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ABBAS Ferhat (1899-1985)

ABBAS Ferhat (1899-1985) Homme politique algérien. Issu d’une famille de la région de Taher en voie d’ascension sociale après avoir été ruinée par la colonisation, Ferhat Abbas entre à douze ans à l’école. Boursier de l’État colonial, il s’établit, ses études terminées, comme pharmacien à Sétif (1933). C’est dans le syndicalisme étudiant - il a présidé aux destinées de l’Association des étudiants musulmans d’Afrique du Nord pendant quatre ans (1927-1931) - qu’il commence à s’interroger sur l’avenir de son pays. Conquis par les idéaux de la Révolution française, admirateur de Mustafa Kemal (Atatürk), il brûle de faire entrer l’Algérie musulmane dans la modernité. Son destin politique bascule après le rejet de la revendication d’égalité des droits dans la citoyenneté française demandée par le premier rassemblement national, le Congrès musulman (1936), et du projet Blum-Violette qui donnait des droits de citoyen à 24 000 musulmans. L'autisme de la France rapproche F. Abbas de l’Association des ulama - en renonçant à l’assimilation (1938) -, puis du PPA (Parti du peuple algérien) en reconnaissant la nécessité d’un État algérien (1943). Résolument hostile à la politique de l’Axe, il rédige après le débarquement anglo-américain le Manifeste du peuple algérien et crée avec le PPA et les Ulama les Amis du Manifeste et de la liberté (AML) « pour rendre familière en Algérie l’idée d’une nation algérienne et désirable la constitution d’une république autonome fédérée à une République française rénovée ». Il ne sera pas entendu. Assigné à résidence en 1943, emprisonné en 1945 après les massacres du 8 mai à Sétif et Guelma, il fonde après sa libération l’Union démocratique du Manifeste algérien (UDMA), dont la démarche est guidée jusqu’en novembre 1954 (déclenchement de l’insurrection inaugurant la guerre d’indépendance) par la peur des débordements d’un mouvement de masse plébéien activiste. Ignoré après l’insurrection par la France, il se rallie au FLN (Front de libération nationale) fin 1955 et devient le premier président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) en septembre 1958. Écarté fin août 1961, il se rapproche des militaires par ressentiment. Nommé président de l’Assemblée constituante, il tente d’infléchir le projet constitutionnel dans un sens plus libéral. Assigné à résidence pour s’être opposé à Ahmed Ben Bella (août 1964-juin 1965), puis à Houari Boumediène (mars 1976-juin 1977), il s’associe à une conspiration armée (l’« affaire de Cap Sigli »), mais le président Bendjedid Chadli (1979-1992) lui évite le tribunal. Réhabilité en 1984, il publie ses mémoires sous le titre Autopsie d’une guerre. Représentant du libéralisme politique, F. Abbas préconisait l’adoption de la pensée occidentale pour réévaluer l’héritage national. Ce n’était pas un simple occidentaliste. Il lui a manqué pour affirmer ses idées le support d’un groupe social. L’éparpillement en un nombre incalculable d’intérêts des classes moyennes a lourdement pesé sur son destin. Abbas, Ferhat (Taher 1899-Alger 1985); dirigeant nationaliste algérien. Fils d’un caïd du Constantinois, il appartient à la bourgeoisie indigène favorisée par les autorités coloniales (il reçoit une bourse pour ses études). Il s’engage dans les rangs des « évolués » et il anime l’Association des étudiants musulmans d’Afrique du Nord de 1927 à 1931. Ensuite, pharmacien à Sétif, il occupe des fonctions d’élu local : conseiller général et municipal, puis délégué financier. Il dirige le mouvement des Jeunes Algériens qui demandent l’intégration politique des élites indigènes et expose ses idées en 1936 dans son journal L'Entente. Attaqué par les colons qui refusent toute réforme et par les Ulémas (chefs religieux qui développent d’importants réseaux de résistance culturelle dans les années 1930) qui l’accusent de renier l’islam, ses espoirs d’intégration sont balayés par le rejet du projet Blum-Viollette en 1937. La défaite de 1940 et l’attitude des Américains (il rencontre un conseiller de Roosevelt en 1942) l’incitent à rédiger en 1943 un Manifeste du peuple algérien, unanimement approuvé par tous les courants nationalistes. La répression des émeutes de Sétif en 1945 met fin à cette première union nationale. D’abord hostile à l’insurrection, il rallie le FLN en 1956. De 1958 à 1961, il dirige le gouvernement provisoire de la République algérienne au Caire. En 1962, il préside l’Assemblée nationale constituante, mais il démissionne en août 1963, dénonçant l’influence sans partage du FLN. Placé en résidence surveillée de 1963 à 1965 puis en 1976-1977, il incarne un certain libéralisme, hérité de l’évolution tourmentée du nationalisme algérien. Bibliographie : F. Abbas, Autopsie d’une guerre, 1980.