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Thomas HOBBES: La loi de nature et la loi civile

Publié le 27/02/2008

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La loi de nature et la loi civile se contiennent l'une l'autre, et sont d'égale étendue. En effet, dans l'état de pure nature, les lois de nature, qui consistent dans l'équité, la justice, la gratitude, et les autres vertus morales qui dépendent de ces premières, ne sont pas proprement des lois (je l'ai dit plus haut, à la fin du chapitre XV), mais des qualités qui disposent les hommes à la paix et à l'obéissance. C'est une fois qu'une République est établie (et pas avant) qu'elles sont effectivement des lois, en tant qu'elles sont alors les commandements de la République, et qu'en conséquence, elles sont aussi lois civiles : c'est en effet le pouvoir souverain qui oblige les hommes à leur obéir. En effet, pour déclarer, dans les différends qui opposent les particuliers, ce qui est équité, ce qui justice, ce qui est vertu morale, et pour rendre ces exigences contraignantes, il faut des ordonnances du pouvoir souverain, et des châtiments prévus pour ceux qui les enfreindraient: ces ordonnances sont donc une partie de la loi civile. Et réciproquement, la loi civile est une partie des préceptes de la nature : en effet, la justice, autrement dit l'exécution des conventions et le fait de rendre à chacun ce qui lui revient, est un précepte de la loi de nature ; or tout sujet d'une République s'est engagé par convention à obéir à la loi civile (...) : l'obéissance à la loi civile est donc également une partie de la loi de nature. La loi civile et la loi naturelle ne sont donc pas des espèces de loi différentes, mais des parties différentes de la loi : une partie de celle-ci, écrite, est appelée loi civile ; l'autre, non écrite, est appelée loi naturelle. Mais le droit de nature c'est-à-dire la liberté naturelle de l'homme, peut être amoindri et restreint par la loi civile : et même, la fin de l'activité législative n'est autre que cette restriction, sans laquelle ne pourrait exister aucune espèce de paix. Et la loi n'a été mise au monde à aucune autre fin que celle de limiter la liberté naturelle des individus, de telle façon qu'ils puissent, au lieu de se nuire mutuellement, s'assister et s'unir contre les ennemis communs. Thomas HOBBES

Pour Hobbes, le concept de loi reflète cette double exigence : déterminer une nature humaine à partir de la réalité déterminée de la vie civile, pour comprendre le sens de cette vie civile. La loi de nature caractérise la nature humaine, aussi bien abstraitement, à l'" état de nature ", que dans la cité. Le concept de justice correspond lui-même au statut philosophique de la notion de loi : il signifie soit le contenu de la troisième loi de nature, c'est-à-dire le respect de la convention passée avec autrui ; soit l'ensemble des dispositions prises dans le cadre d'une république (elle-même fruit d'une convention), pour faire respecter non seulement la convention républicaine, ou contrat social, et par là l'ensemble des lois de nature (dont l'équité, onzième loi de nature), mais aussi tous les types de convention que prennent les hommes en société).

-         De tels concepts apportent de nombreux éléments pour l'étude des rapports entre la morale et la politique, la loi morale trouvant son critère en la loi naturelle, ainsi que la loi civile. Par ce critère de la raison également partagée par tous, Hobbes cherche à penser la correspondance parfaite entre loi naturelle et loi civile, à rationaliser le travail du légiste, la sentence du juge. Ses efforts tendent à réconcilier la science, l'idéal philosophique et le fait.

 

 

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« Comment Hobbes, dans ce chapitre, parvient-il à répondre à la question suivante : l'institution des lois va-t-elle àl'encontre de la nature ? Comment en effet, s'articule loi naturelle et loi civile de sorte que l'une soit garante del'autre, et réciproquement ? Explication détaillée - 1er MOUVEMENT Le concept de droit de nature, dont on peut dire que l'ensemble des lois naturelles le constitue, va de pairavec le concept de loi naturelle.

En définissant le lien entre loi naturelle et loi civile, Hobbes franchit une étapeimportante dans la construction de son édifice politique.

Il fonde ce lien dans une implication réciproque de leurcontenu rationnel.

Loi civile et loi de nature ne diffèrent pas par leur nature.

« La loi de nature et la loi civile secontiennent l'une l'autre ».

Ainsi la loi de la raison humaine et la loi civile ne sont pas étrangères l'une à l'autre; mais en outre elles tiennent l'une de l'autre leur propre sens.

Hobbes pose ici l'origine du droit civil comme étant de nature rationnelle et humaine, non pas transcendanteou d'ordre divin.

Dès lors, l'homme, en tant qu'être de raison, est lui-même au fondement du droit civil.

Maisune seule et unique loi civile ne s'adresse pas à un seul individu ; elle diffère de la loi de nature par son premierdegré de finalité, à savoir le commandement unique et exprès à l'ensemble des individus d'une république,autrement dit par ce qu'elle représente aux yeux du citoyen : le devoir d'obéissance au souverain.La loi de nature n'est pas une loi au sens strict : une loi n'est loi à proprement parler que dans la mesure oùelle est effective, et seul le pouvoir souverain, obligeant les hommes à lui obéir, rend la loi effective.

