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Qu'est-ce que comprendre autrui ?

Publié le 24/01/2004

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La compassion, la pitié, la sympathie sont le plus souvent ce qui fait exister autrui pour nous : mais est-ce vraiment comprendre autrui ?Ce serait confondre fusion et compréhension : aimer quelqu'un, ce n'est pas le comprendre, c'est souvent projeter mes besoins sur lui. Ce n'est pas dans une foule qu'on se sent le mieux compris ! B - LA RECONNAISSANCE DE L'ALTERITE - L4ALTER EGO1) L'altérité radicale Autrui est autre. Pour comprendre les autres, il ne suffit pas de les ressentir identiques à moi-même, il faut aussi saisir en quoi ils ne sont pas moi.Je peux m'aider de ce que les autres disent ou signifient, mais autrui ne se réduit pas à des phrases, des gestes ou des actes. Chaque fois, l'intériorité d'autrui se manifeste dans l'extériorité, mais je dois résister à la tentation d'imposer à autrui la compréhension que j'ai de lui.Comprendre les motifs d'un criminel, ce n'est ni l'excuser, ni le réduire à une machine. C'est comprendre l'irrationalité d'autrui, qui doit être prévue et prise en charge par la politique. 2) La liberté politique de l'autreL'homme est un animal politique, selon Aristote. L'homme vit dans et par la reconnaissance des autres.

 Les Lettres persanes, oeuvre épistolaire de Montesquieu, racontent le voyage à Paris de deux Persans. Leur séjour est pour eux l'occasion d'observer la société et le mode de vie des Français, leurs coutumes, leurs traditions religieuses ou politiques, et d'en faire le rapport à leurs interlocuteurs restés en Perse. En confrontant deux civilisations totalement opposées, Montesquieu montre à quel point chacune semble étrangère à l'autre, il pose donc le problème de l'altérité, et ainsi celui de la compréhension d'autrui.

      En effet, est-t-il vraiment possible de comprendre autrui? A premier abord, il serait possible de le comprendre grâce à la connaissance immédiate de ce dernier, cependant, elle est souvent faussée car je n'ai pas les mêmes conceptions que lui. On peut donc douter que je comprenne vraiment autrui, car dès lors que sa compréhension repose sur un raisonnement, fondé sur une ressemblance entre ce que je vois de lui et moi-même, cela revient à une projection de ma conscience en lui et non à la compréhension de son existence.  Pourtant, il est légitime de le comprendre.

      Nous verrons donc dans un premier temps pourquoi il est possible de comprendre autrui et comment, puis dans un second temps, que cette compréhension d'autrui est impossible puisque je dois forcément passer par moi. Enfin, nous nous demanderons si notre société tente vraiment de comprendre l'altérité.

 

« foule et que tout le monde s'enfuit, je puis me sentir irrésistiblement entraîné à imiter ces gestes de fuite etl'épouvante — liée à ce comportement — s'empare de moi.

Je partage la frayeur de cette foule, mais je ne puis direque je suis réellement entré en communion avec mes voisins.

Si Nietzsche a sévèrement condamné la pitié, c'estprécisément parce qu'il l'a confondue avec une contagion mentale de ce genre.

Dès lors, la pitié n'est plus que latransmission en chaîne de la souffrance, une contagion de malheur, une déperdition de vitalité qui multiplie lasouffrance au lieu de la guérir.Max Scheler a bien montré que la vraie pitié, que la sympathie authentique est tout autre chose.

Si j'ai pitié del'autre, c'est précisément parce que je ne suis pas malheureux moi-même, parce que je n'éprouve pas sa misère.

Sije souffrais comme lui, je serais moi-même objet de pitié et non conscience compatissante.

En réalité, la sympathietranscende l'affectivité.

Elle est un acte de la personne qui vise la souffrance ou la joie d'une autre personne, quiles reconnaît plus qu'elle ne les éprouve.

Gide, par exemple, déclare à propos de sa femme « Par sympathie, jeparvenais à comprendre ses sentiments, je ne pouvais les partager».

Et Max Scheler assure que je puis «fort biencomprendre l'angoisse mortelle d'un homme qui se noie sans pour cela éprouver rien qui ressemble même de loin àune angoisse mortelle».

Bien plus, je puis comprendre selon Max Scheler des émotions que je n'ai jamais éprouvéesmoi-même.

Je lis dans ce visage une pureté, une candeur que je n'aurais pas soupçonnées auparavant.

