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Soie, route de la

Publié le 03/02/2013

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1   PRÉSENTATION

Soie, route de la, ancienne route commerciale reliant la Chine aux rives de la Méditerranée.

Traduction littérale de Seidenstrassen — mot attesté pour la première fois dans un ouvrage du baron Ferdinand von Richthofen, explorateur allemand de la fin du xixe siècle —, l’appellation « route de la Soie « désigne l’ensemble des routes caravanières qui ont relié la Chine à l’Occident (l’Inde, la Perse et Rome) pendant deux millénaires, mais également la voie maritime utilisée à partir du ier siècle de notre ère pour rejoindre la Chine et qui contourne soit l’Arabie (par la mer Rouge et le golfe d’Aden), soit l’Iran et le Pakistan (par le golfe Persique et le détroit d’Ormuz), et passe par l’océan Indien.

2   LE MYSTÈRE DE LA SOIE

La route de la Soie tire son nom du commerce de la soie (du latin classique serica « étoffes, vêtements de soie originaires de Chine «). De toutes les marchandises convoyées à l’époque romaine, la soie est alors la plus précieuse, la plus onéreuse et la plus mystérieuse, objet d’un engouement démesuré dans les quartiers élégants de Rome. À cette époque, le secret de la sériciculture (culture des vers à soie) — qui remonte au néolithique — n’a pu encore être percé, comme en témoignent les Géorgiques (36-29 av. J.-C.) de Virgile, qui célèbrent « les laines que le Sère cueille délicatement aux feuilles des arbres à soie « ; cet art n’est en effet divulgué qu’au vie siècle.

La route de la Soie est empruntée pour la première fois au ier siècle av. J.-C., après que l’empereur chinois Wudi, las des harcèlements aux frontières des nomades Xiongnu (une peuplade du Nord), est parvenu à assurer sa suzeraineté et à affermir les marches occidentales de l’Empire. Une fois les Xiongnu défaits, la dynastie Han se lance dans la pacification de la région et la construction de pistes, ainsi que dans l’établissement de lignes de défense et de garnisons. Grâce à ce contrôle partiel des routes commerciales, les échanges entre l’Extrême-Orient et le bassin de la Méditerranée sont favorisés — même s’ils restent périlleux, compte tenu des rudes conditions climatiques, des difficultés du terrain, des tributs à payer, des paiements inopinés d’octrois et des inévitables embuscades de pillards.

3   LES PISTES CARAVANIÈRES
3.1   Chang’an et la traversée de la Chine

Le point de départ de la route terrestre de la Soie est Chang’an (près de l’actuelle Xi’an), capitale impériale des Han antérieurs édifiée au iiie siècle av. J.-C.

Après Lanzhou, sur les rives du fleuve Jaune (le Huang He), la première grande étape est l’oasis de Dunhuang, en bordure du désert de Gobi. À Dunhuang, la piste caravanière se subdivise en plusieurs itinéraires, après le franchissement des portes de Yumenguan (« Porte de jade «) ou de Yangguan. Deux des plus fréquentés longent le désert du Taklamakan. Une branche septentrionale borde la chaîne montagneuse du Tian shan (« les monts célestes «) et suit la ligne des oasis et des cités caravanières du Gansu et du Xinjiang (Turfan et ses grottes rupestres bouddhiques de Bezeklik, Qarachahr, Koutcha et Aksou), tandis qu’une branche méridionale traverse les oasis luxuriantes du sud du Xinjiang (au nord des monts Kunlun, qui marquent la frontière avec le Tibet) : Miran, Endere, Niya, Khotan — célèbre pour son centre de culture bouddhique, ses tapis, ses soies et ses jades — et Yarkand. Ces deux chapelets d’oasis se rejoignent à Kachgar, à l’extrémité ouest du Xinjiang.

3.2   La traversée de l’Asie centrale

La route se hisse ensuite à l’ouest vers les montagnes du Haut Pamir (« le Toit du Monde «), en direction de Samarkand, Tachkent, Boukhara et Merv (aujourd’hui Mary, dans le Turkménistan), vers le sud de la mer Caspienne. Deux autres pistes bifurquent (à Khotan) vers le sud-ouest, à travers les montagnes du Karakorum, et rejoignent (par-delà l’Hindou-Kouch) soit le Gandhara puis l’Inde, soit la Bactriane, célèbre pour ses chameaux (qui ont la réputation de pressentir les tempêtes de sable).

