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Qu'est-ce que comprendre ?

Publié le 27/02/2005

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Par ailleurs revoir dix fois le même tour subtil de prestidigitation ne vous fait pas ipso facto avancer dans la compréhension du procédé. Donc comprendre est autre chose que associer. B - Selon Bergson, on l'a vu, «comprendre un objet, c'est savoir s'en servir ». Cette définition est dans la règle de ce même pragmatisme qui lui fait prendre les idées générales pour la projection des habitudes sur le plan des idées et des mots. Mais toutefois, il y a quantité de choses dont nous savons nous servir sans les comprendre, même parmi les objets fabriqués (appareil de radio, fer à repasser, montre etc.) et d'autres choses que nous comprenons sans qu'elles soient utilisables, les idées des autres par exemple... Donc comprendre n'est pas « savoir utiliser ». C - Comprendre, c'est d'abord unifier. Depuis la simple compréhension d'une page philosophique qui consiste à voir tous les mots et toutes les idées successives s'unifier sous un seul thème ou une seule intention, jusqu'à la découverte du physicien qui bâtit une théorie et comprend par elle une multitude de lois jusque-là étrangères les unes aux autres, on ne comprend qu'en unifiant. Comprendre, c'est ensuite expliquer.

« Introduction J'assistais à la démonstration d'un illusionniste : un gros robinet était sur la scène; il n'était relié qu'à un tube de verresortant par l'orifice d'où, habituellement, coule l'eau.

Le tube, vertical, se terminait dans un petit bassin.

Aucune conduited'adduction de l'eau, et au signal du prestidigitateur, l'eau coulait dans le tube de verre et emplissait le bassin.

Je necomprenais pas comment l'eau pouvait sortir sans être entrée.

Je sentais bien qu'il y avait un « truc », mais je ne voyaispas lequel.

Impression que « quelque chose » manquait à la perception, et que ce quelque chose devait transformer lenon-sens en intelligible.

Lorsque je sus qu'à l'intérieur du tube de verre, un second tube plus fin, amenait l'eau souspression et qu'elle ressortait le long des parois du premier tube, je compris.

En quoi la perception avait-elle changé,qu'est-ce que « comprendre »? Développement. Il m'a semblé d'abord que j'avais un « schème » du robinet-d'où-l'eau-jaillit préexistant à l'expérience actuelle et formé parl'image de toutes mes expériences antérieures.

Or ce schème ne s'appliquait pas à la nouvelle expérience; je ne la «reconnaissais » pas.

De là, l'impression d' « étrange », d' « impossibilité », d' « extraordinaire ».

En apprenant la solution,je retrouvais le schème habituel et tout redevenait normal.

Comprendre serait donc ramener l'inconnu au connu, lenouveau insolite à l'image habituelle, trouver l'analogue dans le différent.

Cependant, dans mon expérience, le « schème »ordinaire se trouvait tout de même en défaut : l'eau n'arrivait pas dans le robinet par le côté normal.

Ce n'était donc pastant à mes souvenirs que j'avais fait appel, qu'à un enchaînement logique.

L'expérience actuelle restait nouvelle en uncertain sens; ce qui la rattachait aux précédentes, c'était l'identité de son principe.

L'échec de ce principe, constituaitl'impression d'absurde, son retour satisfaisait la raison, quoique l'expérience demeurât inhabituelle et donc insolite.

Lecaractère inhabituel s'était maintenu, seul avait disparu le caractère d'irrationnel.

Le « truc » consistait à sauver la logiqueau mépris des apparences, ou même, à dépister la logique par une astucieuse mise en scène.

Sous le rétablissement del'habituel, comprendre consiste donc à rétablir le principe logique.

Quelle est l'action de ce principe sur ma perception, etpeut-on « comprendre » sans s'y référer ?Avant son intervention, je perçois un ensemble, mais cet «ensemble», tout en soutenant des rapports de proximité ou desuccession, manque d'une certaine « unité », une unité d'un certain genre, en l'absence de laquelle les éléments restentflottants, susceptibles de plusieurs significations, étrangers les uns aux autres.

Cela est net dans l'effort pour comprendreun texte difficile (écrit dans une langue peu familière, soit étrangère, soit trop technique); les mots se suivent, leur lienspatial ou même grammatical peut apparaître clairement, sans que le sens jaillisse.

Comprendre, c'est unifier, et unifier «par en haut », c'est-à-dire en découvrant d'une manière ou d'une autre, mais toujours avec une certaine tonalité affectivede joie, l'idée qui donne un sens à tous ces détails, celle qui nous permettrait de redire la même chose en d'autres mots,ou de refaire l'expérience avec d'autres variables. L'objection qui se présente alors est celle de l'intelligence animale.

Quand mon chien pousse le loquet pour ouvrir la porte,je dois bien reconnaître qu' » il a compris ».

Et cependant, si on place un loquet d'un autre genre (une targette parexemple), on ne peut pas dire que, même après avoir réussi à ouvrir le nouveau loquet, il ait compris; car il ne saurajamais ni leur principe commun, ni leur différence spécifique; il aura associé par une longue série d'essais et d'erreurs,l'effort d'un geste à l'image de la porte qui s'ouvre.

Ce qui fait qu'un enfant de sept ans met plus longtemps qu'un singepour ouvrir une boîte à secret, c'est que le singe cherche un objet caché et que l'enfant cherche à comprendre, c'est-à-direqu'il cherche le mécanisme ou même le principe de ce mécanisme.

Cela se vérifie quotidiennement : je n'ai pas « compris »la télégraphie sans fil parce que je sais mettre en marche mon poste de TSF.Il y a un autre sens du mot comprendre qui semble orienter l'attention dans une tout autre direction : c'est comprendresympathiquement quelqu'un, participer à ses réactions, « se mettre à sa place ».

Cette forme de compréhension, fondéesur le sentiment, n'a rien à voirsemble-t-il avec l'intelligence.

On pourrait dire que c'est s' « identifier », et s' « unir » affectivement avec un autre être.

Ilsemble qu'il soit plus vrai de dire que « comprendre » en ce sens, c'est « prendre pour soi », assumer la situation affectivede l'autre.

On ne peut « comprendre » tant qu'on reste étranger, et ce sens éclaire le précédent.

Dans les deux cas, nousavons une assimilation, avec soi comme centre de référence, une « incorporation » à soi-même de l'objet ou de l'être quel'on comprend. Conclusion. Comprendre c'est donc essentiellement transformer la relation entre le moi et une chose, un être ou une situation qui luiétaient d'abord étrangères.

C'est les faire « siens ».

Cette transformation peut se faire par deux moyens apparemmentdifférents : l'intelligence et le cœur, qui ont en commun cependant un acte d'intuition qui tient des deux et qui lestranscende l'un et l'autre.. »

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