Databac

Mao Zedong

Mao Zedong (1893-1976). D’origine paysanne, il participa en 1921 à la formation du Parti communiste chinois. A partir de 1927, il dirigea l’armée révolutionnaire et se réfugia en 1935 dans l’ouest du pays, au terme de la Longue Marche. Il réussit en 1949 à éliminer Jiang Jieshi (Tchang Kaï-Tchek) et proclama la création de la République populaire chinoise. Seul maître du pouvoir de 1949 à 1959, il le reconquit à partir de 1966 grâce à la Révolution culturelle.

MAO ZEDONG (1893-1976)

Dirigeant communiste chinois.

Mao Zedong (Mao-tse-tung, Mao tsé-toung) est né le 26 décembre 1893 à Shaoshan (Hunan), dans une famille de paysans aisés ; son père était marchand de céréales, et employait plusieurs ouvriers agricoles. Rebelle, il quitte à seize ans la ferme familiale pour une école du voisinage, puis gagne en 1911 la capitale provinciale, Changsha, où il devient quelques mois soldat de la révolution. Il entre à vingt ans à l’école normale de la ville, et se retrouve en 1918 à Pékin, où il obtient un emploi à la bibliothèque de l’université. Gagné au marxisme en 1920, il représente le Hunan en juillet 1921, à Shanghai, lors de la fondation du Parti communiste chinois (PCC) par treize délégués nationaux. C’est vers 1926, comme directeur à Canton de l’Institut des cadres du mouvement paysan, qu’il acquiert la certitude que la révolution chinoise sera paysanne ou ne sera pas, comme le montre son Enquête sur le mouvement paysan dans le Hunan datant de 1927.

De trente-quatre à cinquante-six ans, il mène une carrière de combattant révolutionnaire, justifiant la violence, nécessaire à la révolution, et appliquant sans relâche ses deux principes majeurs, la constitution d’une Armée rouge et l’enracinement local dans des bases révolutionnaires, selon lui seule stratégie adaptée à un pays « semi-colonial » arriéré. Jusqu’en 1935, il demeure minoritaire au sein du PCC. Installé dans le Jiangxi, il recueille les débris de la direction du PCC de Shanghai, décimée par Tchiang Kai-chek (Jiang Jieshi) et le Kuomintang (Guomindang). C’est à partir de la Longue Marche qu’il devient en janvier 1935 le chef de moins en moins contesté du Parti. Réfugié dans le nord-ouest de la Chine, à Yan’an, il prend le temps, installé à l’arrière des combats, de réfléchir et d’écrire.

Dès cette époque, il entre dans la légende, qui lui confectionne une personnalité aussi énigmatique qu’exceptionnelle : pourvu du calme et de l’énergie à la hauteur de sa tâche de géant, simple d’allure et de goûts comme le paysan hunanais, délicat et sensible à la manière de l’artiste, etc. Après 1949, le portrait se fait encore plus favorable, encore plus éloigné de l’être de chair et d’os qui l’inspire. Et pourtant, les vingt-sept années qui lui restent à vivre correspondent peu à l’image de sérénité qui a été diffusée ultérieurement lors de la mise en place du culte de la personnalité, mélange chinois de culte stalinien et de culte impérial. Mao n’est pas resté au-dessus de la mêlée, il a participé, il a changé à plusieurs reprises de tactique ou de politique, il n’est demeuré à l’abri ni des coups, ni des échecs.

Il semble avoir réussi à imposer l’essentiel de ses vues jusqu’au lancement du Grand Bond en avant, dont il porte la responsabilité (1958), mais à partir du VIIIe congrès du PCC, réuni en 1956, Mao s’est souvent contenté de définir les grandes orientations, de secouer de temps à autre la bureaucratie du Parti. En juillet 1959, la politique maoïste fait l’objet d’une critique en règle, conduite par l’un des premiers compagnons de lutte de Mao, Peng Dehuai (1898-1974), le prestigieux ministre de la Défense. Plus que cette critique, le désastre (la famine) entraîne une sérieuse éclipse de l’autorité de Mao entre 1959 et 1962. À partir du 10e plénum du VIIIe congrès du PCC, en septembre, il tente de reconquérir le Parti, avec le soutien actif de Lin Biao (1907-1971), successeur de Peng Dehuai, et organisateur d’une « maoïsation » généralisée de l’armée.

