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LIBERTIN

LIBERTIN. n.m. Celui qui s'est affranchi de croyances et, surtout, de règles de conduite ; le libertinage a d'abord été synonyme d'incroyance, et il est devenu manière de vivre hors de toute règle morale.
À l'origine, libre-penseur ; ensuite, personnage aux mœurs dissolues.
Commentaire
Ce terme vient du latin libertinus, « affranchi ». Autant dire qu'un libertin est quelqu'un qui choisit sa vie. Le mot a cependant pris dès le XVIIe siècle une connotation péjorative. Il désigne alors un homme qui aime trop sa liberté, qui piétine les dogmes de la religion, dont les mœurs sont déréglées par rapport aux normes de la société (ex. : Valmont dans les Liaisons dangereuses).
On associe souvent le libertinage à des amours interdites et mystérieuses, la littérature libertine se diffusant fréquemment « sous le manteau ».
Citations
Deux sœurs, l'une très libertine vit dans le bonheur, dans l'abondance et la prospérité, l’autre extrêmement sage tombe dans mille panneaux qui finissent enfin par entraîner sa perte. (Sade, Plan de Justine ou les Malheurs de la vertu.) Notre préfacier, qui connaît dans les coins la littérature libertine, a voulu rester anonyme à cause de sa position éminente dans... Ce serait trop dire. Seules les personnes qui ont une oreille littéraire assez fine le reconnaîtront peut-être. (Crébillon fils, Tableaux des moeurs de ce temps, quatrième de couverture de la collection « les Classiques interdits », éd. Jean-Claude Lattès.)
Le vin et le libertinage ont partie liée dans le processus de l'agrégation sociétale. (Michel Maffesoli, l'Ombre de Dionysos.)

Libertin. Libertinage
1 Au XVIIe siècle, un libertin est un libre penseur, un incrédule en matière de religion, un «esprit fort», un athée. L’athéisme est l’objet d’un préjugé hostile tel que ce libertinage de pensée passe pour s’accompagner d’immoralisme, de libertinage dans les moeurs. L’Église traque le libertinage : Molière, Le Tartuffe (Orgon, qui est dévot, accuse son beau-frère Géante de libertinage). Les Essais de Montaigne font figure de «bréviaire des libertins». Ceux-ci sont sévèrement traités par Pascal {Pensées), et La Bruyère {Les Caractères, XVI, Des esprits forts). Molière accorde de la grandeur à Don Juan, mais maintient le châtiment qui est traditionnellement infligé {Dom Juan).
2 Plus tard, dans la notion de libertinage, l’idée de corruption morale l’emporte. Au XVIIIe siècle, le libertin prend le nom de roué (digne du supplice de la roue) : Laclos, Les Liaisons dangereuses. Depuis le XIXe siècle, la littérature peint souvent des libertins, leur conduite allant de la simple liberté de moeurs du jouisseur : Balzac, Illusions perdues (Rastignac, Lucien de Rubempré), La Cousine Bette (le baron Hulot) ; Musset, La Confession d’un enfant du siècle, Les Caprices de Marianne (Octave), Poésies nouvelles (Rolla); Zola, Nana, à la révolte contre la société : Vailland, Drôle de jeu (Marat).
Le thème de la libre pensée est dès lors disjoint de celui du libertinage (cf. Athéisme, 3).