En effet,cette obligation-là n'est pas seulement d'ordre moral, l'obligation morale seule étant insuffisante pour le projetde vie pacifique en société.

« (...) nonobstant les lois de la nature, (que chacun n'observe que s'il en a lavolonté et s'il peut le faire sans danger), si aucun pouvoir n'a été institué, ou qu'il ne sois pas assez grand pourassurer notre sécurité, tout homme se reposera (chose pleinement légitime) sur sa force et sur son habiletépour se garantir contre les autres » (c'est ce qu'il dit précisément au chapitre XV auquel il fait référence dansnotre texte).

L'obligation d'obéissance à la loi civile tient au droit de vie et de mort du souverain sur lescitoyens, à son droit de châtier quiconque enfreint la loi, à la force de ce droit, et à la crainte de cette force.L'effectivité de la loi civile est ainsi rendue universelle, et la paix devient possible.Néanmoins, les lois de nature ne sont pas des lois au sens strict, mais « des qualités qui disposent les hommesà la paix et à l'obéissance.

» Des vertus morales disposant naturellement les hommes à la paix, et àl'obéissance aux lois de la république, artifice instauré en vue de cette paix.

Tous les hommes ne disposent pasde ces qualités de façon égale, bien qu'ils disposent tous de la même raison.

Dans ces conditions, le respectintégral et cohérent de la loi de nature est dangereux sinon impossible pour l'individu isolé, sans l'interventiond'un arbitre impartial : on ne peut se protéger d'autrui sans entrer dans une logique de guerre, sans aller àl'encontre des lois naturelles, inclinant à la paix.Hobbes envisage donc ce fait par deux points de vue extrêmement opposés : celui du pouvoir souverains'exerçant universellement, ayant pour fin la paix pour l'ensemble de la cité; celui de l'individu, égal aux autrespar la faculté de jugement, par son essence, et différent par son existence et son devenir.

La loi civile prévoitet sanctionne le manquement à la loi de nature ; elle a pour but de prévenir et de régler les conflits entrecitoyens d'une même république, mais cela avec le constant souci de préserver l'équité.

Hobbes insiste ainsisur le nécessaire respect de la loi de nature : la loi de nature doit non seulement être au fondement de larépublique, et déterminer la lettre de la loi civile, mais doit permettre au juge de déclarer, dans un différend, cequi est équité.

Ainsi, la loi de nature est une partie de la loi civile.

Les lois naturelles sont donc aussi des loisciviles.

- 2nd MOUVEMENT C'est donc dans cette perspective que dans un second temps va montrer que de même que la loi naturelle esteffectuée par la loi civile, la loi civile a pour fondement la loi naturelle.

De sorte qu'il n'y a donc aucunedifférence de nature entre loi naturelle et loi civile, et que par conséquent le pouvoir souverain est d'ordrepurement humain.

Au fondement le droit naturel sur le droit civil, et réciproquement, Hobbes évite le recours àtout principe transcendant.Logiquement, puisque la loi naturelle (qui n'est, à l'état de nature, que qualité) a besoin de la loi civile pourêtre actualisée nécessairement, alors la loi civile apparaît comme le prolongement « conventionnel » d'un droitnaturel : c'est donc la légitimité de la loi civile qui est ainsi énoncée par Hobbes.

On ne saurait en effet refuserun droit s'il prend pour fondement la droit naturel, c'est-à-dire le droit inhérent à l'homme.

Sa légitimité estdonc fondée de manière immanente.

Obéir à la loi civile, c'est en quelque sorte obéir à la loi naturelle qui en estle fondement.

Hobbes fonde donc, à partir du contrat, la légitimité même du droit civil.

La loi civile viententériner, en s'inscrivant dans le moment du contrat (c'est-à-dire dans l'instauration des hommes en Etat), laloi naturelle qui était encore faible à l'état de nature.

L'un sert donc de fondement à l'autre.S'il n'y a pas de différence de nature entre loi naturelle et loi civile (l'une parachevant l'autre), il y a pourtantune différence de degré qui se mesure à la restriction, dans l'état civil, de la liberté naturelle.

Il n'y a donc passtricte identité entre loi civile et loi naturelle – même s'il ne saurait différer de nature mais seulement de degré.Ainsi, si les libertés, les ambitions, les passions, les intérêts individuels sont causes de l'état de guerre qui estruineux pour tous, les individus ne peuvent que prendre conscience des méfaits de l'état de nature et aspirer àentrer dans l'état civil d'eux-mêmes, sans y être contraint par une force étrangère.

Les individus eux-mêmespeuvent donc décider eux-mêmes de mettre fin à l'état de guerre et d'entrer dans l'état civil.

Comment ? Parun contrat qui va les lier les uns aux autres.

Telle est la solution proposée par Hobbes.. »

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