L'échec de tentatives « moins coûteuses » a pu décider Mao à déclencher la Révolution culturelle. Dès 1966, elle rétablit avec éclat Mao au premier rang et porte au pouvoir ses proches, dont sa femme Jiang Qing et son ancien secrétaire Chen Boda.

Après l’élimination successive de Chen Boda (dès 1970) et de Lin Biao (en 1971), l’application sous l’égide de Zhou Enlai, puis de Deng Xiaoping revenu au pouvoir, d’une politique pour le moins en rupture avec les idéaux de la Révolution culturelle dans les dernières années de la vie de Mao, pose la question du rôle qu’il continuait d’exercer. Acceptait-il de se renier en donnant son aval à une ligne proche de celle qui prévalait dix ans plus tôt et à laquelle il avait mis un terme en déclenchant la Révolution culturelle ? Ou combattait-il en sous-main Zhou, puis Deng, en soutenant les campagnes menées contre eux par Jiang Qing et ses associés ? La mise à l’écart, au lendemain de la mort du Premier ministre Zhou en janvier 1976, de son héritier naturel, le premier vice-Premier ministre Deng, fournit une première réponse (Deng n’aurait pu être écarté sans le consentement de Mao), confirmée trois mois plus tard par l’élimination officielle de Deng Xiaoping, rendu responsable des « incidents contre-révolutionnaires » de la place Tian An Men (Pékin, 5 avril 1976). Ces événements (une manifestation qui tourna à l’émeute) constituaient un désaveu sans précédent du « vieux lion ». La disparition de Mao, quelques semaines plus tard (9 septembre 1976), montre sans ambiguïté que la survie d’un octogénaire entêté bloquait l’adaptation trop longtemps retardée du régime issu de la révolution. Débarrassé du Père fondateur, celui-ci a en effet évolué à partir de 1976 dans un sens diamétralement opposé au cap que le « grand timonier » s’acharnait à maintenir. Le maître d’œuvre de la « démaoïsation » n’était autre que le revenant Deng Xiaoping…

Mao Zedong [Mao Tsé-Toung] (Shaoshan, Hunan, 1893-Pékin 1976); homme politique chinois.

