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ALAIN (vie et oeuvre)


Éviter les préjugés, se méfier des opinions communes et des idées toutes faites: tel est le message d'Alain. Pour cela, il faut travailler en prise directe sur le monde humain tel que nous le voyons et non à partir d'un système théorique éloigné de la réalité.
VIE
Le temps d'Alain est le temps de trois guerres:
1870 - 1914 - 1939. C'est aussi celui de toutes les révoltes contre l'exploitation, l'injustice, le racisme. C'est enfin le temps de la défense de la liberté et de la démocratie.
Le journaliste et le moraliste
Le soldat et le pacifiste
OEUVRES
Dans les "Propos", Alain établit sa doctrine. Mais ce sont ses autres ouvrages qui donnent l'assise philosophique sans laquelle la doctrine, quoique stimulante, n'est qu'idéologie .
Propos sur les pouvoirs - Éléments d'une doctrine radicale (1925)
Face à la puissance écrasante de l'État, l'individu n'a d'autre recours que la libre expression de la pensée et son suffrage de citoyen. La vigilance politique exige que l'on dissocie l'approbation et le respect, de la nécessaire obéissance qu'impose l'ordre. La doctrine du pouvoir libéral repose toujours sur la légalité de l'opposition. Il n'y a pas de démocratie quand on ne prend pas l'opinion au sérieux et c'est la duperie qu'il faut partout et toujours dénoncer.
Proposer l'éducation - Pédagogie enfantine (1932)
L'école est un monde clos et qu'il faut garder étranger au monde du travail. Sa fin n'est pas l'apprentissage et le métier, mais l'instruction et la formation de l'homme. Elle doit s'appliquer à régler l'imagination enfantine par les modèles de la culture humaine. C'est par cette fidélité à la culture et par la transmission de ce qu'on nomme, à juste titre, les humanité s que l'école assure la véritable introduction au monde du travail et aux responsabilités du citoyen.
Éléments de philosophie (1940)
Il s'agit des leçons qu'Alain a données au Lycée Henri-IV et au Collège Sévigné réunies sous la forme d'un «cours de philosophie». L'essentiel de sa doctrine y est résumé. Alain y traite de la connaissance, de l'expérience, de l'action, des passions et des vertus.
Mars ou la guerre jugée (1921)
Alain y explique que ce qu'il a ressenti le plus vivement dans la guerre, c'est l'esclavage. Il s'insurge contre le mépris des officiers pour les hommes de troupe lorsqu'ils «parlent aux hommes comme on parle aux bêtes». Il ne supporte pas l'idée de cette tuerie organisée, de ce traitement que l'homme inflige à l'homme. Il se révolte quand il assiste à la mise au point d'une énorme machine destinée à tenir les hommes dans l'obéissance et explique pourquoi, soldat, il n'a jamais voulu d'autres galons que ceux de brigadier.
EPOQUE
Progrès techniques et scientifiques
Les vues sur l'univers ont été changées par la théorie de la relativité d'Einstein. Freud a bouleversé la psychologie et remis en question la morale. La technique a commencé à modifier les conditions d'existence. Les conceptions psychologiques, morales et métaphysiques s'essoufflent à rattraper la science et la technique, qui les remettent sans cesse en question. Le problème devient de savoir comment fonder une nouvelle sagesse dans un monde qui n'a plus de stabilité.
Les nouvelles idéologies
«Les philosophes jusqu'à présent n'ont fait qu'interpréter le monde de diverses façons: il s'agit maintenant de le transformer.» (K. Marx) La révolution industrielle a bouleversé le climat social. De nouveaux partis politique voient le jour, les syndicats ouvriers apparaissent. La France est secouée par des crises intérieures telles l'affaire Dreyfus ou la séparation des Églises et de l'État. L'intellectuel va ressentir la nécessité de prendre parti. Zola l'a fait. Alain va le faire. Raymond Aron et Jean-Paul Sartre le feront.
APPORTS
Le «Propos». C'est un espace de prose racontant la trajectoire d'une pensée. Alain part d'un fait d'observation ou d'actualité pour le soumettre au jugement. C'est en cela qu'Alain renouvelle Socrate, en travaillant en prise directe sur le monde humain et les passions qui l'animent.
La philosophie heureuse. L'unité de la pensée d'Alain tient dans l'unité de son projet: donner une image exacte et vraie de l'homme, soumettre le réel et l'existence à la réflexion et à la pensée, en évitant les préjugés. Voilà ce qu'Alain nomme la philosophie heureuse à quoi il s'est exercé, contre la philosophie d'école. C'est l'optimisme et le volontarisme qui doivent caractériser le philosophe, et il faut cultiver l'amitié joyeuse plutôt que la pitié. Alain philosophant est un homme tourné vers le monde, qui nous dit que la perception est une vigilance, l'acte nous faisant prendre conscience de nous-mêmes. Nous n'avons pas à penser autre chose que ce que nous voyons, mais cela appelle un engagement total de la pensée.
Postérité-actualité. Alain présente trop de nuances, voire de contradictions, pour être populaire. Son rayonnement est réduit, mais, qu'il ait marqué des élèves aussi différents que Jean Prévôt, André Maurois, Simone Weil atteste son influence cachée sur l'intelligence contemporaine.


ALAIN
(Emile Chartier, dit), philosophe français (Mortagne 1868 - Le Vésinet 1951). Célèbre professeur au lycée Henri-IV, où il exerça une profonde influence sur l'esprit des futurs normaliens, il est l'auteur des Propos, des Entretiens au bord de la mer, des Dieux, du Système des beaux-arts, etc. Sa manière d'exprimer ses pensées en de courts « propos » a détourné certains critiques, qui le traitèrent de « pense-petit », d'étudier sérieusement son œuvre philosophique. En fait, la modestie des Propos est un peu une réplique à celle des Essais de Montaigne. En une pensée toujours concrète, il développe une théorie tout à fait kantienne de la connaissance perceptive; sa doctrine de l'imagination créatrice a inspiré l'imaginaire de Sartre. Son humanisme cartésien, son style imagé et concis, plein de formules séduisantes, en font l'un des philosophes aujourd'hui les plus lus du grand public.

Philosophe et essayiste français (1868-1951). • Partisan d’un rationalisme rigoureux, Émile Chartier, dit Alain, développe une éthique exigeante centrée sur le jugement et la liberté, qu’on peut résumer par la fameuse formule : « Penser, c’est dire non ». • Alain montre notamment que la perception n’est pas simplement l’affaire des sens, mais un acte de jugement. Du cube que j’ai sous les yeux, je ne « vois » à proprement parler que trois faces ; si je reconnais cependant un cube, c’est que « l’objet est pensé, et non pas senti ». • Convaincu, à l’instar de Descartes, de la toute-puissance de notre volonté, Alain voit dans la psychanalyse une nouvelle mystification, et dans l’inconscient freudien une dangereuse « idolâtrie du corps ». • Il s’attache ainsi à dénoncer tous les dangers qui menacent en permanence notre liberté, qu’il s’agisse, en nous, de nos propres passions ou, dans la cité, des tentations totalitaires auxquelles le pouvoir risque toujours de succomber. • De son expérience d’artilleur pendant la Première Guerre mondiale, Alain concevra un profond dégoût pour la guerre, accusée de ravaler l’humain au rang de l’animal. Principales œuvres : Propos (1906-1951), Système des Beaux-Arts (1920), Mars ou la Guerre jugée (1921), le Citoyen contre les pouvoirs (1926), Les Idées et les Âges (1927), Les Dieux (1934).

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