GALSWORTHY John. Romancier anglais
GALSWORTHY John. Romancier anglais. Né à Copmbe, Surrey (Grande-Bretagne), le 14 août 1867; mort à Londres, le 31 janvier 1933. Issu d'une famille d'hommes de loi, il fait ses études à Oxford de 1886 à 1889 et débute au barreau en 1890. Mais la profession ne lui convient guère et Galsworthy entreprend de grands voyages à travers le monde, en Russie et dans le Proche-Orient, en Amérique et en Océanie et, sur un bateau entre l'Australie et l'Afrique du Sud, il va rencontrer Joseph Conrad, alors officier de marine marchande, qui deviendra son ami et dont il encouragera les premières tentatives littéraires. A partir de 1898, Galsworthy commence lui-même à faire paraître des romans, Jocelyn, Des quatre vents [From the four Winds], et Un homme de Devon [A Man of Devon], mais sous le pseudonyme de John Sinjohn. Ses années de voyage ont été également des années d'abondantes lectures . Galsworthy a découvert, reconnu, assimilé l'art de ses maîtres, Maupassant, Tourgueniev, Tolstoï, Anatole France. C'est pourtant à plus de trente-cinq ans seulement, en 1904, qu'il commence, cette fois sous son nom, sa véritable carrière littéraire avec Les Pharisiens de Vile [The Island Pha-risees], non pas à proprement parler un roman avec une action et une intrigue principales, mais une série de tableaux de moeurs où apparaît déjà le thème essentiel de l'oeuvre de Galsworthy, cette critique des classes riches, de leur pharisaïsme, de leur arrogance, de leur mercantilisme inhumain. A la même époque il travaille au premier volume de sa fresque célèbre, La Saga des Forsyte : Le Propriétaire , parait en 1906, mais la suite se fera attendre dix ans, jusqu'à L'Eté de la Saint-Martin d'un Forsyte (1917). La fresque sera rapidement complétée après la Grande Guerre dans une nouvelle série, Une comédie moderne , étude de la jeune génération Forsyte comprenant : Aux aguets (1920), A louer (1921), Le Singe blanc (1924), La Cuillère d'argent (1926) et Le Chant du Cygne (1928). En marge de ce roman-fleuve, Galsworthy continuait à faire paraître des récits plus courts comme La Fleur sombre (1913) - assez brutale étude d'une passion , Terre libre [The Freelands], hymne de foi et de gratitude à la campagne, à la Nature, fondement de la race, Les Progrès d'un saint [Saint's Progress, 1919], analyse des débats moraux d'un clergyman. A l'époque de la publication de ses premiers romans, en 1906, Galsworthy abordait le théâtre avec La Boîte en argent , suivie de Justice , de Loyautés (1922), pièces dans la tradition du théâtre social cultivé à la même époque par Bernard Shaw, véhémentes dénonciations des injustices et des inégalités, critiques de l'Etat bourgeois, de l'administration pénitentiaire (dont une réforme fut décidée en Angleterre sous le coup de l'émotion suscitée en 1910 par Justice). Pour s'aventurer dans le genre si difficile du roman et du théâtre à thèse, Galworthy avait en tout cas une vertu : la sincérité totale de son indignation. Ce n'est pas par rancoeur personnelle que ce fils de grands bourgeois, cet ancien Oxonien bien élevé et fortuné se fait le critique d'une Angleterre moins proche de nous que de l'ère victorienne. Ce n'est pas non plus par ambition politique, car Galsworthy ne sacrifiera jamais les exigences de l'art au profit d'une vaste popularité. Ni pour se faire l'apologiste d'une orthodoxie religieuse, ni même d'abord par instinct de révolte, mais par une vraie, une tendre pitié pour les victimes de la civilisation de l'argent. Sans doute ne peut-on s'empêcher de rattacher Galsworthy à cette tradition moralisatrice, vivace dans les lettres anglaises; il faut aussi tenir compte de l'influence de l'époque, du prestige d'un Zola et d'un Tolstoï. Galsworthy n échappe pas toujours aux défauts presque inévitables de la littérature à thèse : didactisme, raideur et parfois arbitraire de l'intrigue contrainte de servir la démonstration, prédications sociales introduites au détriment de l'action romanesque. Cependant l'auteur des Forsyte vaut plus encore par ses qualités d'écrivain que par ses bonnes intentions de philosophe; avec ses Forsyte, et surtout Soames, le « propriétaire », il a créé des types qui resteront certainement dans le patrimoine anglais. Portraits qui se complètent sous nos yeux, au fur et à mesure des circonstances, selon le mouvement même de l'action, par d'innombrables petits traits significatifs, magistralement observés et recueillis, qui viennent compléter ou corriger notre première impression. Hommes inséparables de leur famille, de leur tribu, et dans lesquels on reconnaît finalement des personnages mythologiques du monde moderne. Aimable, modeste, vivant la plupart du temps retiré dans une maison de campagne où il s'entourait d'animaux, Galsworthy s'efforça d'échapper aux servitudes de la célébrité, confirmée un an avant sa mort, en 1932, par l'attribution du Prix Nobel de littérature. ? « Au lieu de chercher l'objectivité par la froideur, il la trouve dans la délicatesse de conscience. Il peut ainsi réagir aux choses avec l'émotion sans laquelle le tableau que l'artiste en trace n'est point vrai. Toute vibrante de sensibilité, sa technique est celle d'un impressionniste. » L. Cazamian. ? « Romancier trop scrupuleux pour remuer les foules, penseur trop vague pour influencer profondément une élite, Galsworthy parvient pourtant à toucher noblement les âmes. » René Lalou.