La figure de M. s’identifie avec la révolution chinoise et l’élaboration d’une forme originale de communisme en Asie. Né le 26 décembre 1893 dans une famille paysanne aisée du Hunan, M. reçoit une éducation classique, fondée sur l’enseignement de Confucius et l’étude des auteurs anciens. Marié dès l’âge de 14 ans par son père dont il conteste l’autorité, il rejoint à l’âge de 18 ans, en octobre 1911, l’armée républicaine de Sun Yat-Sen (Tsui-Heng), puis poursuit ses études à l’École normale du Hunan (1913-1918) et s’initie à la pensée européenne des Lumières et du XIXe siècle libéral ; il s’engage dès 1917 dans le mouvement de protestation étudiante. Bibliothécaire à l’université de Pékin en 1919, puis établi à Shanghai, il prend connaissance de la pensée de Marx à la suite de la révolution soviétique de 1917 et se rallie aux idées communistes. Il participe en juillet 1921 à Shanghai, en qualité de secrétaire, au premier congrès du parti communiste chinois (PCC) et anime à partir de 1922, aux côtés de Liu Shaoqi, les premières grèves ouvrières de la Chine contemporaine dans les mines d’Anyuan et dans le Hunan. Devenu membre du comité central du PCC, il se rallie aux thèses du IIIe congrès du Parti (1923) qui préconisent une réunion avec le Guomindang (Parti national du peuple) de Sun Yat-Sen et Tchang Kaï-Chek (Jiang Jieshi). C’est au milieu des années 1920 que M. rompt progressivement avec les thèses du marxisme classique européen qui situent à l’avant-garde de la lutte révolutionnaire les masses ouvrières, peu nombreuses dans une Chine encore faiblement industrialisée. En 1926, M. rédige une Analyse des classes dans la société chinoise qui privilégie au contraire les capacités révolutionnaires des classes paysannes ; son texte est interdit de publication par Chen Duxiu, principal dirigeant du PCC. Il réaffirme ses positions dès l’année suivante dans un Rapport d’enquête sur le mouvement paysan du Hunan (1927) qui exalte la voie paysanne vers la révolution, et s’oppose résolument au cours du Ve Congrès du PCC (avr. 1927) à l’orientation ouvriériste de Chen Duxiu ; mais l’échec d’une première tentative révolutionnaire à la tête d’une armée de paysans et d’ouvriers entraîne son exclusion du Comité central et du bureau politique du PCC et sa fuite dans les monts Jinjang (nov. 1927). C’est là qu’il élabore, avec le soutien des principaux chefs militaires du mouvement communiste (Zhu De, Peng Dehuai, Zhou Enlai), la stratégie des « bases rouges » : organisation de milices paysannes, partage des terres et mobilisation politique des masses en faveur de la révolution. Cette politique est approuvée, non sans quelques réserves de la part du Komintern, par le VIe congrès du PCC (Moscou, juin 1928), et une République soviétique chinoise, dont M. est élu président, est proclamée au Kian-si en novembre 1931. Harcelées par les troupes nationalistes de Tchang Kaï-Chek, devenu président de la république de Chine en octobre 1928, les forces communistes, au terme de six campagnes militaires, doivent cependant opérer, d’octobre 1934 à octobre 1935, un vaste mouvement de repli sur plus de 12 000 kilomètres en direction de la province du Chen-si, au nord-ouest du pays : malgré des pertes considérables en vies humaines (15 000 survivants sur 90 000 combattants), la Longue Marche permet à l’Armée rouge d’échapper à l’encerclement et à l’anéantissement et assure définitivement à M. la direction politique du mouvement communiste chinois : en janvier 1935, il prend la tête du bureau politique du PCC. L’invasion de la Chine par le Japon, puis le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale vont dans la décennie suivante précipiter un renversement des équilibres politiques et militaires de la Chine républicaine et déterminer l’accession des communistes au pouvoir. Le Japon annexe la Mandchourie en septembre 1931, puis procède par étapes à l’occupation de la Chine à partir de février 1932 : les troupes nippones s’emparent de Pékin en juillet 1937, de Shanghai en novembre 1937, de Canton en octobre 1938. Considérablement affaibli, Tchang Kaï-Chek doit consentir à partir de 1937 à une alliance tactique avec les communistes contre l’envahisseur. Dans le contexte des huit années de la guerre de résistance nationale (1937-1945), M. élabore une stratégie de « guerre populaire », modère le mouvement de réformes sociales et politiques dans les territoires qu’il contrôle, mais maintient fermement l’indépendance des forces communistes par rapport à leurs alliés. La capitulation militaire du Japon (août 1945) débouche dès lors inéluctablement, malgré la réconciliation officielle entre Tchang et M. (28 août 1945), exigée par Staline en vue de la constitution d’un gouvernement d’union nationale, sur l’affrontement politique et militaire des nationalistes et des communistes. Les communistes rétrocèdent au Guomindang une partie des territoires qu’ils occupent, mais refusent de participer aux élections organisées par Tchang. La guerre civile reprend au printemps 1946. Après la prise de Yenan (19 mars 1947), capitale