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GARNIER Robert. Poète tragique français

GARNIER Robert. Poète tragique français. Né à La Ferté-Bernard (Sarthe) en 1534, mort le 20 septembre 1590 au Mans. Il étudia le droit à Toulouse, où il se lia avec le poète Guy du Far de Pibrac. Ce fut à Tou-louse qu'en 1565, avec d'autres poètes, il accueillit Charles IX et Catherine de Mé-dicis; la même année il composa son premier recueil de vers : Plaintes amoureuses; il remporta le Prix de l'Eglantine aux Jeux Floraux de 1566. Toujours en compagnie de son ami Pibrac, il devint avocat du Parlement de Paris en 1567, et composa un Hymne à la monarchie et Porcie (1568). Rentré un an plus tard dans sa province natale, il obtint d'abord la charge de conseiller au présidial, puis, en 1574, celle de lieutenant au criminel. Sa vie semble avoir été assez tranquille et elle nous est mal connue, marquée seulement par la composition et la représentation de ses ouvrages. En 1573, Garnier écrit son Hippolyte, que Ronsard proclame devant être « plus dur contre les ans que marbre ni qu'airain » ; en janvier 1574 paraît Cornélie, et il collabore au Tombeau publié par Ronsard après la mort de Charles IX. En 1580 paraît son premier recueil de tragédies, avec Marc-Antoine, La Troade et Antigone ou la pitié, cette dernière pièce un peu décousue, trop évidemment inspirée de Stace, de Sénèque et de Sophocle — oedipe à Colone — mais contenant de très beaux passages. A la réédition du recueil, en 1582, s'ajouta Bradamante, inspirée du Roland furieux de l'Arioste et première « tragi-comédie » (Garnier fut l'inventeur du terme qui connaîtra une belle fortune au XVIIe siècle). En 1583 parurent Les Juives, chef-d'oeuvre du poète, seule tragédie de Garnier jouée encore assez régulièrement, et que son puissant lyrisme biblique a fait nommer par Faguet « l'Athalie du XVIe siècle ». Mais, à cette époque, Garnier est déjà décidé à abandonner le théâtre; il n'y est revenu un instant avec Les Juives que, dit-il, pour chanter « quelque cas de notre Dieu ». En 1585 — année de la troisième édition de ses tragédies — il démissionne de son office de lieutenant au criminel et devient, encore au Mans, membre du Grand Conseil. Ses dernières années semblent avoir été sombres. Dévot, il se rangea quelque temps du côté de la Ligue, puis fit sa soumission. Pendant les trente années qui suivirent sa mort, allaient se succéder les éditions de ses oeuvres. Il reste le vrai représentant de la tragédie au XVIe siècle, dont il résume et accomplit tous les efforts. ? « Et maintenant Garnier, sçavant et copieux / Tragique a surmonté les nouveaux et les vieux, / Monstrant par son parler assez doucement grave / Que notre langue passe aujourd'hui la plus brave. » Vauquelin de la Fresnaye, 1605. ? « Garnier s'éleva au-dessus d'eux [Jodelle et ses amis] sans avoir encore ni pureté ni élégance; sa diction se rapproche davantage de la noblesse tragique, mais de manière à tomber trop souvent dans l'enflure... Il offre pourtant quelques scènes touchantes par les sentiments qu 'ils [les Anciens] lui ont fournis, quoiqu'il ne sache pas les revêtir d'une expression convenable.» La Harpe, 1799. ? « Ses pièces ont peu d'action, fatiguent par d'interminables monologues, mais où brillent déjà les répliques foudroyantes, les vers frappés en médailles et les couplets éloquents... Parmi tous les dramaturges français du XVIe siècle, Garnier est incontestablement le meilleur artisan du vers. » Raymond Lebègue. ? Garnier a été... un lyrique plus encore qu'un dramaturge. Dans les poèmes lyriques qu 'il nous a laissés, le seul défaut semble dans l'excès même de la facilité. Il n'est pas un poète français à qui la grâce poétique ait été donnée avec plus de générosité, pas un dont l'oeuvre poétique paraisse alimentée à une source aussi ruisselante et inépuisable. » Thierry Maulnier.