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Un résultat peu glorieux

Publié le 22/02/2012

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17 janvier 1992 -   Les pays de la Communauté vont finalement reconnaître - ou non - dans le désordre les Républiques de Yougoslavie qui leur en ont fait la demande. Après des mois d'hésitations précautionneuses, dont le motif était de maintenir une position commune, le résultat n'est pas glorieux pour l'Europe.    C'est M. Mitterrand qui, dans la Communauté, avait le plus insisté pour préserver cette unité. Ce souci était légitime, et sa démarche s'imposa jusqu'à la mi-décembre : non seulement les Douze jusque-là agirent collectivement, mais tous les Etats concernés de la région(Autriche, Hongrie, Bulgarie, Albanie, notamment) s'alignèrent sur eux, évitant ainsi de reconstituer les réseaux des amitiés et des inimitiés balkaniques qui furent à l'origine des déchirements de l'Europe au début de ce siècle. C'est l'Allemagne qui la première a rompu ce consensus en décidant avant Noël de reconnaître unilatéralement la Slovénie et la Croatie, sans attendre que la procédure mise en place à l'initiative de la France arrive à son terme ce 15 janvier.    Cette responsabilité-là incombe donc à Bonn. La responsabilité de M. Mitterrand est en revanche d'avoir cru pouvoir faire l'unité de l'Europe autour de ses propres positions, de moins en moins convaincantes. Le président de la République est parti en juin d'une idée dépassée, à l'époque assez largement partagée : l'idée que les peuples en conflit pouvaient s'entendre.    Tout en proclamant le droit à l'autodétermination, il n'a jamais paru par la suite admettre vraiment le bien-fondé d'aspirations qu'il tenait pour la résurgence de nationalismes archaïques de la part des communautés slaves de Yougoslavie, trop souvent qualifiées par lui de " tribus " ou, comme mardi encore, d' " ethnies enchevêtrées ". Il n'a ensuite pas réalisé que cette attitude, vu l'évolution du rapport de forces sur le terrain, revenait à cautionner tacitement les menées expansionnistes de la Serbie contre la Croatie. Il s'est mis finalement dans la situation où ses plus fermes alliés n'étaient, en Yougoslavie que la Serbie et, en Europe, que la Grèce.    C'est pour ne pas être de reste - la Grande-Bretagne ayant changé son fusil d'épaule, - que la France a finalement décidé, mercredi, de ne plus différer la reconnaissance de la Croatie.    Les actes de reconnaissance ne peuvent à eux seuls régler le conflit yougoslave et, si existent aujourd'hui quelques espoirs de rétablir la paix, c'est plutôt dans l'envoi de " casques bleus " de l'ONU qu'ils résident. A cela, la France aura pris une part déterminante, de même qu'à la mise sur pied de la conférence de La Haye, comme éventuel cadre d'un règlement négocié. Par son action sur le terrain, M. Bernard Kouchner lui a en outre évité de donner l'impression de trop pencher d'un côté. Cela étant, il aura fallu des changements de position " in extremis " pour que l'épisode des reconnaissances ne se traduise pas par une totale débandade européenne. BULLETIN Le Monde du 16 janvier 1992

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