de la Chine communiste, par les armées nationalistes, une vigoureuse contre-offensive communiste, déclenchée à l’automne 1948, conduit à l’entrée des communistes à Pékin (janv. 1949) et à leur victoire définitive sur les troupes de Tchang (oct. 1949) qui abandonne le continent chinois pour se réfugier à Formose (Taiwan). La République populaire de Chine est proclamée à Pékin le 1er octobre 1949. Le destin de M., promu président de la République (avec Zhou Enlai comme chef de gouvernement), se confond dès lors jusqu’à sa mort avec l’histoire de la Chine communiste. Le PCC contrôle l’ensemble de la vie économique sociale et politique du pays et impose une dictature révolutionnaire. La signature du pacte sino-soviétique (14 févr. 1950) renforce l’alliance des deux grandes puissances communistes mondiales qui affrontent les Etats-Unis durant la guerre de Corée. La réforme agraire (28 juin 1950) entraîne le partage des terres au profit des paysans, puis la mise en place de la collectivisation, sous forme de coopératives paysannes (à partir de 1953). Une Constitution démocratique fondée sur le parti unique et l’alliance des paysans et des ouvriers est proclamée le 20 septembre 1954. La campagne des Cent Fleurs, lancée par M. en 1956 pour favoriser l’expression du ralliement au régime, s’interrompt brutalement au printemps 1957 par un renforcement de la dictature du PCC. Le Grand Bond en avant (août 1958) entraîne la fusion des coopératives paysannes en de vastes « communes populaires » ; mais la réforme autoritaire des structures de l’économie et de la société rurales suscite d’importantes résistances, et M. doit en avril 1959 céder la présidence de la République populaire de Chine au dirigeant modéré Liu Shaoqi tout en demeurant l’un des principaux dirigeants du pays. Dans le même temps, le refroidissement des relations sino-soviétiques, sensible à partir de 1958, aboutit à la rupture des relations économiques et de l’aide technique (juill. 1960) et à la multiplication des incidents frontaliers. En septembre 1965, au terme de cinq années d’affrontements internes entre la ligne modérée et l’aile radicale du PCC, dont il est le principal représentant, M. et ses partisans sont mis en minorité. Ce dernier engage alors contre les « révisionnistes » du Parti, avec l’aide du Premier ministre Zhou Enlai, une nouvelle campagne politique de grande ampleur en s’appuyant sur l’armée populaire, placée sous le commandement du maréchal Lin Biao, et sur la jeunesse scolaire et étudiante, embrigadée dans les gardes rouges. La « Révolution culturelle » prend son départ avec la grandiose manifestation des gardes rouges organisée à Pékin le 18 août 1966 et déclenche à travers l’ensemble du pays un formidable et violent mouvement révolutionnaire contre les cadres modérés du PCC et la culture traditionnelle chinoise à travers l’exaltation de la personnalité de M., le « Grand Timonier », et de sa pensée, popularisée par le recueil des Citations du président Mao Zedong. Ralentie un instant dans ses excès par l’entremise de Zhou Enlai (févr. 1967), la Révolution culturelle culmine avec l’élimination de Liu Shaoqi (oct. 1968) et la désignation de Lin Biao comme successeur de M. (au IXe congrès du PCC, avr. 1969), tandis que le « maoïsme » diffuse ses thèses parmi le mouvement communiste international et la jeunesse étudiante du monde entier. Le ralentissement de l’effervescence révolutionnaire et le retour progressif aux équilibres antérieurs s’amorcent toutefois au lendemain même de la victoire politique de M. Tandis que Lin Biao tente d’imposer la prépondérance de l’armée sur le Parti et prône une politique d’expansion de la Révolution culturelle dans le monde, M. se réconcilie avec la ligne pragmatiste de Zhou Enlai et soutient sa politique de rapprochement avec les États-Unis, marquée par l’invitation du président Nixon à Pékin (déc. 1970) ; la Chine populaire est admise au poste de membre permanent du Conseil de sécurité, en remplacement de la Chine nationaliste de Tchang Kaï-Chek, le 25 octobre 1971. Le maréchal Lin Biao trouve la mort dans un mystérieux accident d’avion en Mongolie (sept. 1971) ; la réhabilitation politique de nombreuses victimes de la Révolution culturelle s’effectue parallèlement au cours des années suivantes : elle aboutit en août 1973 à la nomination du pragmatiste Den Xiao-ping au poste de vice-Premier ministre aux côtés de Zhou Enlai, décédé en janvier 1976. M. s’éteint à son tour neuf mois plus tard, à l’âge de 83 ans, le 9 septembre 1976. L’héritière de la ligne la plus radicale de sa pensée et de son action, sa veuve Jiang Qing, chef de la « Bande des Quatre » fidèle à l’inspiration de la Révolution culturelle, est éliminée politiquement par Deng Xiaoping et ses partisans en 1978. Si le mausolée de M. demeure intact à Pékin et si le centenaire de sa naissance a été célébré avec faste en décembre 1993 par les autorités chinoises, le maoïsme dans sa dimension la plus révolutionnaire semble, un quart de siècle après la disparition de son inspirateur, en recul en Chine et dans le monde.