3.3   Du Proche-Orient aux rives de la Méditerranée

Après le franchissement du Tigre et de l’Euphrate se dresse, à l’autre bout de la route terrestre de la Soie, l’ancienne Tadmor (Palmyre) aux couleurs de miel, puis la ville de Damas, avant que ne commence la descente vers les ports méditerranéens de Tyr ou d’Antioche, à partir desquels les marchandises sont acheminées vers Constantinople, Alexandrie et Rome.

4   DES ÉCHANGES INTERCONTINENTAUX
4.1   Comptoirs, oasis et caravansérails

La route terrestre de la Soie s’étend sur quelque 14 000 km aller-retour. Afin de ne pas avoir à effectuer la totalité du parcours, les caravanes monnayent ou troquent généralement leurs marchandises de campements en caravansérails tout au long du chemin, dans les comptoirs ou dans les oasis où sont déployées les étoffes sous les palmes, ou dans la pénombre des bivouacs des chameliers : à Purusapura (l’actuelle Peshawar, au nord-ouest du Pakistan), capitale du Gandhara ; à Taxila, capitale du Gandhara oriental, ou, plus au nord, dans la région du Pamir, à Tach-kurgan, en un lieu dit « la Tour de Pierre « (mentionné par Martin de Tyr, d’après le récit de Maès Titianos, à travers la Géographie de Ptolémée), dans la haute vallée de l’Amu-Daria.

4.2   Les convois de marchandises

La distance à parcourir est telle que ne sont convoyées que des marchandises de grande valeur : vers l’Occident, la soie de Chine, mais aussi des laques, des peaux, des carapaces de tortues, des ivoires et des épices (cannelle, muscade, gingembre), du musc et des racines séchées de rhubarbe (rhubarbus palmatum, denrée rare aux vertus médicinales, également utilisée comme teinture et pour le tannage du cuir) ; vers l’Orient, des textiles (lin, laine), de la verrerie, de l’ambre, des lapis-lazuli du Badakchan, les épées damascènes en acier, du vin, des pièces d’or et d’argent, ou les grands « coursiers célestes « du Fergana (chevaux sauvages de Transoxiane).

4.3   Les échanges culturels

Au delà des contacts commerciaux qu’elle a établis entre l’Orient et l’Occident, la route de la Soie a facilité les échanges culturels et religieux. Les voyageurs, marchands et pèlerins ont ainsi contribué à la diffusion en Chine du bouddhisme et de l’art qui lui est associé. En attestent les premières représentations figurées du Bouddha et des bodhisattva de l’école du Gandhara, le trésor de Begram (découvert en 1937 en Afghanistan), les Guanyin en bronze inspirées des Avalokiteshvara de l’art tibétain, les sanctuaires rupestres du bassin du Tarim ou encore la diffusion de textes sacrés après l’invention de la xylographie (gravure sur bois) au viiie siècle (le Sutra du diamant découvert à Dunhuang en 1907). C’est aussi par cette même route que transitent, au vie siècle, les disciples de Mani (manichéens) et, au viie siècle, les missionnaires nestoriens venus prêcher en Chine la parole de Nestorius, comme l’atteste une stèle de 781.

5   APOGÉE ET DÉCLIN DE LA ROUTE DE LA SOIE

La route de la Soie connaît son âge d’or sous la dynastie Tang (618-907), alors que Chang’an est devenue, à la fin du viie siècle, un carrefour cosmopolite de deux millions d’habitants et un creuset de civilisations. Se coudoient, dans les échoppes des bazars bigarrés de la capitale, musiciens, jongleurs, nains et danseurs des hautes oasis de Turfan, de Khotan, de Koutcha et de Komoul venus divertir la cour impériale, marchands sémites de pierres précieuses, palefreniers du Turkestan, chameliers de Bactres, fauconniers syriens, orfèvres sassanides, scribes sogdiens, marchands de vins et épiciers ouïgours, ou encore Tochariens, Mongols, Japonais, Malais, Coréens, etc. Cette effervescence bat également son plein au xiiie siècle, durant la période de la pax mongolica de l’Empire mongol, lorsque se développent activement les échanges artistiques et commerciaux entre la Chine, Gênes et Venise. L’épisode le plus glorieux de cette dernière période est le long périple de trois ans et demi entrepris par le marchand vénitien Marco Polo, qui a emprunté la route de la Soie pour se rendre à la cour de Kubilaï Khan.

Le déclin de la route de la Soie débute au milieu du xive siècle, alors que s’effondre l’Empire mongol (la dynastie Yuan chinoise) et que progresse l’islam en Asie centrale, déclin qui s’accentue sous la dynastie Ming, la Chine entrant dès lors dans une longue période d’autarcie, conséquence de la fermeture des frontières. Les routes maritimes et les zones côtières restent cependant très fréquentées.

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