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Sport et TÉLÉVISION de 1960 à 1969 : Histoire

Publié le 02/12/2018

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histoire

Sport

et TÉLÉVISION

 

Le sport moderne est né avec le siècle: jadis simple loisir pour aristocrates, puis, à la suite de Pierre de Coubertin, ferment de paix entre les peuples, l’engouement populaire et l'essor du professionnalisme qui ont accompagné sa renaissance ont d’abord fait du sport un spectacle dont les acteurs sont les athlètes, souvent plus habiles dans un stade qu’on ne l’est dans bien des théâtres à tisser ensemble les fils de la gloire et du drame. Aussi la télévision s’est-elle intéressée dès ses balbutiements au spectacle sportif. En 1936, les jeux Olympiques de Berlin furent ainsi l’objet de l’un des premiers reportages réalisés en direct hors des studios. Dès lors, sport et télévision ne devaient plus se quitter, grandissant côte à côte jusqu’à l’âge de raison qui dans les années soixante verra définitivement scellée leur union. Par la grâce du progrès technique qui, avec l’intervention de la caméra HF, sut donner au direct ses lettres de noblesse, mais également par l’émergence d'un faisceau d’intérêts communs — véritable filon d’audience pour la télévision —, le sport reçoit de celle-ci de confortables ressources financières (droits de retransmission, sponsoring) en même temps qu’une promotion sans égale. Mais la médaille a son revers: accusée de vider les stades, de favoriser certains sports ou de transformer les sportifs en stars, la télévision apparaît non pas comme un simple partenaire mais comme le moteur d’une révolution qui va faire du sport non plus un spectacle, mais un business.

 

En France, tout a commencé le 25 juillet 1948: la RDF réalise ce jour-là son premier direct sportif télévisé à l’occasion de l’arrivée du Tour de France. L’événement est historique, mais la lourdeur des caméras de l'époque, reliées de surcroît par un câble à la régie, interdit toute mobilité et donne à la réalisation un aspect rudimentaire que l’intervention du zoom en 1954 atténuera quelque peu.

 

Ce n’est en fait qu’à partir de 1958, avec l’apparition de la caméra vidéo HF, que le reportage sportif mérite son nom. À la fois émettrice et réceptrice, et donc libérée du câble qui entravait son mouvement, la caméra HF rend enfin compatibles direct et mobilité. C’est que parallèlement le poids des caméras s’est considérablement réduit grâce aux semi-conducteurs et les 100 kilos que pesaient en 1952 la caméra et sa voie ne sont plus, à la fin des années cinquante, qu’un lointain souvenir. Il devient ainsi possible de filmer en direct et en continu des compétitions, telles que les courses cyclistes qui ne se déroulent pas en un lieu fixe.

 

Dès 1960, la télévision retransmet en direct les dix derniers kilomètres des étapes du Tour de France. Le reportage est périlleux: fixé au pare-brise d’une voiture suiveuse, le caméraman réalise d’extraordinaires travellings sur les coureurs, donnant ainsi l’illusion aux téléspectateurs de faire partie de la course. À partir de 1962, le nouvel allègement de la caméra permet à Jacques Rémy de l’embarquer sur une moto et donc de filmer sans en gêner le déroulement les trente

histoire

« SPORT ET TÉLÉVISION.

Les sportifs dev ie nnen t des vedettes.

Ci-dessous: Jacques Anquetil signe un autographe.

© Olympia -Sipa SPORT ET TÉLÉVISION.

SPORT ET TÉLÉVISION.

En 1969, la publicité est introduite sur les stades.

© Universal Photo En 1968, les jeux Olympiques de Grenoble som troublés par l'affaire des marques de ski, jugées trop ostensibles ...

© Bruce - Gam ma derniers kilomètres des étapes.

La mise au point de la caméra dite du Tour de France sera profitable à la télévision tout entière qui l'utilisera notamment pour les besoins de Cinq Colonnes à la une.

L'hélicoptère fait également son apparition dans la panoplie du reporter sportif, comme relais, mais aussi comme plate-forme: le caméraman François Magnin l'utilisera ainsi lors des Vingt-Quatre Heures du Mans 1960 pour réaliser, suspendu dans le vide, de saisis­ santes images des voitures fonçant dans la ligne droite des Hunau­ dières.

Enfin, en 1967, trois innovations majeures viennent enrichir le reportage en direct: ce sont l'indispensable ralenti; le synthétiseur ou crayon électronique, utilisé pour la première fois par Roger Couderc lors de la retransmission du match de rugby France-Irlande, pour superposer à l'image des informations telles que la composition des équipes, les résultats, etc.; et surtout la couleur dont l'arrivée donne­ ra aux retransmissions sportives leur véritable dimension.

Alors que le nombre de récepteurs passe en France de 690 000 en 1958 à 8 316 000 en 1968, Tour de France, Vingt-Quatre Heures du Mans ou tournoi des Cinq Nations conquièrent Je petit écran qui dès 1968 consacre au sport près de 230 heures annuelles, soit près de 5 % de ses programmes.

