurait offert à Delphes un trône d’or. Sa richesse proverbiale semble avoir été transposée dans la légende grecque. Vers 680, le royaume phrygien succombe aux bandes cimmériennes, qui, cédant à la pression des Scythes, pénètrent par le Caucase en Asie Mineure. Selon la tradition, M. se donna lui-même la mort en buvant du sang de taureau. Pays du culte de Kubèbè (= l’ancêtre de Cybèle, la mère des dieux) et d’Attis, la Phrygie connaît une nouvelle expansion vers le début du VIe siècle et sa culture s’étend vers la région côtière de la mer Noire. Les fouilles américaines de Gordion sur le Sakarya (Sangarios) ont enrichi nos connaissances sur la culture matérielle de ce peuple jusqu’ici mal connue (remarquable artisanat d’art provenant de tumulus de tombes richement décorés, voir aussi les façades sur le « tombeau-rocher » à Afiyon-Karahisar).
Bibliographie : D. Arnaud, Le Proche-Orient ancien, 1970 ; J.-G. Macqueen, Les Hittites, 1985.


PACTOLE. Petite rivière de Lydie passant par Sardes, sa capitale. Elle charriait des paillettes d'or grâce auxquelles Cré-sus aurait constitué une immense fortune. Voir Lydiens.

Pour avoir porté secours à Silène, le roi de Phrygie, Midas obtient en récompense de Dionysos que ce dernier exauce un vœu de son choix. Le goût des richesses pousse l’homme à réclamer le pouvoir de transformer en or tout ce qu’il touche. C’est parler sans avoir réfléchi : Midas ne peut plus rien porter à sa bouche sans que cela ne se transforme en métal précieux. Il supplie alors Dionysos de lui reprendre ce don. Le Dieu lui ordonne de se laver les mains dans les eaux du Pactole, fleuve qui traverse le pays et dont les eaux sont depuis chargées en or. Le mythe vaut beaucoup - non pour une moralité qui condamnerait l’appât des richesses et la précipitation -mais pour l’usage qu’en firent les poètes et notamment Rimbaud, superposant à la figure attendue de l’alchimiste, celle, plus surprenante, de Midas. Capable de transformer la boue de l’existence en or, le poète, du même coup, se condamne à une solitude fatale : « Pleurant, je voyais de l’or - et ne pus boire ».