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Bertrand Poirot-Delpech

Bertrand Poirot-Delpech est né à Paris le 10 février 1929. Licencié en philosophie, il est journaliste depuis 1951. Longtemps collaborateur de la Nouvelle Revue Française, il tient le feuilleton littéraire du Monde, après avoir été critique dramatique et chroniqueur judiciaire dans ce même journal. Il a publié en 1958 son premier roman, Le grand dadais, couronné par le prix Interallié. En 1970, il a reçu le Grand Prix du roman de l’Académie française pour La folle de Lituanie. Bertrand Poirot-Delpech a été le président du Syndicat professionnel de la critique dramatique et musicale de 1967 à 1971. «J’ai bien aimé la Cour d’Assises. Il y faisait plus chaud qu’en cellule. » C’est par ces mots, qui n’auraient pas mal figuré dans L'Etranger de Camus, que Bertrand Poirot-Delpech fit en sifflotant son entrée dans la littérature. Alain — le grand dadais — commençait ainsi le récit des aventures qui, à l’âge du baccalauréat, l’avaient mené de la Porte Champerret à Saint-Tropez et de l’état d’orphelin de guerre à celui moins enviable de taulard, via quelques boîtes de strip-tease à la mode. Déjà, tout le talent d’écriture de Bertand Poirot-Delpech, son penchant à l’ironie et à la jubilation, son acuité dans l’observation des travers sociaux et des modes, faisaient la roue dans ces pages qui rajeunissaient de manière éblouissante le genre psychologique. Le malheur du Grand dadais fut qu’il arriva au moment précis où le Nouveau Roman commençait à chercher des poux dans la tête des stylistes... Peut-être impressionné par les références universitaires des nouveaux théoriciens, Bertrand Poirot-Delpech donna deux autres romans, La grasse matinée et L’Envers de l’eau, mais se retint par la suite d’écrire pendant six années. Mai 68 le libéra d’un coup du terrorisme que faisaient régner le Nouveau Roman et la Nouvelle Critique — ou de la crainte qu’il éprouvait de nager contre ces courants — et il lâcha l’année suivante un pamphlet de soulagement, Finie la comédie, dirigé contre « l’intellectuel, ce nouvel aristo »,... et peut-être aussi contre le sentiment de culpabilité qu’il n’avait pas manqué de nourrir pendant sa période silencieuse. Tranquilisé, il se remit à l’ouvrage romanesque et La Folle de Lithuanie — un superbe roman par lettres, échangées entre deux amies d’enfance — révéla qu’il n’avait rien perdu de ses dons en voulant les faire oublier. Comme dans Les grands de ce monde — dont l’idée de départ est que le général de Gaulle ne s’est pas rendu à Baden en mai 68 comme l’histoire le prétend, mais qu’il pique-niquait incognito dans les couloirs du métro Balard — Bertrand Poirot-Delpech sait conjuguer dans un même livre le suspense de l’enquête policière et les folies de l’imagination pure, réunir l’humour et la gravité dans la profanation des mythologies de notre époque, alterner le pied-de-nez et le chapeau-bas aux idoles, faire crisser la craie sur le tableau de mœurs et passer parfois l’éponge... selon que vous serez bon ou mauvais lecteur. L’auteur caché/public de Tout fout le camp — parodie, signée d’un pseudonyme, du livre de Valéry Giscard d’Estaing Démocratie française -laisse en effet, peut-être par souci du qu’en lira-t-on, la porte ouverte à bien des interprétations, parfois contradictoires. Mais cette ambiguïté est liée à la surface de son talent, à son honnêteté intellectuelle et à son désir d’intéresser le lecteur, autant et plus qu’à la qualité de ses doutes. Ce dont il ne serait pas excessif de conclure que Bertrand Poirot-Delpech est peut-être l’écrivain le plus doué de sa classe et de sa génération. L’un des romanciers, aussi, qui prennent leurs sujets dans le monde comme il va, ce qui tend, sous le raz-de-marée des exercices de mémoire et des nostalgies giralduciennes, à devenir tout simplement une audace. ► Bibliographie

Romans

Le grand dadais, 1958, Denoël, et rééd. « Folio » ; La grasse matinée, 1960, Denoël ; L'envers de l'eau, 1963, Denoël ; La Folle de Lituanie, 1970, Gallimard ; Les grands de ce monde, 1976, Gallimard ;

Essais

Finie la comédie, 1969, Gallimard ; Au Soir le Soir, 1969, Mercure de France ; Tout fout le camp, 1976, Le Sagittaire signé Hasard d'Estin.

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