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JAKOBSON (Roman)

JAKOBSON (Roman). Célèbre linguiste (1896-1982), né à Moscou, conseiller culturel à Prague, émigré en 1941 aux Etats-Unis où il enseigna dans les universités les plus célèbres comme le Massachusetts Institute of Technology. Avec Troubetzkoy et Karcevski, il fonda le cercle linguistique de Prague. Ses travaux portent sur la phonologie, sur l'acquisition du langage, les troubles de la parole, la linguistique générale dans laquelle il a introduit la théorie des six fonctions de la langue et des divers modes de communication. Il s’est aussi beaucoup consacré à l'analyse structurale de la poésie.

Œuvres principales : la Nouvelle Poésie russe (1919), Principes de phonologie historique (1931), Langage enfantin et aphasie (1941), Essais de linguistique générale (1963), Questions politiques (1973). L'influence de Jakobson sur la linguistique et le structuralisme a été considérable.

Jakobson, R.

Linguiste né à Moscou en 1896. Avec N. Trubetzkoi il est le fondateur de la phonologie, discipline qui allait transformer complètement la linguistique et dont la fécondité théorique devait profiter à toutes les sciences humaines. La profonde originalité de la pensée de Jakobson et son immense érudition n’ont pas peu contribué à la formation du structuralisme lévi-straussien. Principales publications : Remarques sur l'évolution phonologique du russe, 1929 ; Kindersprache, 1941 ; Aphasie und allgemeine Lautgesetze, 1941.

JAKOBSON Roman. Linguiste américain d’origine russe. Né à Moscou le 11 octobre 1896. Roman Jakobson se passionne très tôt pour la poésie. Étudiant, il participe à la fondation du Cercle linguistique de Moscou (1915) et de celui de Petrograd (1917), où se retrouvent de jeunes poètes, théoriciens de la littérature, ethnologues et linguistes. Ils reprendront à leur compte l’appellation de « formalistes » employée par leurs détracteurs. En littérature comme en linguistique, ils veulent poser les problèmes en termes de « structure » et de « fonction » (cf. Morphologie du conte, de Propp, où les thèmes dés contes s’organisent, et dérivent les uns des autres par transformations; on sait comment Lévi-Strauss développera cette méthode dans l’analyse structurale des mythes, des relations de parenté, etc.). Ils s’opposent à l’analyse littéraire traditionnelle et à l’école linguistique néogrammairienne (1870-1914), qui étudiait les phénomènes linguistiques séparément et de façon purement historique, abstraction faite de leur fonction. Ils s’inspirent des linguistes polono-russes de Kazan (Baudouin de Courtenay, Kruszewski), qui, structuralistes avant la lettre, avaient dégagé dès les années 1880 les notions de « phonème » et de « morphème ». De 1920 à 1939, Jakobson, alors en Tchécoslovaquie, jouera un grand rôle dans le développement de l’Ecole de Prague. L’École de Prague, ouverte aux linguistes, aux poètes, aux folkloristes et aux philosophes, s’inspire de Baudouin, de la dialectique de Hegel, de la phénoménologie de Husserl et Anton Marty, de l’analyse des fonctions du langage par le philosophe viennois Karl Bühler. Prague conçoit le langage comme un « système de structures » finalisées pour remplir certaines « fonctions » (référentielle, expressive, intersubjective, etc., [cf. Jakobson, « Linguistique et poétique », Essais de linguistique générale ] : « Linguistics and Poetics », in Sebeok, Style in Language, 1960). Jakobson et Troubetzkoy développent l’analyse « phonologique » des sons d’une langue. Au-delà des variations physiques, multiformes et non toujours significatives, de ces sons — domaine de la phonétique —, la phonologie s’attache à dégager les unités « invariantes » jouant un rôle distinctif : les « phonèmes ». L’Ecole de Prague reprend les apports de Saussure, mais critique la notion d’arbitraire du signe, la séparation radicale entre synchronie et diachronie, et surtout l’idée que les changements sont « aveugles ». Jakobson répétera que les changements font partie du système synchronique, grâce à la coexistence chez le même locuteur de plusieurs « styles », aux fonctions sociales différentes. L’École de Prague développe la théorie des deux axes : axe horizontal de la phrase ou axe syntagmatique des contiguïtés externes entre morphèmes successifs, et axe vertical ou paradigmatique des choix par similarité ou dissemblance entre éléments pouvant apparaître au même point. Jakobson appliquera cette théorie a la poésie : les deux figures fondamentales sont la « métaphore », qui joue sur la « similarité » et la « métonymie », association par « contiguïté ». En 1939, Jakobson quitte la Tchécoslovaquie pour la Scandinavie à la suite de l’agression hitlérienne. Il fréquente le Cercle linguistique de Copenhague et y rencontre Niels Bohr, avec lequel il fera plus tard, au Massachusetts Institute of Technology (M.I.T.), un séminaire conjoint sur la linguistique et la physique. Dans Langage enfantin et Aphasie (traduit en fr. en 1969) [ 1941], il compare les stades de l’acquisition phonétique du langage chez les enfants, et de sa désintégration chez les aphasiques. Plus tard, il appliquera les notions de similarité et de contiguïté pour caractériser les deux types fondamentaux d’aphasie : perte de la syntaxe ou aphasie de contiguïté, perte du vocabulaire ou aphasie de similarité (« Deux aspects du langage et deux types d’aphasie », Essais I : « Two Aspects of Language... », in Fundamentals of Language, 1956). Il émigre aux États-Unis en 1942. Il ensei-gnera à Columbia, puis à Harvard et au M.I.T. ans les années de guerre, il participe à New York à l’École libre des Hautes études, de fondation française, où il rencontre Lévi-Strauss et enseigne Six leçons sur le son et le sens (1976, qui comporte une préface de Lévi-Strauss). Avec Fant et Halle, il établit une caractérisation acoustique universelle des traits distinctifs dont se composent les phonèmes (Preliminaries to Speech Analysis, 1952). Il édite des textes médiévaux russes, s’intéresse à la théorie mathématique de la communication et à la typologie universelle des langues. H rencontre Lacan, intéressé par l’opposition métaphore/métonymie. Il compare le code génétique, récemment découvert, et le code linguistique : tous deux produisent du sens en combinant des unités vides de sens par elles-mêmes (acides aminés, phonèmes). Il reprend l’étude de l’aphasie avec des neurologues. Dès ses débuts, Roman Jakobson a fait éclater les barrières entre les disciplines, retrouvant dans tous les domaines des systèmes structurés. Son apport personnel est considérable. En France, Lévi-Strauss, Lacan, la critique structuraliste ont subi son influence. Aux États-Unis, il a participé aux débuts du courant génératif en phonologie et fortement stimule les études slaves et la poétique. Sa conviction fonctionnaliste (étudier le langage en liaison avec les fonctions qu’il remplit) l’a empêché de s’associer activement au travail de son élève Chomsky sur la syntaxe comme domaine relativement isolé. Son intérêt pour les « styles » coexistant chez le même locuteur annonce les « règles variables » de Labov, et tout le courant socio-linguistique actuel.

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