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CLEMENCEAU Georges

CLEMENCEAU Georges. Homme politique français. Né à Mouilleron-en-Pareds, Vendée, le 28 septembre 1841, mort à Paris le 24 novembre 1929. Fils d'un médecin qui l'élève dans de ferventes convictions républicaines, il fait lui-même ses études de médecine mais se passionne déjà pour la politique, lance un journal de combat contre l'Empire et passe deux mois et demi à la prison de Mazas. Reçu médecin, il entreprend un voyage en Amérique, rencontre Herbert Spencer et Stuart Mill, donne des cours dans une institution de jeunes filles, épouse une de ses élèves et rentre en France peu avant la guerre de 1870. Le 4 septembre, il est nommé maire du 18e arrondissement, puis, en février 1871, élu à l'Assemblée Nationale où il vote contre les préliminaires de paix. A la fois patriote acharné et révolutionnaire, il approuve d'abord la Commune, puis essaie de jouer un rôle de médiateur entre Paris et Versailles et finit par se retirer quelque temps de la vie politique. Sa carrière, jusqu'en 1875, se déroulera au Conseil municipal dont il devient président. Mais à la Chambre, où il entre un an plus tard, il va pouvoir montrer toutes ses qualités d'éloquence et d'énergie qui l'imposent immédiatement comme chef de la gauche radicale. Dès les années 1885, sa réputation de « tombeur » de ministères est assez justifiée que c'est lui qui force Jules Ferry à démissionner après le désastre de Lang-Son, et Jules Grévy après le scandale des décorations. Héritier de l'esprit jacobin, Clemenceau reste sceptique sur la politique coloniale et ne pense qu'a la défense des frontières de l'Est, à la revanche : aussi, après les élections de 1885, est-il un des principaux soutiens de Boulanger, qu'il fait entrer au ministère Freycinet; mais il sera aussi, à un moment où la presse radicale continuait à soutenir Boulanger, un des premiers à se détacher de celui qu'il croyait être un « général de coup d'Etat ». Un instant compromis dans le scandale de Panama par ses relations avec Cornélius Herz, suspecté d'être « l'homme de l'Angleterre », impopulaire à cause de son opposition à l'alliance russe, Clemenceau est battu aux élections de 1893 mais trouve dans l'affaire Dreyfus — au cours de laquelle il soutient Zola dans son journal L'Aurore — l'occasion de reprendre une place de premier plan. Après avoir soutenu la politique anticléricale du ministère Combes, durement réprimé comme Ministre de l'intérieur les grèves de 1906, Clemenceau doit abandonner en 1909 la présidence du Conseil qu'il occupait depuis trois ans, mais il part avec la réputation d'être l'« homme fort » de la République. Aussi, au moment de la grave crise de 1917, Poincaré fera-t-il appel à son vieil adversaire Clemenceau qui, des l'ouverture des hostilités, n'a cessé de dénoncer faiblesses, incompétences et manoeuvres pacifistes (en particulier celles de Caillaux et Malvy). On sait quelle part décisive Clemenceau, qui avait pris pour devise : « Je fais la guerre », eut dans la victoire de 1918. C'est lui encore, pendant l'année 1918-1919, qui mène les négociations préliminaires du Traité de Versailles; mais quelques mois plus tard, il est battu aux élections à la Présidence de la République — l'Assemblée ayant pris peur devant le mépris du parlementarisme que ce vieux jacobin laissait de plus en plus paraître. Ayant donné sa démission de président du Conseil en janvier 1920, il entre dans une retraite assez amère, occupée par la rédaction d'un ouvrage de philosophie, Au soir de la pensée (1927), d'une étude sur Démosthène (1926) et surtout de ses mémoires parus après sa mort, Grandeur et misère d'une victoire (1930). Le « Tigre » fut certainement la personnalité la plus puissante parmi les hommes politiques de la IIIe République; il s'était imposé très tôt, avant même d'accéder au gouvernement, comme un journaliste d'une vaste culture, capable de traiter les sujets les plus variés, cherchant la force dans la concision — qualités qu'on retrouve chez l'orateur, particulièrement vigoureux, dont le sens des réalités et l'habileté tactique tempéraient un idéalisme démocratique hérité des grands romantiques. ? « C'est un tribun, et aussi un homme de lettres; un tribun d'une véhémence brève et sobre, et d'une drôlerie à l'occasion, qui le mettent à cinq cent mille pics au-dessus des orateurs les plus fameux, qu'ils s'appellent Gambetta, de Mun ou Jaurès. » Léon Daudet. ? « A quelque parti que l'on appartienne, sous quelque angle que la passion déformante nous le fasse apercevoir, il est impossible de ne pas lui reconnaître les qualités qui toujours surent conquérir et emporter la faveur dans ce pays-ci : la verve batailleuse, l'indépendance du caractère, la souffrance pour les opprimés, la haine des oppresseurs et cette espèce d'humeur chevaleresque et guerrière qu'il porte hardiment dans tous les combats qu'il mène. » Jules Bertaut.