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emphase

L’emphase doit être considérée comme un des moyens de l’ornement du style (de l’élocution). Elle vise à renforcer l’expression pour lui donner plus de vivacité, pour faire que les mots soient entourés en quelque sorte d’un halo qui leur confère une valeur supérieure, comme d’une irradiation inhabituelle. Elle est donc a priori plus convenable au genre démonstratif, mais il peut être utile d’en user avec pertinence dans le judiciaire, pour accroître la force de l’argumentation. Elle se manifeste par plusieurs moyens : dénomination, comparaison, caractérisation pittoresque, gradation, épanorthose, description négative, antithèse, hyperbole, anthorisme, parallélismes, induction ou inférence diverses, coordination, subdivision ; elle recourt donc aux formes variées de l’amplification. Mais il ne faut jamais perdre de vue qu’en tant qu’ornement du discours, l’emphase est un moyen de toucher et de plaire, et qu’elle vise essentiellement à forger l’énergie du style. Concrètement, l’emphase a désigné un type de pratique expressive, voire d’exercice d’apprentissage de la rhétorique. Elle s’insère alors dans l’ensemble des techniques de la variation par raccourcissement. Mais si l’on prend les choses à l’envers, c’est-à-dire si l’on part de la phrase ou du discours condensés, l’emphase se repère alors, ou se marque, par des formules aux procédés assez fixes : la qualité d’un personnage ou d’une réalité quelconques, normalement indiquée par un adjectif qualificatif, apparaît mise en valeur par sa nominalisation comme substantif, ou un thème quelconque (personne, objet, institution, sentiment, comportement, abstraction, institution, etc.) se voit désigné seulement par l’indication d’un unique caractère attributif (Messaline est la volupté même). On peut aussi mettre l’emphase en relation avec la question des passions. De ce point de vue, il ne s’agit pas tant des passions à décrire, dans un sujet faisant partie de son propos, ni des passions à exciter dans le cœur des auditeurs, que des passions dont on peut avoir intérêt à se montrer soi-même animé en tant qu’orateur, dans la visée de la persuasion. Il s’agit que ses paroles fassent entendre plus qu’elles-mêmes, que le discours déborde de sa signification simple, que tout ce qui est dit, par une portée supérieure, révèle en outre la flamme qui anime celui qui parle. C’est dans cette direction, enfin, qu’il est utile d’envisager la valeur de l’emphase. Du côté de la réception, on est en face d’un soulignement de la forme, de l’expression ; c’est sur le signe même que se concentre l’attention. Celui-ci déborde de signification, s’impose dans sa présence matérielle et requiert un considérable élargissement de son champ de résonance. Il crée un horizon d’interprétation à la fois bien ouvert, éventuellement trop vaste, et pourtant déterminé et contraignant. L’emphase est donc l’action du langage, ou le langage en action, qui émeut la sensibilité et bouleverse l’âme.
=> Éloquence, orateur, élocution; exercice, variation, ornements, style, niveau, plaire, toucher, persuasion; démonstratif, judiciaire; passions; amplification, gradation, hyperbole, description négative, épanorthose, antithèse, anthorisme, métonymie, antonomase; énergie; exténuation.