Il est vrai que le sport télévisé rencontre au moindre coût une large audience.

Quand la production d'une émission de variétés telle que Douce France coûte en moyenne 10 à 12 millions de francs, la retransmission d'un match de football ne revient en effet qu'à 3 ou 4 millions de francs.

Une aubaine lorsque l'on sait que la Coupe du monde de footbay de 1966 a été suivie par près de 2 milliards de téléspectateurs.

Aux Etats- Unis, le réseau ABC n'a pas bâti autrement son succès face aux deux grands networks NBC et CBS.

En pariant sur le sport, notamment sur les jeux Olympiques et le football universitaire, ABC a gagné audience et prestige.

Exploité à juste titre par la télévision, le sport n'a pas man­ qué, loin s'en faut, d'y trouver son compte tant sur le plan financier qu'en termes de promotion.

Au début des années soixante, la situa­ tion économique du sport n'est guère brillante: frappée par la crise, l'industrie du cycle ne peut plus financer à elle seule les compétitions cyclistes et, en football comme en basket, les clubs rencontrent des diffi cultés croissantes faute de subventions municipales conséquentes.

Dans cette conjoncture morose dont les piètres résultats des athlètes français aux jeux de Rome fournissent l'exact reflet, l'irruption de la télévision a pu être saluée comme opportune.

La manne il est vrai est considérable: toute retransmission d'une compétition s'accompagne en effet du versement par la télé­ vision de droits dont le montant varie de quelques centaines de mil­ liers de francs dans le cas d'un match de football du Championnat de France à plusieurs millions de dollars lorsqu'il s'agit des jeux Olym­ piques.

Ainsi à Rome, les droits de retransmission se sont élevés à 1 200 000 dollars.

Huit ans plus tard, les images des jeux de Mexico ont rapporté près de 10 millions de dollars, soit environ huit fois plus.

Jusqu'en 1968, l'intégralité de ces droits est revenue aùx comités orga­ nisateurs des jeux, une fois acquittée au Comité olympique inter­ national {CIO) une contribution de 100 000 francs suisses.

Mais compte tenu de l'inflation des sommes en jeu, Je CIO s'est résigné dès Mexico à prélever sur les droits de télévision une commission forfai­ taire puis relative, en vue des jeux de 1972 à Munich.

Pourvoyeuse de droits substantiels, la télévision contribue également à faire du sport un support publicitaire attrayant, pour les fabricants d'articles de sport, bien sûr,, mais aussi pour les firmes extrasportives.

Une voie explorée aux Etats-Unis dès 1944 par Gil­ lette: sponsor pendant vingt ans de combats de boxe dont la retrans­ mission hebdomadaire du célèbre «Friday Night Gillette» a long­ temps battu des records d'audience.

Moins coûteux et parfois plus rentable que la publicité classique, le parrainage sportif s'insère en outre idéalement dans le management d'entreprises soucieuses de mobiliser leur personnel autour d'un grand dessein.

Jean-Luc Lagar­ dère n'a pas d'autre objectif lorsque, en 1965, il engage Matra -avec succès -dans la compétition automobile.

L'intégration de ces spon­ sors au monde sportif ne va pas sans susciter quelques résistances au sein des fédérations, inquiètes de voir leur pouvoir mis en balance par des intérêts purement mercantiles.

L'affaire des marques de ski, qui empoisonne un temps l'atmosphère des jeux Olympiques de Gre­ noble, est symbolique de ces réticences.

De la même façon, il faut attendre 1969 pour voir fleurir autour des terrains de football les premiers panneaux publicitaires.

La télévision n'en demeure pas moins un formidable instru­ ment de promotion du sport.

Polarisée sur l'image héroïque du cham­ pion, eUe favorise les comportements d'imitation.

Il est avéré que les exploits de Michel Jazy en 1962 ont conduit vers l'athlétisme bon nombre de ses admirateurs et qui peut affirmer que ce n'est pas la verve chaleureuse d'un Roger Couderc qui a permis au rugby (d'un simple «Allez les petits!>>) de franchir les rives droites de la Loire? Seulement voilà, passé la magie des premières heures, les milieux sportifs ne tardent pas à s'inquiéter du rôle pernicieux que pourrait jouer la télévision: la fréquentation des stades, l'équilibre entre les disciplines et le statut de l'athlète semblent en effet devoir à terme pâtir du succès télévisuel du sport.

Le débat trouve un écho tout particulier au sein de la Fédération française de football, soucieuse de préserver avant toute chose l'affluence et la pratique, car avant d'être un spectacle, le sport est selon elle «la meilleure école pour affronter les luttes de la vie».

Noble opinion qui inspire son refus catégorique d'autoriser la retransmission en direct des matches du Championnat de France.

L'interdit est levé le 20 février 1965 à l'occasion du match. »

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