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MAINE DE BIRAN (Marie François Pierre Gontier de Biran, dit)

MAINE DE BIRAN (Marie François Pierre Gontier de Biran, dit). Philosophe français (1766-1824), qui a exercé des responsabilités politiques. Il a étudié avec soin, par l'introspection, des réalités psychologiques comme l'habitude et surtout l'effort musculaire volontaire, dans lequel il pense percevoir la réalité du moi, s'opposant à la métaphysique de Descartes. Il parvint à une philosophie spiritualiste et finit même par donner à l'Esprit un rôle fondamental.

Maine de Biran

(François-Pierre Gontier, dit, 17661824.) Philosophe français ; analyste de la vie intérieure, il fut paradoxalement mêlé à la vie politique de son temps. Prenant position contre le sensualisme de Condillac, il montre l'aspect actif de l'habitude qui, si elle émousse les sensations, est capable de développer les perceptions. Il observe surtout que la psychologie condillacienne ne peut expliquer la nature de la conscience : le moi, loin de se réduire aux sensations externes, ne commence à émerger qu'au moment où il se distingue de l'objet senti ; il se saisit dans l'expérience première et intime de l'effort, de la résistance qui s’oppose à ma volonté définie comme une « force hyperorganique » luttant contre l'inertie de mon corps propre. Après avoir ainsi établi un « Cogito existentiel » (il juge celui de Descartes trop abstrait), Maine de Biran constate les limites de la volonté sur la tyrannie du corps et juge avec sévérité l'attitude stoïcienne. Finalement, il oriente sa pensée vers une méditation spirituelle qui lui fera distinguer trois étapes dans la vie de l'homme : la vie animale (sensation), la vie humaine (volonté et effort), la vie de l'esprit (inspirée par la grâce et consacrée à l'amour de Dieu).

Œuvres principales : Mémoire sur T habitude (1802) ; Mémoire sur la décomposition de la pensée (1805) ; Mémoire sur les fondements de la psychologie (1812) ; Journal intime.

MAINE DE BIRAN Marie François Pierre Gonthier de Biran, dit. Philosophe français. Né à Bergerac (Dordogne) le 29 novembre 1766, mort à Paris le 20 juillet 1824. Fils d’un médecin, il fit ses études au Collège des Frères de la Doctrine chrétienne de Périgueux puis, malgré sa santé assez fragile, choisit la carrière militaire. Il entra dans les gardes du corps (1785) et fut blessé au cours des journées d’octobre 1789. Son régiment ayant été licencié peu après, Maine de Biran se retira dans son domaine de Grateloup, à une dizaine de kilomètres de Bergerac, et y vécut pendant la tourmente révolutionnaire, en sécurité et dans une complète indifférence aux événements politiques. Déjà la vie intérieure constituait pour lui la principale réalité, et c’est à son tempérament légèrement hypocondriaque que nous devons certainement son Journal intime, dont les premières pages datent de 1792, et qui constitue véritablement le «journal d’une âme». Sous le Directoire, Maine de Biran entra néanmoins dans la politique; mais il ne devait y jouer jamais qu ’un rôle effacé car, selon ses propres termes, il se sentait « comme un somnambule dans le monde des affaires ». Député de la Dordogne au Conseil des Cinq-Cents en 1795, il vit son élection annulée au lendemain de la journée du 18 fructidor et put ainsi, sans aucun déplaisir, rentrer dans sa province et reprendre ses études pendant plusieurs années. C’est en 1802 qu’il publia son premier mémoire philosophique (couronné par l’institut) sur l'Influence de l'habitude sur la faculté de penser — Mémoires sur l’habitude. Vinrent ensuite des mémoires sur la Décomposition de la pensée (1805), sur l'Aperception immédiate (1807) et, d’un beaucoup plus grand intérêt, l'Essai sur les fondements de la psychologie et sur ses rapports avec l’étude de la nature (1812). L’Empire, cependant, avait nommé Maine de Biran sous-préfet de Bergerac (1806), et en 1812 le propriétaire philosophe fut élu représentant de la Dordogne au Corps législatif. Réintégré administrativement dans les gardes du corps en 1814, il fut membre et questeur de la Chambre des députés pendant la Première Restauration, suivit Louis XVIII à Gand, fut réélu en septembre 1815 à la Chambre (où il siégea parmi les libéraux), enfin nommé conseiller d’Etat en 1816. Installé désormais à Paris, il trouvait sa principale distraction à réunir régulièrement chez lui une petite société philosophique qui comprenait en particulier Royer-Collard, Victor Cousin, Ampère, Cuvier et Guizot. En dehors de ses nominations à des emplois publics, le seul événement extérieur de la vie de Maine de Biran avait été son mariage, mésaventure qui faillit conduire le philosophe au suicide : en 1795, en effet, il avait épousé sa cousine, une créole, dont le mari, émigré disparu depuis quatre ans, était considéré comme mort. Mais il reparut soudain en 1802, alors que le ménage Biran comptait déjà trois enfants; Mme de Biran succomba bientôt à une fièvre cérébrale contractée à la suite de l’émotion ressentie à la vue de ce revenant ! Affligé d’une nervosité extrême, constamment préoccupé des moindres manifestations de sa vie physique ou spirituelle, Maine de Biran ne travaillait qu’avec difficulté. Aussi a-t-il peu écrit et, a sa mort, on trouva, inachevé, le manuscrit de ses Nouveaux Essais d’anthropologie, commencés en 1823. Fréquemment, dans son Journal intime, on voit l’auteur se plaindre de son impuissance à se donner un grand dessein et à y tenir fermement. Mais peut-être est-ce justement cet état d’inquiétude, chez lui habituel, qui devait rendre sa pensée si présente à la philosophie du XIXe siècle et jusqu’à nos jours. Restaurateur du spiritualisme, Maine de Biran avait pourtant été formé à l’école des « idéologues » — v. Mémoires sur l’habitude. Il ne tarda pas à se détacher de Destutt de Tracy et de Condillac, auxquels il reprochait d’avoir confondu à tort les causes externes, ou objectives, et les causes internes. Il soulignait qu’au point de vue de la réflexion intérieure apparaît un fait primitif : la conscience, la personnalité, manifestée par l’effort. A côté de la sensation, simple produit des choses extérieures, il y a la perception, résultat de notre activité volontaire, et le bonheur consiste donc, suivant d’ailleurs l’enseignement stoïcien, à se soustraire le plus possible aux impressions spontanées venant de la vie externe et à ne rien attendre que de la volonté. Maine de Biran ne cessa, tout au long de son évolution intellectuelle, de chercher un « point d’appui » indépendant à la fois des hasards de l’existence objective et des vicissitudes de la vie intérieure, laquelle (son expérience de nerveux le lui avait assez montré) reste toujours exposée aux défaillances de la machine physiologique; on comprend qu’il ait donc éprouve le besoin de dépasser le stoïcisme, de fonder la réalité personnelle sur une puissance divine et enfin, comme il le fit dans ses dernières années, de revenir intégralement au christianisme traditionnel.




♦ « Biran est avec Montaigne, Amiel et Proust l’écrivain qui a le mieux saisi la fluidité de la vie intérieure. » Jean Wahl. ♦ « Le style de Biran manque d’aisance et d’habileté. Il vise la parfaite sincérité, il ne cède à aucune préoccupation artistique. Biran se compare lui-même à un mineur qui creuse dans les ténèbres une galerie de plus en plus profonde : il ne ressemble nullement à l’architecte qui élève dans la lumière un édifice harmonieux. » Louis Lavelle.

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