GROGNER (étymologie)
GROGNER vient du verbe latin grunnire («grogner», en parlant du grognement du porc), variante du verbe grundire (gronder). Le mot est devenu d'abord grunir; il est passé à groignir, d'après le mot groin (latin populaire grunium) où la prononciation est dissyllabique (gro-in). Puis le verbe a changé de conjugaison, de groignir à grogner. Mots de la famille: grognard (nom donné aux soldats de la vieille garde de l'empereur Napoléon Ier: «Ils grognaient toujours mais marchaient quand même»), grogne, grognement, grogneur, grognon. De son côté, la forme latine grundire a donné gronder (avec les variantes grondir et grondre en ancien français). Mots de la famille : grondement, gronderie, grondeur, grondin (poisson qui gronde quand il est pris). Nous rapprocherons de cette famille grommeler bien que l'origine soit ici le flamand grommelen (grogner). Mais il est évident que ces mots grogner, gronder, grommeler, qui doivent beaucoup à l'onomatopée, ont entre eux une parenté, sinon étymologique, du moins phonique. Le rapprochement est-il plus hasardeux avec le verbe grigner? Il traduit aussi la mauvaise humeur «par un plissement des lèvres» dit-on. Il s'apparente au francique (langue germanique des Francs) gri-nan et à l'allemand greinen (pleurnicher). Il évoque donc autant le bruit que la grimace de mécontentement. Il a donné le déverbal (nom de l'action) grigne (mécontentement), incontestablement voisin de grogne par le sens, grignon (entamure de la miche de pain), grignoter, grignotement, grignotage (ces trois derniers mots sont faits sur grignon = « entamure »). Le verbe grigner est aussi peut-être à l'origine du verbe grincer, altération de crisser. D'où grincement et grincheux (forme picarde : « qui grince facilement des dents »). On notera que, de grogner à grincheux, ces mots évoluent sensiblement dans le même champ sémantique.