Bibliographie : Citations du président Mao Zedong, 1967 ; E. Schramm éd., Mao Tsé-Toung parle au peuple, 1956-1971, 1977 ; L. Bianco, Les Origines de la révolution chinoise, 1967 ; J. Ch’en, Mao et la révolution chinoise, 1968 ; J. Guillermaz, Histoire du parti communiste chinois (1927-1949), 1975 ; K. Meinhert, Mao est mort: la succession, 1978.




♦ "Les problèmes qu'il a soulevés se poseront à nous pendant longtemps encore, non seulement en Chine, mais dans l'ensemble du monde." S. Schram.


MAO ZEDONG ou MAO TSÉ-TOUNG (Shaoshan, prov. du Hunan, 1893-Pékin, 1976). Homme politique chinois. Il fit triompher la révolution communiste en Chine et proposa au tiers monde un modèle socialiste différent de celui de Moscou. Fils d'un paysan aisé, Mao s'initia d'abord, sous la tutelle d'un père particulièrement sévère, à l'étude de Confucius et des auteurs classiques chinois. À 14 ans, il s'inscrivit à l'école secondaire de Changsha où il se rallia à la cause républicaine de Sun Yat-sen et rejoignit quelque temps l'armée révolutionnaire (1911-1912). Démobilisé, il se consacra à la lecture de penseurs occidentaux comme Rousseau, Montesquieu, Adam Smith, Stuart Mill et Spencer. Après avoir fréquenté l'École normale du Hunan (1913-1918), il se rendit à Pékin où il obtint un poste de bibliothécaire à l'université et se lia d'amitié avec Li Ta-chao (Li Dazhao) et Tchen Tou-siou (Chen Duxiu), introducteurs de la pensée marxiste en Chine. Dès cette époque, sa vie se confondit avec celle du Parti communiste chinois créé à Shanghai en 1921. Membre du comité central du PCC (1923), Mao soutint d'abord la ligne du parti qui consistait à s'appuyer sur le prolétariat ouvrier et à s'allier avec la bourgeoisie nationale. Le IIIe congrès du PCC décida ainsi l'unité avec le Guomindang, « Parti national du peuple » (1923), soutenu par l'URSS et dirigé après la mort de Sun Yat-sen par Tchang Kaï-chek, Mao siégeant au bureau exécutif du parti nationaliste. Il découvrit cependant, à la faveur d'un séjour dans le Hunan, les révoltes paysannes et prit dès lors conscience du rôle dominant que pourrait jouer la paysannerie dans le processus révolutionnaire. Ses thèses -qu'il exposa dans l'Analyse des classes de la société chinoise ( 1926). et Rapport d'enquête sur le mouvement paysan du Hunan (1927) mettant l'accent sur la nécessité d'adapter le marxisme aux conditions sociales propres à la Chine - rencontrèrent une vive opposition de la part des communistes orthodoxes. L'échec sanglant de la « révolution ouvrière » à Canton (1927), écrasée par Tchang Kaï-chek, devait confirmer les convictions de Mao qui tenta lui-même d'organiser, avec sa première armée paysanne et ouvrière, le « soulèvement de la moisson d'automne » dans le Hunan, mais qui fut aussi un échec. Exclu du comité central et du bureau politique, il décida néanmoins de poursuivre le combat révolutionnaire. Gagnant le Jiangzi, il fonda en 1931 la République soviétique chinoise et, dans cette « zone libérée », tenta d'organiser le partage des terres, distribua des armes aux paysans et fonda des Unions paysannes, instrument privilégié du pouvoir politique.et militaire. Sans cesse attaqué par les forces gouvernementales de Tchang Kaï-chek, Mao renonça à la tactique offensive et décida d'opérer une retraite vers le nord-ouest de la Chine (1934). Ce fut l'époque héroïque de la Longue Marche (1934-1935) au cours de laquelle Mao