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GHETTO (étymologie)

GHETTO : le mot ghetto, de plus en plus employé et de sinistre réputation, est d'introduction récente dans notre langue. Son usage en français ne remonte guère qu'au siècle dernier mais la chose est ancienne. Le mot vient de l'italien ghetto, fait sur l'hébreu ghet (lettre de divorce, divorce d'où : exclusion, lieu d'exclusion). En Italie, le ghetto était le lieu où les juifs étaient tenus de résider. Cette mesure a été prise au XVIe siècle par suite de l'affluence des juifs chassés de France et d'Espagne. C'est la Révolution française qui abolit les ghettos en Italie.

Jusqu'à la fin du XVIIIe s., dans tous les pays d'Europe comme en terre d'islam, les Juifs, dans chaque ville, furent concentrés dans une rue ou un quartier séparé, souvent fermé de murs, le ghetto (ce nom a pour origine le quartier qui leur fut réservé à Venise à partir de 1516). Le IIIe concile du Latran (1179) avait rendu obligatoire cette ségrégation des Juifs. En Allemagne, on trouvait des ghettos importants à Cologne, Mayence, Worms, Francfort-sur-le-Main, Ratisbonne, mais les plus considérables étaient ceux de Pologne et de Russie Blanche. En Europe occidentale, les ghettos ont disparu dans la première moitié du XIXe s., à la suite des réformes de Joseph II en Autriche (1782) et de l'émancipation votée en France par l'Assemblée constituante (1791). Rome, capitale des États pontificaux, a conservé son ghetto jusqu'à l'entrée des troupes italiennes en 1870. Tout autre fut le sort des Juifs en Europe orientale. Dans l'Empire des tsars, qui comptait la plus importante population juive du monde, les ghettos subsistèrent jusqu'à la révolution de 1917, de même que resta en vigueur l'ordonnance de Catherine II (1791) qui confinait les Juifs de l'Empire dans les provinces occidentales (Crimée, Russie Blanche, Pologne). Durant la Seconde Guerre mondiale, le système hitlérien reconstitua, en Pologne et en Russie occupées, des ghettos hermétiquement séparés des villes, qui n'étaient que des étapes vers les camps de concentration. Les plus importants furent le ghetto de Lodz, qui regroupa 170 000 Juifs, et celui de Varsovie, où s'entassèrent jusqu'à 500 000 personnes. Réduit à 400 000 habitants par les déportations successives, le ghetto de Varsovie se souleva le 19 avr. 1943 et fut anéanti par les SS au cours d'une longue bataille qui dura jusqu'au 16 mai (v. VARSOVIE. Insurrection du ghetto de Varsovie) ; les quelques dizaines de milliers de survivants furent déportés à Treblinka et dans les camps de la région de Lublin. Depuis lors, et avec les réserves qui s'imposent, la notion de ghetto s'est étendue à d'autres communautés minoritaires : entre autres, les populations asiatiques, à travers le monde, ou noires et hispaniques aux États-Unis, qui ont tendance à vivre dans des zones urbaines bien définies.

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