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Eschine

Eschine. Orateur athénien et grand rival de Démosthène (2). Né à Athènes vers 390 av. J.-C. ou plus tôt. Trois de ses discours seulement nous sont parvenus. D'une famille obscure, il fut (du moins d'après Démosthène) d'abord assistant dans l'école de son père, acteur tragique, puis soldat, et prit part à la bataille de Mantinée en 362, puis employé sous Eubule, qui dirigeait les finances athéniennes. Èn 348, il s'engagea dans la carrière publique. Cette année (ou peut-être en 346), quand on se rendit compte que l'influence de Philippe de Macédoine était en train de s'étendre jusqu'au Péloponnèse, Eubule proposa un plan d'action concertée des Grecs contre les agresseurs, afin qu'aucun État n'ait besoin de rechercher l'aide des Macédoniens, et il envoya Eschine à Méga-lopolis pour dissuader les Arcadiens de traiter avec Philippe. Le plan échoua, Athènes se rendit compte de la nécessité de faire la paix avec Philippe, et on envoya hâtivement une ambassade sous les ordres de Philo-crate, incluant Eschine et Démosthène, pour en négocier les termes. On s'entendit finalement en 346 sur la paix et une alliance entre Philippe et Athènes (ainsi qu'avec la Seconde Ligue athénienne) mais Philippe avait continué de progresser, discréditant la paix. Démosthène souhaitait maintenant se dissocier de cette paix, et devint l'adversaire implacable d'Eschine qui la soutenait, décidant de croire qu'il avait été soudoyé par les Macédoniens. En 346/345, Démosthène entama des poursuites contre lui pour le rôle qu'il avait joué dans les négociations, avec l'aide de Timarchos. Ce dernier était un homme qui s'était longtemps démené contre Philippe mais qui était connu pour sa vie privée. Eschine répliqua dans un discours d'accusation contradictoire, Contra Timarchos (qui existe toujours) dans lequel il invoque une loi interdisant à ceux dont l'inconduite est notoire de s'adresser à l'assemblée. Il gagna, mais l'humeur des Athéniens se fit plus hostile envers la Macédoine. En 343, Démosthène attaqua à nouveau dans un discours Sur les forfaitures de l'Ambassade comme si Eschine avait été le seul responsable du discrédit dans lequel était tombée la paix et l'avait soutenue parce qu'il avait été soudoyé. Eschine répliqua dans un discours portant le même titre (qui nous est également parvenu) et fut acquitté de justesse. Son influence dans l'Assemblée se poursuivit et, en 340, il fut envoyé comme représentant d'Athènes au conseil amphictyonique où ses qualités d'homme d'État échouèrent notablement. Il fut responsable d'une guerre au moment où l'unité était essentielle pour éviter de fournir à Philippe une occasion d'intervenir dans les affaires de la Grèce. L'invasion par Philippe qui s'ensuivit se termina par la défaite d'Athènes et de Thèbes à Chéronée, en 338. Eschine fut l'un des membres de l'ambassade envoyée négocier avec Philippe après la bataille. En 336, Ctésiphon proposa que l'on couronnât Démosthène dans le théâtre à l'occasion des Dionysies pour les services rendus à la cité. Eschine mit Ctésiphon en accusation pour la soi-disant illégalité de la proposition, mais ne poursuivit pas l'accusation avant 330, alors qu'Athènes était presque complètement isolée, et privée de perspectives de libération du joug de la Macédoine. Dans son discours Contre Ctésiphon, il attaqua toute la carrière de Démosthène comme insultante pour Athènes. Démosthène répliqua dans son discours Sur la couronne avec une efficacité si accablante qu'Eschine ne réussit pas à obtenir le cinquième des votes du jury qui pouvait le sauver d'une amende. Il se retira d'Athènes à Rhodes où il mourut aux environs de 322. À Rhodes, il récita des déclamations et prononça une fois son discours Contre Ctésiphon ; lorsque les Rhodiens exprimèrent leur stupéfaction qu'il n'ait pas gagné, il leur répondit : « Si vous aviez entendu Démosthène, vous ne seriez pas surpris. » Eschine n'était pas un rhéteur professionnel. Une histoire rapporte que, quand les Rhodiens lui demandèrent de leur enseigner la rhétorique, il répondit que lui-même l'ignorait. Il ne semble pas qu'il ait écrit de discours pour d'autres, et il est probable qu'il ne reçut aucune instruction rhétorique, mais il était intimement familier avec les usages. Il était célèbre pour la dignité de son allure et sa voix splendide. Ses discours, dont seuls les trois mentionnés ci-dessus étaient connus des critiques anciens, étaient caractérisés par le goût pour les aspects légaux d'une affaire, une utilisation astucieuse de tactiques de diversion, et des descriptions colorées. Dans les temps anciens comme modernes, il a souffert de la comparaison avec Démosthène. Le but général de ses activités fut de trouver un compromis entre Athènes et la Macédoine, qui laisserait Athènes indépendante et en paix. Inévitablement, il lui fallait, dans une certaine mesure, faire confiance à la Macédoine. Cette politique manquait de noblesse, et trouvait difficilement une expression rhétorique. Par conséquent il fut impuissant à résoudre les questions politiques de fond, et, contrairement à Démosthène, qui les plaçait dans une perspective plus large, il paraît dépourvu d'une vision globale.

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