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LAS CASES Marie Joseph Emmanuel Dieudonné, comte de

LAS CASES Marie Joseph Emmanuel Dieudonné, comte de. Mémorialiste français. Né au château de Las Cases, près de Revel (Haute-Garonne) en 1766, mort à Paris le 15 mai 1842. Descendant d’une vieille famille noble, il tirait son nom d’une victoire remportée sur les Maures par un de ses ancêtres et prétendait appartenir à la même souche que le célèbre évêque Las Casas . Après avoir fait d’excellentes études à Vendôme, chez les oratoriens, il entra à l’Ecole Militaire de Paris et servit ensuite dans la marine royale comme aspirant, puis, à partir de 1787, comme lieutenant de vaisseau et participa à plusieurs expéditions. Royaliste fidèle, Las Cases émigra à Coblence dès 1791 et fit partie pendant quelque temps de l’armée de Condé. Lorsque celle-ci fut dissoute, il passa en Angleterre et prit part en 1795 à l’expédition de Quiberon. Rentré en France sous le Consulat, Las Cases publia alors sous le pseudonyme de Le Sage, un Atlas historique, généalogique, chronologique (1802). recueil de tableaux synoptiques qui fut accueilli avec le plus vif succès. L’ancien combattant de l’armée des Princes s’était fait rayer de la liste des émigrés et cherchait désormais par tous les moyens à attirer l’attention de la cour des Tuileries et de l’Empereur lui-même. En 1809, les Anglais ayant débarqué en Hollande, près d’Anvers, et menaçant Flessingue, Las Cases s’engagea et prit part comme simple volontaire à l’opération qui dégagea la ville; Napoléon ayant été mis au courant de cet exploit fit aussitôt nommer Las Cases chambellan et baron, et, en 1810, comte et maître des requêtes au Conseil d’État (section marine). A ce titre Las Cases fut chargé de missions en Hollande et dans les provinces illyriennes. En 1814, il commandait une légion de la garde nationale parisienne. Au Conseil d’Etat, il refusa de signer l’acte de déchéance de l’Empereur, ce qui n’empêcha pas le gouvernement des Bourbons de le maintenir dans ses fonctions. Le 25 juin 1815, une semaine après Waterloo, alors que Napoléon s’apprêtait à quitter le palais de l’Élysée, Las Cases implora la singulière faveur de ne point quitter le souverain vaincu. Celui-ci, assez étonné, en ce moment où ses plus fidèles et ses plus vieux compagnons se hâtaient de le renier, y consentit et Las Cases se mit en route pour Rochefort, accompagné de son fils Emmanuel, âgé de quinze ans, qu’il emmenait dans son aventure. Le 14 juillet, dans la rade du port charentais, il monta avec l’Empereur sur le pont du « Bellérophon » ; le 2 août suivant, lorsque la nouvelle de la déportation à Sainte-Hélene fut connue, tandis que le navire était ancré au large de Portsmouth, il obtint d’être inscrit, ainsi que son fils, sur la liste des personnes autorisées à accompagner Napoléon dans son exil. Et, quelques jours plus tard, c’est Las Cases, voyant l’Empereur complètement découragé, qui lui suggéra le grand projet d’occuper son exil à revivre sa vie et ses campagnes. Le 9 septembre 1815, sur le « Northumberland » en route vers Sainte-Hélène, Napoléon, surmontant ses dernières réticences, commençait à dicter à. Las Cases le premier récit du siège de Toulon. De tous les compagnons du proscrit, Las Cases était certainement le plus intelligent, et celui avec lequel Napoléon se plaisait le plus à s’entretenir, ce qui lui valut de furieuses animosités de la part des autres Français; aussi, après l’installation dans l’île, dut-il partager avec ceux-ci son privilège de secrétaire particulier et il ne recueillit, sous la dictée de Napoléon, que le récit des campagnes d’Italie. Chaque soir cependant, lorsqu’il se retirait dans l’étroit appartement qu’il occupait avec son fils dans la maison de Longwood, il notait en détail les événements de la journée et les moindres paroles de l’ancien maître du monde. C’est ce récit qui est devenu le fameux Mémorial de Sainte-Hélène ou Journal où se trouve consigné, jour par jour, ce qu’a dit et fait Napoléon . Il est douteux que toutes les idées et les paroles prêtées par Las Cases à l’Empereur soient authentiques. Le mémorialiste se laissa certainement entraîner par son admiration et par ce « chambellanisme » dont il entourait son maître et que lui reprocha Stendhal (n’allait-il pas, malgré sa taille, jusqu’à s’efforcer de paraître plus petit que Napoléon pour flatter ce dernier ?). L’ampleur du Mémorial... peut étonner, lorsqu’on songe que Las Cases ne resta qu’un an à peine à Sainte-Hélène. En effet, le gouverneur Hudson Lowe ayant découvert un message rédigé sur un morceau de soie blanche et adressé à Lucien Bonaparte, dans lequel étaient dénoncés les traitements indignes auxquels les Anglais soumettaient l’Empereur, Las Cases et son fils furent expulsés de l’île (27 novembre 1816). Transférés au Cap, ils restèrent pendant huit mois en résidence surveillée, puis furent renvoyés en Europe en 1817. Las Cases ne put cependant rentrer aussitôt en France et se vit assigner comme résidence Francfort-sur-le-Main, puis le territoire belge. Las Cases fut enfin autorisé à regagner Paris après la mort de l’Empereur (mai 1821), il publia avec un immense succès les huit volumes de son Mémorial... (1822-1829), qui contribua à répandre l’image légendaire d’un Napoléon libéral et presque bonhomme. Après la révolution de juillet 1830, Las Cases fut élu député de la Seine et siégea à l’extrême gauche de l’Assemblée. Son fils, qui comme lui avait servi de secrétaire à Napoléon, fut élu député du Finistère en 1831; il accompagna en 1840 le prince de Joinville parti chercher les cendres de l’Empereur; Napoléon III le nomma sénateur en 1852. Il mourut en 1854. ♦ « Mon cher, ces mémoires seront aussi connus que tous ceux qui les ont devancés. Vous vivrez autant que tous leurs auteurs. On ne pourra jamais s’arrêter sur nos grands événements, écrire sur ma personne sans avoir recours à vous... On dira : après tout, il devait bien le savoir, c’était son conseiller d’Etat, son chambellan, son compagnon fidèle... Il faut bien le croire, il ne ment pas. C’était un honnête homme. » Napoléon à Las Cases. ♦ « Le tout [du Mémorial] est écrit avec la minutie de la Vie de Johnson de Boswell, la force de langage du général Bonaparte et l’embellissement de style du comte Las Cases... Tout y est sacrifié au grand objet de présenter à la postérité le général Bonaparte comme un modèle d’excellence et de vertu. Les faits y sont altérés, les conversations rapportées seulement par moitié, ses propres expressions répétées, les réponses omises... » Hudson Lowe, lettre au comte Bathrust, après la saisie des papiers de Las Cases, 3 décembre 1816.


LAS CASES, Emmanuel, comte de (Las Cases, près de Revel, 1766-Passy-sur-Seine, 1842). Ecrivain français. Secrétaire de Napoléon Ier en exil, il rédigea Le Mémorial de Sainte-Hélène, publié en 1823.