Ce regardfurieux me signifie une qualité, une intensité de haine que jamais je n'aurais cru possibles.

Pradines écrit dans cetteperspective que « nous pouvons sympathiser même avec des sentiments que nous ne saurions éprouver soit qu'ilsnous dépassent soit au contraire que nous les dépassions, avec la tristesse de Jésus à Gethsemani ou avec lespetits chagrins d'un enfant».

La connaissance d'autrui bien loin de me renvoyer comme dans la théorie de l'analogieà des expériences familières, élargit au contraire mon horizon, m'apporte d'incessantes révélations. Ce que nous ressentons est toujours différent et difficilement communicable, mais je peux comprendre qu'autrui estsensible : cela m'interdit la haine ou la négation de l'humanité de l'autre.La compassion, la pitié, la sympathie sont le plus souvent ce qui fait exister autrui pour nous : mais est-ce vraimentcomprendre autrui ?Ce serait confondre fusion et compréhension : aimer quelqu'un, ce n'est pas le comprendre, c'est souvent projetermes besoins sur lui.

Ce n'est pas dans une foule qu'on se sent le mieux compris ! B - LA RECONNAISSANCE DE L'ALTERITE - L'ALTER EGO 1) L'altérité radicale Autrui est autre.

Pour comprendre les autres, il ne suffit pas de les ressentir identiques à moi-même, il faut aussisaisir en quoi ils ne sont pas moi.Je peux m'aider de ce que les autres disent ou signifient, mais autrui ne se réduit pas à des phrases, des gestes oudes actes.

Chaque fois, l'intériorité d'autrui se manifeste dans l'extériorité, mais je dois résister à la tentationd'imposer à autrui la compréhension que j'ai de lui.Comprendre les motifs d'un criminel, ce n'est ni l'excuser, ni le réduire à une machine.

C'est comprendre l'irrationalitéd'autrui, qui doit être prévue et prise en charge par la politique. 2) La liberté politique de l'autre L'homme est un animal politique, selon Aristote.

L'homme vit dans et par la reconnaissance des autres.

Cettereconnaissance, cette compréhension des besoins de tout homme, passe par des lois et un contrat social.La vie en société suppose la reconnaissance des besoins mais aussi d'une liberté infinie d'autrui qui exige le respect.La société démocratique doit parfois forcer le sujet à être libre, mais aussi comprendre que la liberté d'autrui estirréductible. 3) L'infini respect que je dois à l'autre, véritable voie vers sa compréhension. Selon Kant, si nous voulons être rigoureux, il nous faut clairement opposer deux types d'êtres:– Les choses, c'est-à-dire tous les êtres qui ne possèdent pas la raison.

Leur valeur, si grande qu'elle puisse êtresur tel ou tel plan, n'est cependant jamais absolue mais relative : les choses sont toujours des moyens.– Les êtres raisonnables ou personnes, c'est-à-dire ces êtres qui seuls sont doués d'autonomie, c'est-à-dire dupouvoir qu'ils ont d'obéir à la loi que leur impose leur nature raisonnable, du pouvoir de se déterminer à agir par laraison.

C'est de cette autonomie que la personne tient sa dignité inconditionnelle.

La personne n'a pas en effetseulement une valeur pour nous, mais une valeur absolue, littéralement une valeur incomparable.

«Tout homme,écrit Kant, a le droit de prétendre au respect de ses semblables et réciproquement il est obligé au respect enverschacun d'entre eux.

L'humanité elle-même est une dignité ; en effet l'homme ne peut jamais être utilisé simplementcomme moyen par aucun homme (ni par un autre, ni même par lui-même), mais toujours en même temps aussicomme une fin, et c'est en ceci précisément que consiste sa dignité (la personnalité), grâce à laquelle il s'élève au-dessus des autres êtres du monde, qui ne sont point des hommes et peuvent lui servir d'instruments.

c'est-à-direau-dessus de toutes les choses.

Tout de même qu'il ne peut s'aliéner lui-même pour aucun prix (ce qui contrediraitle devoir de l'estime de soi), de même il ne peut agir contrairement à la nécessaire estime de soi que d'autres seportent à eux-mêmes en tant qu'hommes, c'est-à-dire qu'il est obligé de reconnaître pratiquement la dignité del'humanité en tout autre homme, et par conséquent sur lui repose un devoir qui se rapporte au respect qui doit êtretémoigné à tout autre homme.». »

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