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ÊTRE

ÊTRE. v. intr. et n.m. Il n'y a pas de mot plus usuel. Pas de mot plus embarrassant, non plus. Mais la réflexion sur ce terme est très instructive. ♦ 1° Etre, v. intr. (lat. esse «être»). Comme l'a fait remarquer Heidegger après Aristote (Introduction à la métaphysique) l'emploi du verbe être comporte une multitude de sens : Dieu est, la Terre est ronde, ma montre est sur la table, ce bracelet est en or, cette propriété est à moi, etc. Autant d'exemples, autant de sens différents de est. On distinguera particulièrement : a) Le verbe être comme copule ; il sert alors à rapporter un attribut à un sujet. Dans ce seul cas, apparemment simple, les significations sont diverses (identité, attribution, implication, inclusion). Pour sortir de ces équivoques, la logistique a institué une série de symboles, b) Le verbe être affirme une réalité. Là encore, il faut distinguer l'affirmation métaphysique, celle posée par Descartes dans «je pense donc je suis», et l'affirmation expérimentale ou phénoménale qui n'est pas forcément subjective mais qui peut être objective si l'affirmation est valable pour tous les individus, même si elle n'est pas offerte à l'expérience de chacun d'eux. — Dans son rôle de copule, le verbe être peut servir à définir une essence, à affirmer ce que la chose est. Il élucide alors le contenu d'une idée. En tant qu'il affirme une réalité, le verbe être peut servir à affirmer une existence (la réalité actuelle d'une personne ou d'une chose). ♦ 2° Etre. n.m. (lat. ens «étant»). Le substantif être est impossible à définir. Gilson (dans l'Être et l'Essence) remarque qu'on ne peut pas concevoir l'essence de l'être. C'est pourtant un mot qui est pour nous plein de sens et de valeur. Il signifie : a) Le fait ou l'acte d'être, fait auquel nous donnons un sens intuitif, évident (je suis), b) Ce qu'une chose est, c'est l'être d'une chose, son essence. Contrairement à ce qu’on dit souvent, la notion d’essence n’a rien de statique ou d’immobiliste. Elle est une vocation. Sa formule est : «Deviens ce que tu es.» Se concevoir comme un homme, c’est se sentir appelé à réaliser toujours davantage en soi l’humanité, à devenir de plus en plus homme. Aristote disait que l’essence est «ce qu’une chose doit être.» c) Ce qui existe actuellement. Les sens b et c sont inséparables : «L’être n’est ni l’essence, ni l’existence, il est leur unité» (E. Gilson, l'Etre et l'Essence). d) L’Etre nécessaire, l’Etre à qui rien ne manque, Dieu. — L’idée est à la base de la métaphysique. La première affirmation dé Parménide (Ve siècle av. J.-C.) est : «l’Être est.» Aristote a posé la question «Qu’est-ce que l’être ?» Il a montré que c’est à partir de l’être que peut se comprendre toute existence particulière. Sa philosophie a été prise pour base pendant des siècles. La philosophie moderne s’est en revanche, depuis Hegel, durement heurtée aux difficultés de l’ontologie.