prit la direction du parti communiste, et qui permit à ses troupes d'échapper à l'encerclement des armées nationalistes. Cependant, face à l'agression japonaise en Chine, Mao décida de créer un front commun entre le PCC et le Guomindang de Tchang Kaï-chek (1936). Ce fut au cours de cette guerre nationale que Mao élabora les règles de la guerre populaire et qu'il écrivit ses ouvrages politiques fondamentaux (Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine, 1936 ; De la contradiction, De la pratique, 1937 ; De la démocratie nouvelle, 1940). Après la capitulation du Japon (1945), le Parti communiste chinois comptait 1,2 million d'adhérents et l'armée Rouge près de 900 000 hommes. La tentative, soutenue par les Américains, de former un gouvernement de coalition entre Mao et Tchang Kaï-chek fut un échec (1946-1947). Les communistes reprirent l'offensive qui s'acheva en 1949 par la victoire de l'Ar-mée populaire de libération tandis que Tchang Kaï-chek rejoignait Formose. Le 1er octobre 1949, la République populaire de Chine fut proclamée. Président du Conseil puis président de la République (1954-1959) mais aussi dirigeant du parti, Mao donna à la révolution chinoise sa propre originalité. Alors que l'URSS accordait la priorité à l'efficacité économique, Mao privilégia l'idéologie, luttant sans cesse contre l'embourgeoisement du parti et tentant de transformer la mentalité du peuple, garantie d'un attachement indéfectible à la cause révolutionnaire. Dès 1950, commença le processus de collectivisme agraire et industriel, ce qui suscita de nombreuses tensions qui obligèrent Mao à lancer en 1956 la campagne des Cent-Fleurs (campagne de discussions politiques). Elle provoqua des critiques d'une telle ampleur que Mao décida de la stopper et se retourna contre les « droitiers » (intellectuels, fonctionnaires, cadres de l'industrie). Aux initiatives audacieuses mais malheureuses du Grand Bond en avant de 1958 (création des communes populaires associant activités agricoles, industrielles et administratives), s'ajouta la rupture avec l'URSS (1960) accusée de pactiser avec l'impérialisme américain en maintenant la coexistence pacifique. Tout en restant à la tête du parti, Mao abandonna en 1959 la présidence de la République à Liu Shaoqi, chef de file d'une opposition formée de membres de l'appareil du parti mais aussi de technocrates soucieux d'efficacité économique. Mao décida alors de lancer une gigantesque campagne contre le « révisionnisme » des dirigeants de l'URSS mais aussi d'une partie du PCC à travers la grande Révolution culturelle prolétarienne (1966-1976) en s'appuyant sur l'armée et son chef, Lin Biao, et la jeunesse (les Gardes rouges), chacune s'inspirant de la pensée de Mao consignée dans le Petit Livre rouge. Cependant, devant les dérapages du mouvement qui dégénéra parfois en guerre civile, Mao dut accepter la destitution de son dauphin Lin Biao considéré comme « gauchiste ». L'ordre rétabli, s'amorça ensuite un laborieux effort de reconstruction du parti et de développement économique ainsi qu'une normalisation des relations avec les États-Unis (entrée de la Chine populaire à l'ONU, 1972 ; visite de Nixon à Pékin, 1972). À partir de 1973, Mao, âgé, laissa le pouvoir effectif à Zhou Enlai. Il reste en Chine et dans le monde, malgré la longue période de démaoïsation qui suivit sa mort, le chef prestigieux de la révolution chinoise.

Liens utiles